ORGANISATION DE
L’EGLISE DIOCESAINE
Intervention à
la journée de formation de la Presse Catholique,
organisée à Paris le 20 octobre 2005,
par la Fédération Française de la Presse Catholique
Je vais essayer de décrire de deux manières la vie
d’une Eglise diocésaine :
-
d’une part en rappelant ce qui est prescrit (le droit écrit) : qui doit
faire quoi.
-
d’autre part en décrivant ce qui est pratiqué (les usages) : ce qui se fait .
Et je le ferai en abordant 6 domaines :
-
d’une part, l’adaptation de la loi ecclésiale à la situation française,
-
d’autre part, les procédures diocésaines, qui constituent le Droit diocésain.
Le Droit canon de 1983 définit le diocèse comme
« la portion du peuple de Dieu confiée à un Evêque, pour qu’il
en soit, avec la coopération du presbyterium, le pasteur ».
-
Il n’y a pas de dimension territoriale dans cette définition.
-
Il est exprimé un lien fort de l’Evêque avec les prêtres.
-
Il y a une définition du diocèse par rapport à l’Evêque.
1. Les pouvoirs de
l’Evêque diocésain
1.1. Pouvoir législatif
Seul l’Evêque diocésain prend des décisions dans
l’Eglise particulière qu’est son diocèse :
-
il promulgue pour son diocèse les décisions de l’Eglise universelle (comme la
réforme liturgique de Vatican II),
-
il rédige des décrets (synodaux, épiscopaux).
1.2. Pouvoir
exécutif
L’Evêque diocésain fait appliquer ses décisions par
lui-même ou par ses Vicaires qui possèdent, à cet effet, l’autorité de
l’Evêque, « ne font qu’un avec lui ».
L’Exécutif se nomme l’Ordinaire, il est composé
de l’Evêque, de son Vicaire général et des Vicaires épiscopaux. Ces Vicaires
n’ont de pouvoir que par la volonté de l’Evêque siégeant. Ce sont des prêtres.
On appelle Curie diocésaine l’ensemble des
personnes qui aident l’Evêque à gouverner : dans la direction de l’action
pastorale (sanctifier le Peuple de Dieu & annoncer la Parole de Dieu),
l’administration des actes (sacramentels, prédicatifs, etc.) et l’exercice du
pouvoir judiciaire.
Vicaire général
Il est obligatoire.
Il a autorité dans tout le diocèse.
Dans les grands diocèses il peut y en avoir plusieurs.
Vicaire épiscopal
Il est facultatif.
Il a autorité dans le domaine qui lui est confié par
l’Evêque :
-
Territoire : archidiaconé, zone…,
-
Secteur d’activités : vie consacrée, liturgie, formation,…
1.3. Pouvoir
judiciaire
L’Evêque diocésain juge de la bonne application des
actes (sacrements, gouvernement…)
-
par lui-même,
-
ou, plus généralement, par son Vicaire judiciaire.
Vicaire judiciaire ou Official
Il juge au nom de l’Evêque,
Il est assisté de juges,
Il dirige l’organisation judiciaire, appelée Officialité,
aujourd’hui inter-diocésaine.
Conseil de médiation
Il est composé de prêtres (et de laïcs).
Il règle les conflits entre les personnes et la Curie
diocésaine, avant d’aller en justice ecclésiastique ou civile.
2. Les Conseils de l’Evêque
Seul à décider, l’Evêque n’est pas seul dans
sa décision.
L’Evêque est entouré de conseils (obligatoires) et
s’entoure de conseils (facultatifs)
2.1. Conseil presbytéral
Il est obligatoire.
Il est composé de prêtres, les uns élus par les
prêtres et d’autres désignés par l’Evêque.
Il constitue « comme le sénat de l’évêque ».
Il ne peut pas se réunir lors de la vacance du siège
épiscopal.
Son avis est requis (consultatif) en certains domaines
(comme le changement de structures paroissiales, la fixation de taxes
diocésaines).
2.2. Collège des consulteurs
Il est obligatoire.
Il est composé de membres du Conseil presbytéral, donc
de prêtres, choisis par l’Evêque.
Son accord est requis pour des aliénations de biens
ecclésiastiques de plus de 140 000 euros (l’accord de Rome est requis pour plus
de 1 400 000 euros). Ces chiffres sont réactualisés régulièrement.
