les béguins
XVIIIè
s.
Depuis
le XVIIIème siècle, principalement dans le Forez et le Jarez où
était implantée la mouvance janséniste, ont existé des Béguins.
Après
la publication de la bulle Unigenitus
(1713) condamnant le jansénisme, certains de ses adeptes se rallièrent à
l’orthodoxie catholique tout en gardant leurs propres exigences éthiques, et
dans le diocèse d’autres sont à l’origine de groupes sectateurs comme la Petite Eglise (sur Lyon) ou les Bleus (à Marcilly-le-Châtel), les Bonjouristes (de l’abbé Bonjour), les Fareinistes (à Farein)…, et les Béguins dans le Forez en particulier à
Saint-Jean-Bonnefonds.
Là
en 1786 le curé Drevet commence à enseigner le jansénisme enflammé des
« convulsionnaires ». Il annonce la venue d’un nouvel Elie pour
« rétablir toutes choses »
et entraîne plusieurs familles paysannes dans sa vision. A la Révolution, bien
qu’ayant prêté le serment civique, il doit quitter la commune pour atteinte à
l’ordre public. Les familles restées fidèles à son enseignement se voient
refuser les sacrements par les prêtres nommés à sa place et vivent hors de la
communauté paroissiale.
Le
nom de Béguin leur est attribué soit
parce qu’ils vivent regroupés comme en « béguinage » soit parce
qu’ils restent entêtés (« embéguinés »).
En
1846 arrive dans le village Jean-Baptiste Digonnet. Ce père de famille, mis en
prison à Saint-Etienne pour délire religieux, avait connu là un « béguin » du village. Il reprend ses
prêches et est reconnu par les Béguins
comme le nouvel Elie que l’on attend ; certains le considèrent même comme
« leur petit bon Dieu ». Il
est à nouveau arrêté et doit quitter le pays.
Un
groupe reste fidèle à cette vision chrétienne jusqu’à ce jour.
Le jansénisme en Forez a plusieurs histoires entremêlées qui parfois se
télescopent, se contredisent même en apparence. L'irrationnel de la religion côtoie
l'augustinisme le plus raffiné. Cette évolution demeure dominée par le débat
théologique et port-royaliste, ou par son souvenir, sur la grâce et la
prédestination. Les cantiques funéraires béguins rappellent l'austérité de la
vie sur terre mais aussi la toute puissance de Dieu et le bonheur éternel des
élus. Défait sur le terrain doctrinal, le jansénisme va s'affirmer sur le plan
moral par l'ascèse de vie de ses apôtres, de ses sectateurs et par un style de
spiritualité qui voulait restaurer les valeurs de l'Eglise primitive. Dans
l'histoire des religions, il a illustré un temps fort pour la revendication du
droit de libre examen et de la liberté de conscience et il a inauguré la quête
du salut individuel après le règne de la mystique d'appartenance au corps de
l'Eglise universelle.
(AVENTURIER
Gérard, 1999)
DOCUMENTS
- REGNAULT Félix,
1890, Des
Béguins, Bulletins de la Société d'anthropologie
de Paris, 1/1, pp. 662-680
-
THEOLIER (éd.), 1886, Le Petit Bon Dieu et les Béguins de la Loire. 1846-1848
-
GERMAIN DE MONTAUZAN Camille, 1936, Les Béguins et le « petit bon
dieu » de saint-Jean-Bonnefonds (Loire)
- GADILLE Jacques, 1975, Le Jansénisme populaire. Ses
prolongements au XIXè siècle : le cas du Forez, in Aspects de la vie religieuse en Forez, Volume 7, Centre
d’Etudes Foréziennes, pp.157sq
- LAURENT Benoît,
1980, Les Béguins. Des Foréziens en quête
de Dieu
- CHANTIN Jean-Pierre, 1998, Les Amis de l’œuvre de la Vérité : Jansénisme, miracles et fin du monde au XIXème siècle (texte intégral), recension par Bernard Chédozeau, Archives de Sciences Sociales des Religions 2000/112
- AVENTURIER Gérard, 1999, Histoire du Jansénisme en Forez (conférence)
- CHANTIN Jean-Pierre, 2001, notice sur Digonnet Jean-Baptiste, in Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, Volume 4, Les Marges du Christianisme, « sectes », dissidences, ésotérisme
- VIDAL Daniel,
2001, Expériences de fin du monde :
un jansénisme en convulsion, un calvinisme en prophétie, Archives de
sciences sociales des religions, 114, pp.21-37
- CHAMBON Pascal, 2005, La
Loire et l'aigle: les foréziens face à l'état napoléonien
a.chapel