musée du diocèse de lyon

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lettre des Prêtres Ouvriers

2 février 1954

 

 

 

 

Au moment où des millions de travailleurs, en France comme à l'étranger, sont en marche vers leur unité pour défendre leur pain, leurs libertés et la paix, alors que patronat et gouvernement accentuent exploitation et répression pour enrayer à tout prix les progrès de la classe ouvrière et sauvegarder leurs privilèges, les autorités religieuses imposent aux prêtres-ouvriers des conditions telles qu'elles constituent un abandon de leur vie de travailleurs et un reniement de la lutte qu'ils mènent solidairement avec tous leurs camarades.

 

Cette décision s'appuie sur des motifs religieux. Nous ne pensons pourtant pas, que notre vie d'ouvriers nous ait jamais empêchés de rester fidèles à notre foi et à notre sacerdoce. Nous ne voyons pas comment, au nom de l'Evangile, on peut interdire à des prêtres de partager la condition de millions d'hommes opprimés et d'être solidaires de leurs luttes.

 

Mais il ne faut pas oublier que l'existence et l'activité des prêtres-ouvriers ont jeté le désarroi dans des milieux habitués à mettre la religion au service de leurs intérêts et de leurs préjugés de classe. Les pressions exercées par ces milieux et les dénonciations de tous ordres et de toutes provenances sont loin d'être étrangères aux mesures actuelles.

 

Si ces mesures étaient maintenues, elles contribueraient à troubler la conscience des chrétiens engagés dans la lutte de la classe ouvrière, au moment où tant d'efforts sont faits pour les soustraire au combat commun et jeter le discrédit sur leur foi. Les prêtres-ouvriers revendiquent pour eux et pour tous les chrétiens le droit de se solidariser avec les travailleurs dans leur juste combat.

 

Les militants ouvriers et la classe ouvrière font confiance aux prêtres-ouvriers, et ils ont respecté leur sacerdoce. Ce respect et cette confiance qu'ils continuent de manifester à notre égard nous interdisent d'accepter tout compromis qui consisterait à prétendre rester de la classe ouvrière sans travailler normalement et sans accepter les engagements et les responsabilités des travailleurs. La classe ouvrière n'a pas besoin de gens qui « se penchent sur sa misère », mais d'hommes qui partagent ses luttes et ses espoirs.

 

En conséquence, nous affirmons que nos décisions seront prises dans un respect total de la condition ouvrière et de la lutte des travailleurs pour leur libération.

 

 

(dont)

Equipe de Lyon, Saint Etienne, Givors :

Maurice COMBE ; René DESGRAND ; Joseph GOUTTEBARGE ; Albert GUICHARD ; Paul GUILBERT ; Georges GULON ; Louis MAGAT ; Robert PACALET ; Charles PORTAL ; Jean TARBY.