Son avis est requis pour la gestion ordinaire.
Il nomme l’Administrateur diocésain lors de la vacance
du siège épiscopal.
2.3. Conseil Diocésain des Affaires économiques
Il est obligatoire.
Il est composé d’experts en droit et économie, prêtres
ou laïcs, choisis par l’Evêque.
Son accord requis pour des aliénations de biens de
plus de 140 000 euros.
Son avis est requis pour la gestion ordinaire.
Il a deux fonctions principales selon le Droit
Canon :
-
établir le budget diocésain,
-
donner des instructions à l’Econome diocésain.
2.4. Conseil épiscopal
Il est facultatif.
Il est composé souvent des Vicaires exécutifs et
d’autres personnes désignées par l’Evêque.
Le Conseil épiscopal, par la fréquence, souvent
hebdomadaire, de ses réunions, et par sa composition, est, de fait, l’instance
de conseil la plus proche de l’évêque.
Il est le lieu d’élaboration de la
décision épiscopale, et, selon les personnalités en présence, il est un
lieu de confrontation, de consensus, de proposition, d’information…
Il est souvent considéré comme le lieu de pouvoir par
ceux qui n’en sont pas membres.
2.5. Conseil diocésain de pastorale
Il est facultatif.
Il représente les forces vives d’un diocèse
Son organisation (composition, convocation…) dépend de
l’Evêque.
2.6. Autres conseils diocésains
Selon les diocèses il peut exister d’autres
conseils : Diaconat, Vie consacrée, Mission ouvrière, etc.
Deux problèmes :
1.
La représentativité dans l’Eglise catholique
Du fait que la loi ecclésiale désigne les prêtres
comme les collaborateurs de l’Evêque, et que les prêtres (dans l’Eglise
« latine ») ne sont que des hommes célibataires, on a cherché à élargir
le champ des collaborateurs de l’Evêque en nommant des laïcs, femmes ou hommes
mariés, à des instances de conseil comme le Conseil épiscopal, ou à
d’autres types de conseils, qui dès lors prennent une importance plus grande
aux yeux des gens que le Conseil presbytéral lui-même, qui est pourtant
« comme le sénat de l’évêque ». En effet, le Conseil presbytéral
n’apparaît pas comme représentatif de la portion du Peuple de Dieu qu’est un
diocèse. Aussi a-t-on imaginé des conseils représentatifs.
2. La notion de conseil dans l’Eglise
Avant le Concile Vatican II, l’Exécutif diocésain
était assez puissant et le recours des curés contre une décision épiscopale
qu’ils estimaient arbitraire plus fréquent qu’aujourd’hui dans certains
diocèses.
Avec le Concile de Vatican II on a vu des évêques
débattre entre eux puis voter. Ce type de fonctionnement dit
« démocratique » est monté en puissance.
En France, les évêques ont écrit au début des années
70 un texte intitulé « Tous responsables ». Le fonctionnement des
paroisses, avec un Conseil pastoral, s’inscrit dans cette ligne.
Le Conseil épiscopal est apparu souvent comme le lieu
de délibération (débat suivi de décision).
Or, conseiller ce n’est pas décider.
3. Administration diocésaine
Chancelier
Il est obligatoire.
Il rédige les actes de la Curie, les expédie, les
archive.
Il contre-signe les actes à
portée juridique pour asseoir leur validité.
Il est assisté de « notaires ».
Il reste en place durant la vacance du siège épiscopal
pour assurer la continuité des actes administratifs.
Econome diocésain
Il est obligatoire.
Il administre les biens diocésains par délégation de
l’Evêque diocésain.
Il reste en place durant la vacance du siège épiscopal
pour assurer la continuité des actes économiques.
Il exécute le budget diocésain établi par le Conseil
des affaires économiques.
Il reçoit ses instructions de ce même Conseil.
Services pastoraux
Ce sont les services pour l’enseignement, la liturgie,
le catéchuménat, la mission universelle, les artistes, l’information, etc.
Certains de ces services sont dirigés par des
Délégués, épiscopaux ou diocésains, qui sont prêtres, diacres ou laïcs.
Leur organisation montre l’action pastorale d’un
diocèse et relève du droit diocésain, en relation avec l’organisation de la
Conférence des Evêques de France et des Dicastères romains.
