charte de fondation
de la Collégiale de Montbrison
1223
Guy, comte de Forez,
aux lecteurs des présentes, notification d’acte et salut.
Parce que fragile
est la mémoire humaine et que ce qui est réalisé en ce temps se dilue dans le
temps, aussi ordonnons-nous, pour que la mémoire véritable de l’acte se
perpétue et que l’oubli ne puisse poindre au fil du temps, de coucher par écrit
ce que nous avons fait par piété, croyons-nous.
Nous donc, n’ayant
sous les yeux que Celui qui rend à chacun selon ses œuvres, voulant sauvegarder
la mémoire de nos prédécesseurs, et aussi de nous-même et de nos successeurs,
pour l’honneur de Dieu et de la bienheureuse Vierge Marie, après avoir mené une
minutieuse consultation et pris l’avis des hommes avisés et magnanimes que sont
les vénérables pères en Christ les archevêques de Vienne et d’Embrun, et
spécialement obtenu l’accord et l’autorisation du vénérable père de notre
diocèse, l’archevêque de l’Eglise de Lyon, notre oncle paternel, nous sommes
décidés à construire une église à Montbrison, sur la paroisse de Moingt, sans
porter préjudice à autrui, et nous instituons dans cette église 13 chanoines
consacrés aux offices divins à jamais en l’honneur de Dieu et de la
bienheureuse Marie toujours vierge.
Parmi eux il y aura
un doyen, un chantre, un sacriste, un maître de chœur ; et aussi 3 autres,
en plus du doyen, du sacriste et du maître de chœur, à qui les charges
sacerdotales seront toujours confiées ; ils doivent être prêtres, pour
chacun à leur tour en cette église célébrer chaque jour la messe, c’est ce
qu’on appelle les prébendes sacerdotales ; et, lorsque l’un d’entre eux
décédera, il sera remplacé par quelqu’un de même qualité sacerdotale, qui avant
un an accédera au sacerdoce.
Puisqu’en vérité
nul n’est tenu de servir Dieu à ses propres frais et qu’il convient de
récompenser la vertu de ceux qui le méritent, par le texte suivant nous donnons
et concédons à Dieu, à la Bienheureuse Marie et aux chanoines institués là, en
toute liberté, libéralité et dévotion, le château de Moingt et son mandement,
avec toutes ses dépendances et appartenances, avec les terres cultes et
incultes, et tout ce que nous avions au nom de notre seigneurie ou du droit
comme usages ou coutumes en ces biens, ne retenant absolument rien pour nous,
mais apportant tout à ces chanoines ; en outre nous donnons la dîme de Verrières,
d’Ecotay et le quart de la dîme que nous avions là en partage, et la grange de
Petra avec ses dépendances.
A cette Collégiale,
toutes les années, pour l’anniversaire du décès de notre père, une fois par an,
jusqu’à 15 sols sera versé.
Nous donnons donc,
par ce contrat, ce privilège, ce château avec ses dépendances, cette dîme, et
la grange, que ni nous ni nos successeurs ne pourrons en aucune manière, en
aucune circonstance, reprendre à cette Collégiale ; et il ne sera permis
aux chanoines ni échange ni aliénation avec quiconque.
De plus nous
donnons aux chanoines 60 livres fortes à percevoir dans la ville de Montbrison,
sans leur faire difficulté, chaque année : à savoir 15 livres à la vigile
de la Nativité du Seigneur, 15 autres à la vigile de Pâque, 15 autres à la
vigile du bienheureux Jean Baptiste et les 15 autres à la vigile du bienheureux
Michel.
Et nous, pour
bannir toute difficulté, nous chargeons notre percepteur des redevances de les retenir
sur l’acensement de la ville, de sorte que, si aux jours fixés ces sommes
n’étaient pas versées de cette manière, le percepteur lui-même serait tenu de
verser aux chanoines une amende de 5 sols forts par jour de retard.
A savoir en outre
que nous et nos successeurs serons en mesure de remettre aux chanoines de cette
Collégiale ces 60 livres, aux lieux appropriés et sûrs, sans aucun préjudice,
selon la volonté et le consentement du chapitre.
De plus tout
particulièrement attentifs à cette nouvelle implantation et son développement,
nous nous plaisons à accorder par privilège que soit permis à ces chanoines par
nous et par nos successeurs, pour le présent et également pour le futur,
d’acquérir un bien dans notre comté, sur notre propre fief ou d’autres, de
sorte que le bien soit à eux comme il était à nous, la taille exceptée, avec
les transferts de charges, et qu’ainsi, si une coutume ou un usage étaient
auparavant liés à ce bien, ils aillent totalement à jamais de nous et de nos
successeurs à cette implantation.
A noter en outre
que nous ou nos successeurs pouvons et devons transférer aux personnes
appropriées, tant les dignités que les autres prébendes, comme on les appelle,
dans les 6 mois où leur parviendra notre notification, où qu’elles soient.
Et les chanoines
institués feront serment de fidélité à nous et nos successeurs et dans la forme
du serment qu’ils doivent faire à l’Eglise.
Chacun d’eux est
tenu d’exprimer qu’il ne prendra part ni à une assemblée, ni à un accord, ni à
un soutien de fait ou oral, qui ferait que nous ou nos successeurs perdîmes, en
quelque circonstance et de quelque manière, un droit de patronage ou de
seigneurie que nous gardâmes dans cette Collégiale pour nous et nos
successeurs.
A noter de plus que
les chanoines de cette Collégiale, après avoir promis fidélité à nous et nos
successeurs, doivent promettre obéissance au doyen pour les choses
spirituelles.
En outre, aussi
longtemps que nous vivrons, sur l’avis d’hommes bons et prudents, nous nous
gardons de corriger l’ordonnance concernant cette Collégiale ; et après notre
décès nos successeurs ne pourront ou devront s’en mêler en rien, excepté pour
la collation de dignités et prébendes, comme il est dit ci-dessus.
A savoir aussi que,
si les ressources de la Collégiale s’accroissent beaucoup, avec l’aide de Dieu,
au jugement de nous ou nos successeurs et celui du chapitre de cette
Collégiale, le nombre des chanoines et prébendes pourra être augmenté.
Tout ce qui est dit
ci-dessus en la présence de notre vénérable père en Christ seigneur Renaud,
archevêque de notre diocèse de Lyon, et devant de nombreuses reliques saintes,
la main sur les très saints Evangiles, pour nous et nos successeurs, nous
jurons l’accomplir et l’observer.
Et pour pérenniser
la mémoire et la solidité de cet acte, nous ordonnons que la présente charte
soit écrite munie de notre sceau en témoignage de vérité.
Fait en l’année
1223 du Seigneur, le 3 des nones de Juillet, devant l’Eglise de Saint-Julien de
Moingt.
NOTES
3 des nones de Juillet : les nones
de juillet étant le 7, le troisième jour précédent est le 5
livres fortes, sols forts :
c’est-à-dire pièces en matériau pur
ecclesia : traduit ici
Collégiale
dignités : désignent ici
les charges de doyen,
chantre, sacriste, maître de chœur
traduction
incertaine aux paragraphes 5 et 13
TEXTE LATIN
- DE LA MURE Jean Marie, Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez. Preuves fondamentales, volume 3, éd. 1868, pp.44sq, document n°52
DOCUMENTS
- DE LA MURE Jean Marie, Histoire des
ducs de Bourbon et des comtes de Forez,
éd. 1809, volume 1, pp.214sq
- Site de
la ville de Montbrison, La
Collégiale Notre-Dame