musée du diocèse de lyon

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Marcellin Champagnat

1789-1840

 

 

On n'a jamais fini d'explorer la richesse spirituelle de la génération qui atteignit l'âge adulte entre 1800 et 1825.

 

Marcellin Champagnat, qui en fit partie, eût pu avoir une carrière ecclésiastique très ordinaire. Né à Marlhes, au dessus de Saint-Sauveur-en-Rue, dans une famille paysanne ayant du bien, il reçut une éducation chrétienne solide. Distingué par son curé, il fut admis au petit séminaire de Verrières, parvint, au prix de laborieux efforts, à en suivre les cours, et accéda au séminaire Saint-­Irénée où il reçut le sacerdoce, le 22 juillet 1816. Un vicariat à la Valla, près de Saint-Chamond, commencé le 15 août suivant, semblait ouvrir un curriculum vitae classique.

 

En fait, avec J.C. Colin et d'autres séminaristes, il s'était joint au groupe réuni sous le nom de « Société de Marie par leur condisciple J.C. Courveille. Avec eux, le lendemain de leur ordination, il était monté à Fourvière consacrer entre les mains de la Vierge leur vœu de fonder une « congrégation de Maristes » destinée à une vie apostolique. C'est lui qui apporta au groupe sa première réalisation. Ne pouvant accepter l'ignorance religieuse et profane des campagnes, abandonnées à elles-mêmes depuis la Révolution, il ressentait l'immense besoin d'une structure de formation pour des maîtres chrétiens. Il n'était pas le seul, certes, et beaucoup commençaient d'y penser, à la suite des Frères de la Doctrine chrétienne, déjà reconstitués, mais il y avait de la place pour tous, et Champagnat fut l'un des premiers. Tout de suite, à la Valla, il retint deux jeunes gens et, dès le 2 janvier 1817, les installa dans une maison où il commença de les former : ce furent les premiers Petits Frères de Marie, branche spécialisée de la Société de Marie que, de son côté, J.C. Colin mettait progressivement sur pied à Belley. D'autres s'agrégèrent et, très vite, les premiers frères furent appelés par les curés et les maires de quelques pays d'alentour, et même un peu loin : Neuville-sur-Saône en 1826, la Côte-Saint­-André en 1831.

 


 

Dès lors la vie de Champagnat, dégagé de son vicariat en 1824, suivit plusieurs axes parallèles: guider la croissance de la communauté des Frères et diriger leur formation, répondre aux demandes d'ouverture d'écoles nouvelles, assurer la transformation de la communauté spontanée en une congrégation religieuse régulière, préciser la place des frères dans la Société de Marie qui, peu à peu, prenait corps, enfin tenter d'obtenir des pouvoirs publics la reconnaissance légale. Ce fut une histoire complexe, laborieuse, traversée, comme il se doit, d'oppositions multiples et redoutables, et de soucis harassants et divers. Des événements majeurs la jalonnent : reconnaissance de fait par Monseigneur de Pins en 1824 ; construction d'un noviciat à l'Hermitage en 1825 ; approbation pontificale, en 1836, de la Société de Marie dans laquelle Champagnat, lui-même l'un des premiers Pères maristes, tenait à intégrer les frères ; en 1839, élection d'un frère comme successeur du père Champagnat au supériorat, ouvrant la voie à l'autonomie des Petits Frères ; enfin, la mort du Père fondateur, le 6 juin 1840.

 

Dans sa vie spirituelle, le père Champagnat ne rechercha pas l'originalité. Comme tous les fondateurs, il fut non pas « en avance sur son temps », selon l'expression courante qui n'a pas grand sens, mais il fut complètement de son temps à lui, dont il perçut avec acuité les besoins, et c'est pourquoi il put créer pour l'avenir. Dès le séminaire, il mit en œuvre les vertus les plus classiques : dévotion à Jésus et Marie, humilité, mortification, pauvreté, obéissance, travail et, du même élan, action apostolique par la prédication, l'enseignement, la diffusion des dévotions et de la pratique sacramentelle. Simplement, ces vertus il les pratiqua jusqu'au bout. Il était en outre pourvu d'un grand bon sens et d'un sens inné de la pédagogie et de l'éducation.

 

Avec les siens, il représente admirablement ce clergé rustique, inébranlable et dur à la peine que les montagnes entourant le bassin de la Loire ont pendant si longtemps donné au diocèse de Lyon.

 

Marcellin Champagnat a été béatifié par Pie XII, le 20 mai 1956 ; il est canonisé le 18 avril 1999.

 

 

Henri HOURS

Eglise à Lyon, 1999, n°7

 

 

Documents

André Lanfrey, Marcellin Champagnat et les Frères Maristes. Paris, éd. Don Bosco, 1999