Délégué diocésain au diaconat
Il est facultatif.
Il assure le lien entre l’Evêque et les diacres.
Délégué diocésain à la vie consacrée
Il est facultatif.
Il assure le lien entre l’Evêque et les congrégations religieuses.
Délégué diocésain à l’apostolat des laïcs
Il est facultatif.
Il assure le lien entre l’Evêque et les mouvements, les associations de
fidèles, etc., entre autres par la proposition d’aumôniers.
Commissions
Il peut exister diverses commissions : pour les
nominations, les animateurs laïcs en pastorale, etc.
4. Organisation territoriale
Paroisse
C’est une « communauté de fidèles… stable…
confiée au curé comme à son pasteur propre ».
-
Ce n’est pas une définition territoriale.
-
Elle lie la paroisse à son curé.
-
Elle ressemble à la définition d’un diocèse.
La paroisse a une personnalité juridique canonique.
Depuis le Concile de Vatican II, la paroisse n’est
plus considérée comme « Eglise particulière » : c’est
désormais le diocèse.
Curé
Il a charge d’âmes (« cura animarum »).
Il est assisté ou non de vicaires.
Il est aidé par :
·
un Conseil
paroissial des affaires économiques, qui est obligatoire,
·
un Conseil
paroissial de pastorale, qui est facultatif,
·
une Equipe
d’animation paroissiale, qui est facultative.
Il peut être nommé in solidum :
Le curé jusqu’en 1983 était inamovible. Depuis, il
reçoit une mission temporaire dont la durée est définie par le Droit diocésain.
Doyenné, archiprêtré, secteur…
Ces termes définissent des regroupements de paroisses.
Ces regroupements sont animés par un prêtre qui a une
fonction de « Vicaire forain » : il assure les relations
entre paroisses, organise les remplacements momentanés des prêtres, etc.).
Archidiaconé ou zone
Ces termes définissent des regroupements de doyennés,
secteurs…
Ils sont placés sous la responsabilité d’un Vicaire
exécutif.
Province ecclésiastique
C’est un regroupement de diocèses, qui, depuis juin
2003, suit en France le découpage des Régions administratives (en remplacement
des anciennes Régions ecclésiastiques).
La Province est placée sous l’autorité d’un Archevêque
métropolitain, qui est l’archevêque du siège de la Province depuis juin
2003 (il n’y a donc plus d’élection du responsable de Province).
Conférences des Evêques
Ce sont des organisations de concertation des Evêques
au niveau d’une nation, d’un continent, promues par le Concile de Vatican II.
Problème
L’Eglise catholique n’a pas partout un caractère
national.
Le caractère continental n’est pas évident partout.
La Conférence des Evêques du Pacifique, par exemple,
regroupe des Evêques de France et d’autres nations.
Il existe des conférences selon les langues parlées.
Il peut exister aussi des synodes interdiocésains.
Cardinal
C’est une fonction personnelle, attachée à la personne
du Pape, Evêque de Rome.
Un Cardinal a trois principales fonctions : il
est l’un des conseillers du Pape, l’un des administrateurs de l’Eglise
catholique lors de la vacance du siège de Rome, l’un des électeurs du Pape.
Problème
Les cardinaux conseillent le Pape ou l’élisent en tant
qu’Evêque du diocèse de Rome. C’est pourquoi ils sont cardinaux
« romains », titulaires de paroisses du diocèse de Rome, sans en être
curé. C’est une fiction.
L’Evêque de Rome est le seul Evêque diocésain élu par
ses pairs.
Comme il a une charge universelle, son élection
concerne toutes les Eglises particulières. C’est pourquoi le Collège des
cardinaux tend à devenir représentatif de la diversité de l’Eglise.
La représentativité du Collège des cardinaux est
l’illustration de la tension entre le caractère universel de l’Eglise
catholique et son caractère local, particulier, avec ce principe
ecclésiologique majeur : Toute l’Eglise est dans l’Eglise locale. L’Eglise
locale n’est pas toute l’Eglise.
5. Autres modes de fonctionnements ecclésiaux
Evêque auxiliaire
Il est facultatif.
Il est adjoint de l’Evêque diocésain.
