Comité de Défense
Sociale et Religieuse de la Loire
1901
RAPPORT
sur
l'Organisation
Catholique
Au
Congrès de St-Etienne (Avril 1907)
-
MONSEIGNEUR,
MESDAMES,
MESSIEURS,
Dans
les derniers mois de l'année 1989, quelques prêtres, quelques religieux et
quelques laïques, résidant à Saint-Etienne, eurent à diverses reprises,
l'occasion de se réunir pour s'entretenir des mutualités qu'ils avaient
l'intention de fonder dans les écoles libres de la ville.
Petit
à petit, ces réunions devinrent habituelles, et leur objet s'élargit : il
fallait alors pourvoir à la défense de la liberté d'association et l'on mit en
commun des projets nouveaux d'une portée générale...
Il
résulta de l'expérience ainsi faite, qu'à Saint-Etienne l'union pour les œuvres
et la propagande religieuse était réalisée entre catholiques — prêtres ou
laïques — aussitôt qu'ils se rencontraient. Si parfois l'on en avait douté, la
cordialité des discussions auxquelles ils s'étaient livrés ensemble excluait
désormais un pareil doute. Pourquoi donc cette union qu'ils avaient vu si
aisément s'opérer sous leurs yeux à Saint-Etienne, ne pourrait-elle pas
s'étendre à tout le département, et de quelle force ne disposeraient-ils pas
dans cette Loire encore profondément catholique s'ils pouvaient organiser en un
seul corps vivant et agissant tant d'œuvres, tant de ressources citant de
bonnes volontés ?
C'est
de ce sentiment que naquit au lendemain de la loi sur les Associations, le
Comité de défense sociale et religieuse de la Loire : son assemblée
constitutive est du 18 septembre 1901, sa déclaration à la préfecture du 23
octobre de la même année; et l'on petit dire que, depuis ces dates déjà lointaines,
l'organisation des catholiques n'a pas cessé d'être l'objet des vœux et des
efforts de ses adhérents. Cette organisation leur apparaissait sous la forme
d'une vaste association englobant tous les catholiques du département qui
seraient résolus à prêter un concours actif à la défense et à la propagande
religieuses.
Ils
écrivaient dans la brochure par laquelle ils faisaient appel au concours de
tous les hommes de bonne volonté : « Que voulons-nous par dessus tout ?
Grouper les catholiques, les rapprocher en les rattachant à un centre commun,
les habituer à compter les uns sur les autres, leur donner le sentiment de leur
nombre et de leur force, et arriver ainsi à décupler les résultats de leurs
efforts individuels. »
Le
centre auquel les fondateurs entendaient rattacher les catholiques était le conseil
de l'association dans lequel, sans distinction d'écoles ni de nuances, tous les
catholiques influents devaient être appelés, de telle sorte que chacun des
cantons de la Loire y eût au moins un représentant. Ce conseil se recrutant lui-même
en dehors de toute assemblée générale et administrant souverainement
l'association avait pour organe d'exécution un secrétariat permanent établi au
siège social.
Le
but que se proposait l'association en organisant les catholiques était la
défense de leurs personnes et de leurs œuvres, la propagande religieuse par
l'école, la conférence, la presse et les œuvres. Elle s'interdisait la politique
électorale et se donnait pour règle de ne recourir qu'aux moyens légaux.
L'association
départementale fondée sur ces bases a rendu des services ; elle a été vraiment
un centre de ralliement dans la crise violente que produisit la persécution
inaugurée par Waldeck-Rousseau et continuée sans interruption par ses successeurs
; son secrétariat est devenu pour toutes les difficultés relatives aux choses
religieuse une sorte d'agence à laquelle de tous les points du département on a
volontiers recours : mais, elle l'avoue sans ambages, elle n'a pas réussi à
organiser les catholiques ; elle n'a pas donné aux fidèles, en dehors des
églises où ils prient et des partis politiques divers où ils luttent pour la
conquête du pouvoir, l'impression qu'ils constituent un corps distinct et
vivant au milieu du grand nombre des hommes hostiles, indifférents ou
distraits.
