congrès
missionnaire de Lyon
1932
Le
Congrès missionnaire qui se déroule à Lyon du 4 au 7 décembre 1932 a pour sujet
général « La Femme païenne et le
Christianisme », selon le programme suivant :
- Dimanche 4
décembre,
o
à
la primatiale Saint-Jean, Grand’messe pontificale, du rite lyonnais, célébrée
par Son Eminence le Cardinal Maurin, archevêque de Lyon ;
o
à
la salle des fêtes des Lazaristes, discours de Mgr Bruno de Solages, recteur
des Facultés catholiques de Toulouse, « La libération de la femme païenne par le Christianisme, et sa
signification spirituelle ».
-
Lundi
5 décembre,
o
à
la Primatiale Saint-Jean, messe du Congrès célébrée par Mgr de Guébriant,
Supérieur des Missions Étrangères de Paris ;
o
à
la salle de l'Étoile, rue Sainte-Hélène, sous la présidence de de Guébriant,
« La situation de la femme païenne »,
par Mgr Beaupin, « L'état actuel de
la femme dans l'Inde », communication par Mère Marie des Missions des
Catéchistes Missionnaires de Marie Immaculée ;
o
à
la salle de l'Étoile, « Les Œuvres
pontificales missionnaire, I. La Propagation de la Foi : les Dizaines, les
Journées missionnaires, les Annales et les Missions »; à la salle
Molière, « Ce que le Christianisme a
fait pour la libération de la femme païenne », par M. Georges Goyau,
de l'Académie française.
-
Mardi
6 décembre,
o
à
Saint-Nizier, messe du Congrès célébrée par Mgr Breynat, vicaire apostolique de
la Baie d'Hudson ;
o
à
la salle de l'Étoile, sous la présidence de Mgr Breynat, « La femme païenne en Afrique : la mère, les
enfants », par le Père Guilcher, provincial des Missions Africaines,
communication sur « La Famille
Alaouite », par le P. Janot, sj ;
o
à
la salle de l'Étoile, réunion des prêtres sous la présidence de Mgr Olichon,
directeur de l'Union Missionnaire du Clergé de France, communication sur
« La Ligue des Écoles »,
par le Père Miniez, sj, et sur « La
Ligue Missionnaire des Étudiants de France », par M. l'abbé
Chappoulie, secrétaire général de la Propagation de la Foi, à Paris ;
o
à
la salle Molière, « La femme
païenne et les gouvernements européens », par le Père Dubernet, des
Pères Blancs.
-
Mercredi
7 décembre,
o
à
Fourvière, messe du Congrès célébrée par Mgr Boucher, président de la
Propagation de la Foi pour le Secteur de Paris ;
o
à
la salle de l’Etoile, « La
pénétration du Christianisme parmi les femmes païennes », par le Père
Dubois, sj ;
o
à
la salle de l’Etoile, « Les Œuvres
Pontificales Missionnaires, II. L'Œuvre de Saint-Pierre apôtre : le mouvement
du clergé indigène ; l'organisation de l'Œuvre, les rosiers, les adoptions ;
« Les Œuvres Pontificales
Missionnaires, III. La Sainte Enfance »;
o
à
Saint-Nizier, Salut de clôture, sermon par M. le Chanoine Thellier de
Poncheville : « Les conditions
nouvelles de l'apostolat missionnaire ».