Problème
Il y a davantage d’évêques qu’il n’y a de diocèses. En
vertu du principe ecclésiologique « pas d’Eglise sans évêque, pas d’évêque
sans Eglise », les évêques sans résidence (sans diocèse) sont titulaires
d’un diocèse sans communauté catholique (Afrique du Nord, Asie mineure…).
Evêque coadjuteur
Il est facultatif.
Il est adjoint de l’Evêque diocésain et jouit du droit
de succession de l’Evêque diocésain.
Synode diocésain
Il est facultatif et temporaire.
Il est convoqué par l’Evêque diocésain.
C’est comme un Conseil de pastorale exceptionnel avec
une forte mobilisation de tous les diocésains.
Chapitre des Chanoines
Ce sont les prêtres
liés à l’office quotidien à la Cathédrale.
Le Chapitre a perdu la plupart de ses prérogatives
depuis 1983 et l’instauration de Conseil presbytéral.
Congrégation religieuse
Dans les congrégations religieuses, il y a
séparation des pouvoirs :
-
généralement le chapitre fait la loi (« on a voix au chapitre »),
-
le supérieur et ses assistants exécutent les décisions prises au chapitre,
-
le jugement sur la bonne application des décisions s’exerce au prochain
chapitre (on renouvelle ou non leur mandat), sauf cas grave.
Association de fidèles
C’est une innovation du Droit Canon de 1983 qui
rappelle le devoir de tout baptisé de témoigner de sa foi de manière
individuelle ou collective.
Une fois reconnues ou admises par l’Evêque diocésain,
ces associations ont une autonomie de fonctionnement, avec des élections,
parfois un statut d’exception pour leurs fondateurs, etc.
S’il n’y a rien contre la foi et les moeurs, les communautés implantées dans un diocèse sont
assez libres en interne.
Si elles ont une activité pastorale, elles relèvent
pour cela de l’autorité diocésaine.
L’Evêque a vis-à-vis d’elles un pouvoir d’incitation,
de conseil, mais pas directement de décision.
Mouvement apostolique
Une fois reconnus, avec ou sans mandat épiscopal comme
pour l’Action Catholique, les Mouvements ont leur propre mode de
fonctionnement, avec des aumôniers, prêtres ou pas, des conseillers spirituels
ou pas, qu’ils choisissent ou qu’ils demandent à l’Evêque.
Si l’Evêque a des priorités pastorales, ils
privilégient tel type de groupe.
S’il veut le pluralisme, il cherche à faire cohabiter
des options parfois opposées.
S’il a une stratégie pastorale précise, il autorise
certains et en écartent d’autres de son diocèse.
6. Loi ecclésiale et lois locales
6.1. Situation française
L’Eglise catholique obéit à deux types de
législation :
-
la loi ecclésiale universelle (Droit Canon 1983),
-
la loi locale, différente selon chaque pays.
La situation française fait figure d’exception dans la
mesure où depuis la loi de 1905 il y a séparation de l’Etat et des religions.
Cette loi prévoyait l’instauration d’associations cultuelles pour gérer
l’organisation des Eglises. L’Eglise Réformée adopta le principe d’une
association cultuelle par paroisse. Les Evêques catholiques refusèrent
l’application de cette loi. Une autre loi prévoyait l’organisation des congrégations
religieuses.
Association diocésaine
Par un accord entre le Saint-Siège et l’Etat français,
en 1923, il fut convenu d’une association cultuelle par diocèse, présidée par
l’Evêque diocésain. Les premières associations diocésaines furent instaurées en
1924.
Problème
Il y
a une seule association cultuelle
par diocèse et non pas une par paroisse, alors même que la paroisse a une
personnalité juridique selon la loi ecclésiale (Droit Canon). Ce sont donc des
associations locales (civiles) qui sont propriétaires des biens paroissiaux la
plupart du temps, ou, au mieux, des établissements locaux de l’association
diocésaine.
En effet, on n’a pas inclus tous les biens
ecclésiastiques (on entend par « bien ecclésiastique » tout bien qui
concourt à la vie de l’Eglise) dans cette structure diocésaine pour deux
raisons :
- la crainte de voir
tous les biens d’Eglise à nouveau spoliés par l’Etat,
- la crainte des
paroisses de voir l’Evêque diocésain et son administration utiliser les biens
paroissiaux sans concertation.