Ce
n'est pas qu'à diverses reprises le comité ne se soit efforcé de se créer des
relations lointaines et d'avoir dans chaque commune au moins un représentant :
mais jamais il n'y est parvenu sauf en quelques rares cantons, et encore ces
succès partiels furent-ils sans utilité comme sans lendemain, parce que l'on ne
peut compter sur des correspondants qu'on ne voit jamais et auxquels on laisse
passer des années entières sans rien demander.
La
dernière tentative du comité en vue de l'organisation des catholiques a été le
congrès tenu à Saint-Etienne les 4, 5, 6 et 7 avril 1907, avec l'autorisation
et sous la présidence de l'autorité diocésaine.
Certes,
dans la pensée de ses promoteurs, il s'agissait bien au lendemain de la loi de
séparation de manifester l'union et la force des catholiques et de passer en
revue leurs œuvres ; mais ce double but, poursuivi et atteint avec un plein
succès, ne doit pas faire perdre de vue l'effort tenté en même temps pour
préciser l'idée et avancer la réalisation d'une organisation générale : c'est
sur cette partie des travaux du Congrès de Saint-Etienne, et pour ne pas sortir
du cadre du présent congrès, sur cette partie seulement, que nous voudrions
attirer quelques instants votre attention.
La
dixième page du questionnaire que nous avions envoyé à plusieurs exemplaires
dans toutes les paroisses du département était intitulée : Organisation et propagande et contenait les interrogations
suivantes :
1°
Existe-t-il dans votre paroisse, sous une forme ou sous une autre, un
groupement de prêtres et de laïques se préoccupant des intérêts religieux ?
2° Quels
en sont le nom, l'organisation, l'importance ? Comment s'est manifestée son
action ?
3°
Ce groupement se confond-il avec un groupe affilié à une organisation politique
?
4°
Croyez-vous possible l'organisation, en dehors de toute intention électorale ou
politique, .d'un comité d'action et de défense religieuse autour du clergé ? La
croyez-vous utile ?
5° Avez-vous
un groupement de femmes catholiques, soit indépendant, soit affilié à une des
organisations catholiques existantes ? A quelles œuvres s'applique son
activité?
La
portée de ces questions est facile à discerner : nous voulions savoir si
l'organisation que nous avions en vue existait déjà dans quelques localités ou
si, tout au moins, elle était désirée par quelques prêtres ou par quelques
laïques clairvoyants : ne convient-il pas, en effet, dans toute entreprise
nouvelle de prendre pour point de départ ce qui existe et de s'efforcer de
répondre aux aspirations encore confuses qui concordent avec le dessein que l'on
veut réaliser ?
Nous
verrons dans un instant quel fut le résultat de l'enquête à laquelle nous
avions procédé.
Le
congrès s'ouvrit, et dès la première séance Mgr Déchelette mit en pleine lumière
l'importance du problème : « Voilà bien, s'écria-t-il, le besoin de l'heure
présente : l'organisation de nos forces catholiques. Nos forces catholiques,
elles existent ; mais ne sont-elles pas trop disséminées, ne sont-elles pas
trop émiettées ? Il s'agit de les organiser en un faisceau puissant... Et cette
organisation, il faut la créer partout jusque dans les villages les plus
reculés ». Ce sont en effet, les habitants des campagnes qui sont à cette
heure l'objet des plus vives préoccupations de l'épiscopat parce que la défense
n'y existe point en face de l'attaque, et que les ruines — l'expérience des
siècles l'a démontré — y sont plus longues et plus difficiles à réparer.
Le
secrétaire général du congrès répondit à Sa Grandeur que dans la pensée des
hommes qui en avaient pris l'initiative « le congrès devait développer
dans le département l'œuvre générale d'organisation poursuivi depuis cinq ans
par le Comité de Défense », mais c'est seulement le dimanche matin, dans le
remarquable rapport rédigé par M. Jean Mazodier sur « l'organisation et la
propagande » qu'on se mit vraiment à la besogne.