La Semaine religieuse en donne ce compte
rendu :
Le Congrès missionnaire national qui avait été
organisé, à l'occasion et pendant la durée de l'Exposition, s'est tenu la
semaine dernière avec un parfait succès. On aperçoit tout de suite la
différence d'un Congrès avec une Exposition. Une Exposition est une œuvre
d'éducation largement populaire. Elle a pour but d'intéresser un public très
étendu à la grande œuvre de l'apostolat catholique à travers le monde, de
frapper les imaginations autant que les intelligences par la vue des documents
et des souvenirs qui y sont rassemblés, et que la parole des Missionnaires
explique et commente avec émotion. Un Congrès s'adresse plutôt, non pas sans
doute uniquement à une élite restreinte de spécialistes, mais à un public déjà
informé ou désireux de l'être, à ceux qui connaissent ou qui veulent mieux
connaitre les questions dont l'ensemble compose « la question
missionnaire », et qui touchent de si près aux problèmes coloniaux et aux
problèmes sociaux. Il s'ensuit que, naturellement, un Congrès met à son
programme un thème particulier d’études, sur lequel il semble opportun de
réunir quelques données d'expérience, de préciser quelques points de doctrine,
et d'attirer l'attention de l’opinion publique. Le sujet général du Congrès qui
s'est tenu à Lyon était celui-ci : la libération de la femme païenne. En
beaucoup de pays païens, la femme est encore une esclave, vendue presque dès sa
naissance à celui qui sera son mari, c'est-à-dire son maître, et qui est
souvent un vieillard, puisqu'il faut être déjà riche pour acheter des femmes,
et que le nombre des femmes est un signe de richesse. Il était peut-être temps
de dire quelle responsabilité ont assumée et portent encore les gouvernements
européens en perpétuant, sans y chercher aucun remède, une situation si
lamentable. C'est une fierté pour nous de constater que seuls les Missionnaires
et, pour mieux dire, l'Église catholique, se préoccupent de cette œuvre urgente
de libération de la femme païenne.
Le Congrès comportait trois séries de réunions.
C'étaient d'abord les cérémonies religieuses, dont la première a été la Messe
pontificale que S. E. le Cardinal a bien voulu célébrer à la Cathédrale,
et pour laquelle le Souverain Pontife avait
daigné accorder l’autorisation de donner, comme à Noël et à Pâques, la
bénédiction papale. Les cérémonies se sont déroulées dans l'ordre traditionnel
et les Congressistes étrangers ont pu admirer la splendeur de l'antique
liturgie lyonnaise dont les traditions et les règles se conservent à Saint-Jean
avec un culte pieux…
… La seconde série des réunions comportait les
conférences documentaires sur le sujet proprement dit du Congrès : la situation
de la femme païenne et sa libération par le Christianisme. Ce fut d’abord la
grande réunion d'ouverture dans la salle du pensionnat des Lazaristes. Mgr
Bruno de Solages, l'éminent recteur des Facultés catholiques de Toulouse,
professeur si apprécié des Semaines Sociales, a donné une magistrale
conférence, écoutée et applaudie par un nombreux auditoire. Puis, le lundi
matin, ce fut Mgr Beaupin, directeur des Amitiés françaises et membre de
l'Union catholique d'études internationales à Genève, qui, muni des documents
les plus complets et les plus précis, exposa la distance qui sépare la femme
païenne de la femme chrétienne dans la législation et les mœurs. Il préconisa
les remèdes juridiques nécessaires à une telle situation, la modification des
codes indigènes, la reconnaissance des droits de l'indigène convertie et
monogame, et la protection légale des enfants. A l'appui de celle conférence
d'ensemble, plusieurs missionnaires, en diverses conférences ou communications,
apportèrent les données de leur expérience : ce furent, tour à tour, Mère Marie
des Missions, des Catéchistes Missionnaires de Marie-Immaculée, qui exposa en
des termes lumineux la situation de la femme hindoue ; le P. Jattot, sj,
qui traita de organisation de la famille alaouite ; ce fut aussi le P.
Guilcher, provincial des Missions Africaines de Lyon, dont l'autorité est faite
d'expérience autant que de pondération et d'un sens très juste de la mesure. Il
exposa ce qu'est en Afrique, plus particulièrement au Dahomey, la situation de
la mère et des enfants. Ce fut enfin le P. Dubernet, des Pères Blancs, qui
donna l'une des conférences du soir à la salle Molière, et qui apporta, lui
aussi, son témoignage en ce qui concerne les régions évangélisées par les fils
du Cardinal Lavigerie. Le dernier jour du Congrès, le R.P. Dubois traitait de
la pénétration du christianisme parmi les femmes païennes Il expliqua la
besogne urgente qui s'impose sur ce point : car les femmes païennes risquent
d'être entraînées par un mouvement de revendications qui ne tarderait pas à
devenir révolutionnaire et athée. C'est par le rayonnement de la charité et par
une instruction progressive que seront peu à peu converties et relevées ces
femmes, tantôt inabordables, tantôt humiliées au point d'avoir perdu le
sentiment de leur propre dignité. M. Georges Goyau, de l'Académie Française,
dont on connaît la compétence sur toutes les questions de l'histoire
missionnaire, avait accepté de donner l'une des conférences du Congrès. Il montra
l'œuvre accomplie dans toutes les parties du monde par les divers instituts de
religieuses et comment elles ont élevé la femme païenne convertie jusqu'aux
sommets du dévouement et de la vie mystique, par la création des instituts de
Sœurs indigènes. Il n'est pas besoin de dire que cette conférence avait attiré
un auditoire considérable qui a fait à l'éminent conférencier l'accueil le plus
enthousiaste.