Associations paroissiales
Ce sont des associations loi 1901 souvent, et non loi 1905 ou 1924,
instaurées après 1905, qui continuent de gérer les biens ecclésiastiques locaux
selon les règles des lois associatives : élection des administrateurs, etc.
Problème
Ces associations, il y a parfois aussi des sociétés immobilières, ne gèrent
pas forcément selon les orientations épiscopales diocésaines. Ces biens
ecclésiastiques échappent donc, de fait, à la juridiction canonique de
l’Evêque.
Il y a là des risques de conflits locaux :
- le curé, pasteur
de la paroisse, est parfois convoqué par le président de l’association
paroissiale, qui se considère comme le président laïc de la paroisse,
- le curé avec son
équipe pastorale et les membres de l’association peuvent diverger sur la mise
en œuvre des moyens de la pastorale,
- le curé peut
parfois passer outre les règles
associatives pour administrer un bien de l’association paroissiale.
Conseil de fabrique
C’est une instance de gestion de la paroisse en France
sous le régime concordataire, qui concerne les départements de l’Alsace et de
la Lorraine.
Emplois d’Eglise
Prêtres
Les prêtres catholiques en France n’ont pas de statut
civil. C’est une situation unique dans l’Union Européenne.
L’INSEE identifie le prêtre catholique comme entreprise
individuelle, avec un numéro de SIRENE et le code APE des organisations
religieuses, à revenu non commercial non professionnel. Il identifie la
paroisse comme établissement sans but lucratif, à finalité philanthropique,
de forme mutuelle.
Laïcs
Les laïcs sont des salariés, dont la gestion obéit au
Code du travail français.
L’employeur peut être un organisme diocésain de forme
associative (école, service…) ou l’association diocésaine.
Le salarié bénéficie de la protection sociale
ordinaire et des recours individuels et collectifs prévus par le droit social.
Sa représentation auprès de l’employeur est organisée
selon les lois du 4 août 1982.
Problème
La nomination de laïcs dépend de deux types
d’autorité : le pasteur pour la mission, l’employeur pour le contrat de
travail.
La mission est généralement confiée pour un temps
déterminé (3 ou 6 ans), alors que le contrat de travail est à durée
indéterminé.
Souvent il y a mauvaise coordination entre ces deux
domaines et un double risque : paralyser l’action pastorale ou ignorer le
droit social.
6.2. Procédures de gestion pastorale
Un certain nombre de diocèses ont des guides
pratiques, des vademecum, des livrets
synodaux, etc., qui constituent le Droit ecclésial diocésain et fixe quelques
règles de conduite, des procédures en divers domaines.
Gestion du personnel
Des salariés ont pour employeur l’association
diocésaine, ou une école, ou une paroisse, etc. Il existe une grande variété de
statuts.
On ne sait pas toujours précisément le nombre de personnes salariées au
service d’un diocèse, ni exactement le coût salarial global. La complexité
institutionnelle (des modes de fonctionnement différents) rend la consolidation
des budgets difficile.
D’où, un soupçon, ressenti parfois à l’extérieur, sur la rigueur de la
gestion diocésaine, même si chaque structure est en soi bien gérée.
Gestion financière
Seule l’association diocésaine est habilitée par la
loi de 1924 à revoir des dons et legs pour le culte. Or d’autres instances,
associatives (loi 1901) ou sans existence légale (paroisse) reçoivent des dons
(offrandes, quêtes…).
D’où, l’impression, perçue à l’extérieur, de ne pas savoir exactement les
sommes en jeu, d’avoir un budget qui ne correspond pas aux réalités.
Gestion immobilière
Il y a des congrégations, des écoles, des
associations, des paroisses, etc. Les liens entre ces structures et avec
l’autorité diocésaine ne sont pas toujours des liens de coopération, car elles
ont des modes de fonctionnement disparates.
D’où le sentiment, perçu l’extérieur, d’un certain désordre, en contraste
avec les idées reçues sur l’uniformité et l’organisation pyramidale du
catholicisme.
Gestion des informations
Un diocèse est un univers éclaté : les prêtres
sont dans des lieux de travail très dispersés. Quelques unités sont
concentrées : maison diocésaine, évêché…, où les informations sont censées
circuler plus vite.
Les informations en fait passent plutôt par des
réseaux constitués : groupes d’amis, repas, anciens de telle institution,
personnes de la même mouvance, etc.