« Nous
avons pris, dit-il en substance, au cours des trois journées qui viennent de
s'écouler les résolutions les plus salutaires, mais qui les exécutera ? Nous
avons indiqué les œuvres à créer et les moyens de développer les œuvres
existantes, qui donc va s'en charger ? Qui sera responsable de ce qui sera fait
et aussi de ce qui sera omis ? »
A ces
questions une seule réponse est possible : « Ce sera le curé, il est dans
sa paroisse l'organe de toute vie et la source de toute activité, et lorsqu'il
parle des œuvres de la paroisse il dit résolument et avec raison : mes œuvres,
mes écoles, mes ressources… »
Mais
une institution fondée sur un homme est affectée des faiblesses qui atteignent
cet homme et elle est caduque comme lui ; aussi la paroisse, telle qu'elle est
sortie du régime concordataire n'est-elle plus qu'un « groupement de fait,
inorganique, un composé de personnes rassemblées sous une autorité et marchant
sous une direction, capable quand même d'une action puissante lorsque celui qui
la dirige et qui l'anime est lui-même en possession d'une vie intense qu'il
communique à ce qu'il entraîne, mais elle a cessé d'être une association douée d'une
vie propre, munie de ses organes, consciente de son développement et de sa
destinée. »
Comment
faire cesser cet état de choses si préjudiciable ? En rendant à la paroisse son
caractère de corps vivant, en en faisant une grande famille dont le curé sera
vraiment le père et dans laquelle existe entre les fidèles des liens de
fraternité assidûment renoués par la communauté des efforts concertés, en un
mot en la constituant en association organisée.
« Quand
nous parlons d'association, disait dans la Croix
du 21 mars 1907, Franc cité par M. Mazodier, nous n'entendons pas ici préciser
s'il y a lieu de constituer des associations légales, ni de quelle sorte il y a
lieu de les organiser. Nous voulons dire que le curé ne doit pas s'isoler, mais
qu'après avoir prié et étudié... il est nécessaire qu'il se mette en relation
avec ses paroissiens, qu'il les actionne incessamment, et que par eux il
parvienne à promouvoir, par des organismes vivants et conquérants, les intérêts
dont il est chargé. »
Ce
sont ces groupements organisés et permanents que nous voudrions voir créer pour
la défense et l'action dans chaque paroisse auprès de chaque curé.
Comment
arriver à cette création nécessaire ? L'enquête à laquelle nous avons procédé
ne nous a fourni aucun renseignement vraiment utile ; certaines réponses à
notre questionnaire ont indiqué cependant que le Comité des écoles libres, le
Cercle d'hommes ou la Société amicale des anciens élèves des Frères pourraient
former le noyau du Comité catholique à organiser.
Des
interrogations orales adressées à quelques prêtres bien informés nous ont
appris que le clergé était bien loin d'être unanime en ce qui touche les
comités de paroisse : les uns estiment qu'il convient avant tout dans la crise actuelle
d'être prudents et d'attendre pour l'œuvre de reconstruction des jours
meilleurs : ils ne veulent pas de l'innovation projetée. D'autres pensent, au
contraire, qu'il est grand temps de donner aux catholiques des cadres et une
discipline, mais ils attendent les instructions de l'autorité ecclésiastique.
Ils
prévoient de réelles difficultés pour la formation des Comités, spécialement
dans les campagnes : les cultivateurs craindront l'inimitié administrative ; il
se produira des compétitions politiques et des rivalités d'influence ; il
faudra se contenter d'une élite peu nombreuse, parfois avoir recours aux
femmes. Quand les comités fonctionneront il faudra éviter avec un soin
scrupuleux toute démarche pouvant les compromettre dans les agitations
électorales, mais comment conjurer la division provoquée par les tendances
contraires de « ceux qui veulent user de la force religieuse pour accélérer
lis réformes démocratiques et de ceux qui comptent sur elle pour les retarder »
? Enfin et surtout, il faudra empêcher, en traçant nettement la ligne de démarcation,
que les fidèles, collaborateurs du curé dans les œuvres paroissiales, ne
s'immiscent indiscrètement dans les affaires purement spirituelles de la
paroisse.
Dès
lors il va de soi que l'autorité diocésaine doit seule promouvoir la fondation
des comités, en déterminer les attributions, en désigner même les membres par
l'entremise d'un directeur ou d'un inspecteur des œuvres diocésaines. La
fondation des comités pourra être utilement publiée dans la Semaine religieuse.
