musée du diocèse de lyon

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André Coindre

(1789-1826)

 

 

Le puissant mouvement de créations et de fondations de toutes sortes qui souleva le catholicisme français, à Lyon notamment, à partir de 1815, ce mouvement resterait un peu abstrait à nos yeux, si nous ne pouvions connaître ceux qui l'ont lancé et guidé. André Coindre est l'un d'eux.

 

Né à Lyon, le 26 février 1789, dans le quartier de Saint Nizier, il y vécut une enfance pieuse marquée par la Terreur et la persécution religieuse. Elève au petit séminaire de l'Argentière dès son ouverture par le cardinal Fesch, il y fit de bonnes études avant de passer au séminaire Saint-Irénée. Ordonné le 14 juin 1812, il acheva sa formation par « l'année d'éloquence », où les meilleurs sujets suivaient un supplément d'études théologiques, scripturaires, littéraires, dans une atmosphère de semi-retraite spirituelle.

 

Vicaire à Bourg en 1813, il fut tout de suite remarqué pour ses talents oratoires, et appelé en 1815, comme vicaire également, à Saint-Bruno de Lyon. L'année suivante, il s'agrégea tout naturellement au petit groupe de prêtres qui fondaient alors, selon le vœu du cardinal Fesch, dans le bâtiment des Chartreux, l'association des Missionnaires de la Croix, missionnaires diocésains à l'origine des prêtres de Saint-Irénée et de l'institution des Chartreux.

 

Jusqu'à sa mort, sa vie fut désormais mangée. Missions, prédications, retraites, stations d'avent et de carême : en dix ans, on en compte cent-dix. Quand on se rappelle qu'une mission durait plusieurs semaines, on mesure la générosité du don. Avec Mioland, Lupe, Dufêtre, Furnier et d'autres, Coindre fut l'un de ces missionnaires qui marquèrent le catholicisme de la Restauration. Très critiqués, non sans raisons : religion cléricale, combattive, politisée, c'est vrai.

 

Mais, car la religion « pure » n'existe pas, christianisme authentique néanmoins, qui incrusta la ferveur dans le peuple des villes et des campagnes. On les vit partout dans le diocèse, de Belleville à Saint­-Chamond, de la Guillottière à Tarare, de Bourg à Saint-Just-en-­Chevalet.

 

Non content d'être un missionnaire infatigable, André Coindre fut un fondateur. Comme souvent, cela se fit en réponse à des besoins très précis, et même ponctuels. Un jour de 1816, il recueillit dans la rue deux petites filles abandonnées et, sur les conseils du curé de Saint-Bruno, les confia à une demoiselle de la paroisse, âgée de 42 ans, Claudine Thévenet. Celle-ci s'occupa de faire héberger les enfants, qu'elle ne perdit pas de vue. Ce fut l'origine d'une « providence », ou orphelinat-maison d'apprentissage, qui s'étoffa peu à peu en moyens et en personnel. Dans le même temps Claudine Thévenet prit comme directeur le jeune prêtre (il avait 29 ans) dont elle venait de faire la connaissance, et sous l'autorité duquel elle plaça la « Pieuse Union » de ses amies qui désiraient associer leurs prières et leurs actions charitables. Aidées par les Sœurs de Saint­-Joseph, la Pieuse Union prit en charge la Providence ; puis, les choses marchant vite, le P.Coindre, dès le 31 juillet 1818, fit adopter la décision de se réunir en congrégation, avec Claudine Thévenet comme première supérieure. Le 5 octobre, la vie de communauté s'ouvrait, rue des Pierres Plantées, avant de se transférer avec la Providence à Fourvière, en 1820. Ainsi commença l'histoire de la congrégation de Jésus-Marie.

 

 


Entre temps, et pour répondre au même besoin, Coindre avait ouvert aux Chartreux, aidé d'un ami, en juillet 1817, une providence de garçons, « le Pieux Secours », qui s'installa en 1820 en haut de la montée de la Butte (c'est l'origine du pensionnat Saint-Louis). Pour asseoir et étendre l'action du Pieux Secours, une congrégation masculine formée autour des premiers éducateurs, apparut nécessaire : ce fut l'institut des Frères des Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie, plus tard Frères du Sacré Coeur, fondé le 30 septembre 1821.

 

Peu après, le P.Coindre déplaça le centre de ses activités. Pour des raisons encore mal connues, il se trouvait mal à l'aise dans le diocèse : désaccord avec les vicaires-généraux sur la création des Frères ? Autres difficultés ? On ne sait. Toujours est-il qu'en 1822, il se retira des missionnaires des Chartreux et profita du bon accueil de l'évêque de Saint-Flour (Le Puy n'avait pas encore été rétabli) pour fonder à Monistrol une société de missionnaires diocésains pour le Velay, pour y installer une maison de Jésus-Marie, et pour y transférer le foyer du développement des Frères du Sacré-Cœur, notamment leur noviciat.

 

Il se dépensait toujours en missions : Haute-Loire, diocèse de Blois. Appelé par l'évêque de cette ville, il s'y établit en novembre 1825. Mais une vie harassante avait eu raison de sa santé. Atteint par la démence en 1826, complètement hors de lui, il se jeta par la fenêtre dans la nuit du 30 mai. Fin douloureuse d'un authentique apôtre.

 

 

Henri HOURS

Eglise à Lyon, 1994, n°17