La troisième série des réunions du Congres comportait
des exposés et des échanges de vues pratiques sur les grandes œuvres
missionnaires et sur les associations « spécialisée » en faveur de
l'idée missionnaire. C’est là que Mgr Olichon, directeur de l'Union
missionnaire du Clergé de France, au cours d'une réunion sacerdotale, à
laquelle assistaient une centaine de prêtres de Lyon et de la région, adressa
un appel chaleureux à ses confrères pour qu'ils intensifient encore le zèle
traditionnel du clergé lyonnais envers la Propagation de la Foi. Le lendemain,
Mgr Mério, directeur général de la Sainte-Enfance, exposait les résultats de
l'œuvre si touchante dont il est l'infatigable propagandiste ; il montra
aux mères, aux éducateurs, aux prêtres, le bien qu'elle accomplit dans les âmes
des enfants, dans les familles et dans les paroisses. Le P. Miniez, sj, parla
de la Ligue missionnaire des écoles et son bulletin Connaître ; et M.
l'Abbé Chappoulie, secrétaire général de la Propagation de la Foi à Paris, de
la Ligue missionnaire des Étudiants de France, dont on n'a pas oublié le beau
Congrès tenu à Lyon en mai dernier. Enfin, Mgr Arthaud exposa le fonctionnement
des grandes œuvres de la Propagation de la Foi et de Saint-Pierre-Apôtre, avec
leurs moyens nouveaux de propagande en Inde ; les Journées Missionnaires,
les Expositions missionnaires, les rosiers de Sainte-Thérèse. Il rappela la
place principale qu’elles doivent tenir
dans la sympathie et les générosités du public catholique, puisqu'elles sont
les œuvres nourricières de toutes les missions du monde, et qu'elles ont pour
chef le Souverain Pontife et pour siège le centre même de la catholicité.
… A l'issue du Congrès, le vœu suivant a été proposé et
adopté unanimement par les Congressistes :
Le 2e Congrès national Missionnaire :
Considérant la situation si souvent misérable de la
femme en beaucoup de pays de Missions et particulièrement en certaines tribus
africaines ;
Considérant d'autre part le devoir de relever la
dignité de la femme pour le progrès des sociétés indigènes,
Émet le vœu :
1° Que l'opinion publique soit saisie par tous moyens
des justes et légitimes revendications féminines en pays païens, dans la mesure
où l'Église catholique les approuve ;
2° Que les Gouvernements prennent toutes dispositions
utiles pour faire évoluer les coutumes indigènes, assurer la liberté de la
femme dans le contrat de mariage et sa dignité dans la vie conjugale ;
3° Que les Gouvernements favorisent l'éducation
féminine et encouragent les Œuvres organisées à cette fin par les Religieuses
missionnaires.
Ainsi, le diocèse et la ville de Lyon ont accompli une
belle œuvre et donné un grand exemple ; et les Lyonnais ont montré une fois de
plus, dans toute cette quinzaine qui vient de s'achever, le sens profond qu'ils
ont eu toujours des intérêts généraux de l'Église et de la civilisation, et
leur dévouement généreux à l'œuvre dont notre ville est fière d'avoir été le
berceau.
SOURCE :
La Semaine religieuse du diocèse de Lyon,
1932, 2 décembre, 16 décembre, 23 décembre