Aux
comités paroissiaux l'isolement enlèverait une grande partie de leur effet
utile ; il serait donc opportun de constituer des comités cantonaux présidés par
le directeur des œuvres diocésaines ou par le curé doyen et composés de
délégués de tous les comités du canton. Ils auraient pour fonction propre de
susciter la formation de comités dans les paroisses où ils n'existeraient pas
encore, de donner à ceux qui sont fondés les exemples et les encouragements nécessaires,
de pourvoir enfin, par un effort collectif, aux œuvres que les ressources des
paroisses isolées ne peuvent accomplir.
Au
chef-lieu d'arrondissement on pourrait de même réunir les délégués des cantons
chaque fois que l'exigeraient les intérêts religieux de la région. Enfin le
comité de Défense « continuerait, comme comité départemental, à exercer
provisoirement son action directrice, jusqu'à ce qu'il subisse lui-même l'action
supérieure d'un comité diocésain, offrant à tous les services de son secrétariat,
prêtant son assistance, multipliant son concours, sans autre ambition que de
faire œuvre utile au bien des âmes et à celui du pays. » Il pourrait
chaque année convoquer un nouveau congrès pour retremper les énergies et se
rendre compte, pour louer les zélés et stimuler les timides, du progrès de
l'organisation et de la propagande religieuses.
Le
rapport de M. Mazodier que nous venons de résumer se terminait par plusieurs vœux
: nous n'en reproduirons qu'un seul, le premier et le plus important :
Que
l'autorité religieuse décide la fondation dans chaque paroisse du département
de la Loire d'un comité ou conseil paroissial ayant pour objet d'organiser la
collaboration des laïques avec le clergé et devant fonctionner sous l'empire de
statuts approuvés ;
Que
l'exécution de cette décision et spécialement la désignation des membres des
comités paroissiaux soient assurées par l'intervention d'un représentant
officiel de l'autorité ;
Que
le groupement de ces comités soit opéré par région et qu'à la tète de chaque
groupement soit institué un comité d'entente ou de direction.
M.
le vicomte de Meaux, de qui les catholiques do la Loire ont eu, depuis lors, à
pleurer l'irréparable perte, entretint à son tour le congrès de la coopération
des laïques avec le clergé sous le régime de la Séparation. Rien de plus
intéressant ni de plus remarquable ne fut présenté au congrès que cette
communication dans laquelle étaient évoquées les assemblées de paroisse de
l'ancien régime et les paroisses organisées sous le régime libéral et
démocratique des Etats-Unis ; mais, bien qu'en terminant il ait insisté sur la
nécessité des associations pour soutenir les œuvres diverses qui constituent à
côté du culte la vie de l'Eglise, c'est surtout au point de vue du Denier du
Clergé et du culte que l'éminent historien s'était placé. Nous passons donc à
notre grand regret et nous n'avons plus à signaler que le rapport très intéressant
et très précis de M. l'abbé Cottard-Josserand, directeur des œuvres, sur le
bureau diocésain de Belley. Tout serait à citer de ce rapport si la création et
l'organisation d'un bureau diocésain pouvaient faire, de la part d'un Congrès
catholique, l'objet d'autre chose que d'un vœu qu'il appartient à l'autorité
ecclésiastique de réaliser quand et comme elle le jugera à propos.
Fermons
maintenant le volume du compte rendu du Congrès et tâchons de dégager des pages
que nous venons de résumer, des paroles qui s'échangèrent à leur propos, et
enfin des longs efforts et de l'expérience du Comité de défense, quelques idées
directrices et quelques conclusions pratiques :
1°
Une organisation catholique et absolument nécessaire ; elle implique une
coopération active des laïques avec le clergé ; elle ne doit pas exister
seulement dans les villes et les gros bourgs mais jusque dans les moindres
villages.
2°
L'autorité ecclésiastique a seule le droit d'entreprendre et le pouvoir de mener
à bien une telle organisation ; la collaboration des laïques suppose de leur
part le respect de la hiérarchie à tous les degrés et, de la part du clergé, le
désir sincère d'utiliser le concours des laïques et d'accepter leur contrôle.
3°
La forme du groupement paroissial autour du curé importe peu, pourvu que ce
groupement soit permanent et actif.