Selon la personnalité du responsable de l’information
(prêtre diocésain ou non, prêtre ou laïc, un peu âgé ou très
« branché ») l’information circule beaucoup ou est stockée.
D’où, toujours, l’impression, perçue de l’extérieur, d’un
milieu parcouru de rumeurs.
Gestion de la décision
Le circuit de la décision, dans un diocèse, est
souvent lent et complexe, car l’Evêque s’entoure généralement de nombreux
conseils, et a souvent une gestion prudentielle de l’activité pastorale.
Il y a parfois de la difficulté à percevoir où l’on en
est dans ce processus de décision au sein d’un diocèse :
-
il n’existe pas de tracé du parcours à suivre, il y a peu de procédures
écrites,
-
l’enregistrement de la décision épiscopale
n’est pas toujours très strict,
-
il existe peu de contrôle de l’application des décisions.
On n’a guère de tableaux de bord de suivi des actions. Les tableaux de bord
financiers, quand ils existent, ne correspondent pas toujours à l’action
pastorale réelle, et ne peuvent donc servir d’outil de gestion adapté à
l’action pastorale.
D’où, l’impression, ressentie à
l’extérieur mais aussi vécue en interne aussi,
d’un grand flou et d’une certaine improvisation.
Des variables locales
L’organigramme prévu par la loi ecclésiale est
généralement respecté, mais son fonctionnement dépend de plusieurs
facteurs :
-
la géographie des diocèses (s’il est grand, petit, diversifié, unifié),
-
le nombre de prêtres (selon qu’il est élevé, réduit),
-
la composition du presbyterium (selon la part des religieux, des diocésains et
des prêtres attachés à des associations de fidèles, selon la pyramide des
âges…)
-
le profil des personnes (selon l’âge, la formation, etc.).
Il y a parfois des fonctions assurées par la même
personne. Il peut arriver que certains cumuls :
-
soient difficiles à vivre, comme, par exemple, être conseiller l’Evêque dans sa
décision et devoir appliquer les décisions de l’Evêque : en cas d’absence
d’accord il y a soit crise intérieure à l’individu, soit paralysie de la
décision épiscopale, soit emprise des personnes de l’exécutif sur la personne
du décideur qu’est l’Evêque, etc.,
-
deviennent incompatibles, comme, par exemple, un membre du Conseil des affaires
économiques, qui formulerait donc des instructions à l’Econome, et qui serait
en même temps le proche collaborateur de l’Econome, ou un prêtre consulteur,
qui serait aussi conseiller de l’Evêque ou son Vicaire exécutif et pourrait
être amené à refuser une proposition de l’Evêque,
-
modifient la nature d’une fonction, comme, par exemple, un Econome diocésain
qui serait Vicaire épiscopal, et amené donc à combiner directives de son Evêque
et instructions du Conseil des affaires économiques.
Conclusions
Je devais essayer de décrire de deux manières la vie
d’une Eglise diocésaine :
-
d’une part en rappelant ce qui est prescrit (le droit écrit) : qui doit
faire quoi.
-
d’autre part en décrivant ce qui est pratiqué (les usages) : ce qui se fait .
Nous avons déjà noté quelques distorsions entre le
Droit universel et la réalité ecclésiale concrète. Il existe aussi des
problèmes de gestion spécifiques aux diocèses de France, dus à la situation
juridique de l’Eglise catholique, d’une part, à la situation actuelle des
communautés, d’autre part.
On le constate : il y a donc un écart entre le
Prescrit, le droit écrit qui dit qui doit faire quoi, et le Vécu, les usages.
Cet écart ne dénote pas forcément un dysfonctionnement
négatif.
Il est parfois le signe de la vitalité des communautés
qui, pour vivre leur foi au Christ, cherchent des solutions en toutes
circonstances et ne restent pas inertes.
Cela peut amener un jour l’autorité à faire des
rappels à l’ordre, mais aussi à envisager des réformes. C’est l’objet des
synodes, de vademecum dans plusieurs diocèses.
C’est l’illustration des principes
ecclésiologiques déjà mentionnés : l’Eglise catholique est universelle et
particulière.
Son organisation comme son fonctionnement essaient de
mettre en œuvre ces deux caractéristiques avec plus ou moins de bonheur selon
les époques, les lieux et les mentalités.