4°
L'expérience démontre que les paroisses sont rares en ce moment, surtout dans
les campagnes, où, dès maintenant, l'on puisse trouver des catholiques disposés
à travailler avec leur curé dans un but exclusivement religieux ; l'œuvre des
comités de paroisse est donc une œuvre de longue haleine ; à vouloir former des
comités sans délai dans toutes les paroisses à la fois, on ne créerait que de
vaines apparences, des listes de noms sur des feuilles de papier et nul travail
effectif ne se ferait. L'œuvre ne pourra donner des résultats que dans les
paroisses où le clergé, convaincu au préalable de l'utilité du concours des
laïques, se cherchera et se formera lui-même des collaborateurs.
5°
Les comités de paroisse ont besoin d'être reliés à un centre, où ils puissent
trouver en toute occasion conseil, direction et assistance ; d'autre part,
l'action d'un comité central n'est efficace et même possible qu'autant que des organisations
locales sont en correspondance avec lui. Pour que l'organisation qui unira le
centre aux extrémités existe autrement que sur le papier, il faut que le comité
central soit toujours prêt à rendre les services que pourront lui demander les
comités locaux. Cela implique au centre des bureaux permanents et suffisamment
renseignés et outillés pour pouvoir donner satisfaction à toutes les demandes.
6° Le
grand péril contre lequel les comités de paroisse auront à se garder n'est
point, semble-t-il, que les laïques empiètent sur le domaine réservé à la
hiérarchie, mais que les uns comme les autres soient entraînés dans la
politique, et que les comités de paroisse deviennent les cadres d'un parti
catholique. Avoir l'ambition de prendre part aux affaires publiques, s'engager
dans la lutte ardente des partis et s'efforcer de faire prévaloir les idées,
auxquelles on est sincèrement attaché, parmi les électeurs ou dans les conseils
de la nation, rien en soi de plus légitime, rien de plus louable, et nous ne
venons pas conseiller l'abstention politique aux catholiques français. Mais la
question à laquelle nous ne pouvons nous dérober est celle de savoir s'il est
opportun que les catholiques étroitement unis en un seul corps sous la conduite
de leurs évêques par la nouvelle organisation descendent, suivant la métaphore
traditionnelle, dans l'arène électorale ? — Eh bien, non !
Le
mirage du centre allemand et du parti catholique belge ne doit pas les égarer
et les induire à la poursuite décevante du pouvoir : les situations ne se
rassemblent point ; il n'y a en France ni émiettement des partis et puissance
impériale dominante comme en Allemagne, ni majorité catholique, au moins possible,
comme en Belgique. La constitution d'un parti catholique qui serait
nécessairement minorité aurait pour résultat certain de surexciter et de
perpétuer les haines et de provoquer les représailles.
Elle
aurait surtout la conséquence désastreuse de détourner les comités de paroisse
de leur vraie mission, qui est de travailler au bien spirituel et moral du
pays, de propager et de défendre la foi religieuse et de ramener à l'Eglise les
âmes contemporaines. L'ardeur des luttes électorales les entraînerait malgré
eux à traiter en ennemis des hommes qui ne sont jamais que des frères égarés,
et à subordonner la conquête du royaume du ciel à la conquête des Conseils
municipaux et des Chambres.
Il
faut ajouter que l'union des catholiques, qui est facile dans la vérité religieuse
et l'obéissance à la hiérarchie, est impossible dans toutes les questions
contingentes de la politique, que le parti catholique français serait
nécessairement un parti conservateur et qu'il rejetterait dans l'opposition
toute la minorité acquise à la démocratie et aux réformes sociales.
7°
Les comités de paroisse doivent être uniquement des comités d'œuvres catholiques
; ils doivent donc partir de ce qui existe actuellement, en utilisant les meilleurs
éléments des œuvres déjà fondées et en recrutant sans distinction de nuances ni
de partis une élite de catholiques résolus à servir la religion et les âmes,
d'une façon désintéressée, sans arrière-pensée d'aucune sorte, sous la direction
exclusive de la hiérarchie.
M. Auguste PRENAT,
Secrétaire général du Comité de défense sociale
et religieuse de la Loire.
Source :
- PRENAT Auguste,
1908, Rapport
sur l’organisation catholique au Congrès de Saint-Etienne (avril 1907), Premier Congrès diocésain de Lyon 10-11-12
Mars 1908. Compte rendu