le roi
Conrad à l’abbaye de l’Ile-Barbe
971
Diplôme de Conrad roi de Bourgogne pour Heldebert, abbé
de l’Ile-Barbe à Lyon, année 971
Au nom du Dieu tout puissant et de notre Sauveur Jésus
Christ.
Conrad roi par la clémence prévenante de Dieu.
Puisqu’il convient que la considération royale apporte
aux lieux consacrés à Dieu les secours de sa magnificence et que les besoins
des serviteurs du Seigneur soient assurés de leur propre chef, et qu’ainsi
cette œuvre de piété reçoive son salaire du Seigneur lui-même, aussi
voulons-nous que soit connu de tous les fidèles de la Sainte Eglise de Dieu et
de nos fidèles : évêques, abbés, ducs, comtes, vicomtes, vice-seigneurs,
vicomtes, centurions, percepteurs, et tous les fonctionnaires publics, présents
et futurs,
que l’abbé Heldebert, et les moines du monastère de
Saint-Martin, édifié dans l’Ile-Barbe, s’adressant à notre clémence,
demandèrent que nous renouvelions de notre autorité l’immunité des biens
instituée par nos prédécesseurs et les cessions faites par des fidèles de Dieu
au monastère cité plus haut.
A leurs demandes, pour l’amour du culte divin, prêtant
l’oreille de notre clémence, nous décidons ce décret de notre Sérénité, par
lequel nous ordonnons et consacrons, que, de même que jusqu’ici ils ont pu
vivre tranquilles, les abbés de ce monastère et leurs moines, selon l’antique
autorité, ils puissent vivre sans aucune inquiétude, actuellement et par la
suite. Et comme leurs biens sont situés en des lieux divers selon les dons que
leur ont faits les fidèles, aussi demandons-nous que soient inscrits leurs noms
dans notre présent diplôme, pour qu’ils puissent les garder encore plus
librement sans quelque inquiétude : il s’agit de ce monastère et de ce qui
lui revient.
L’Eglise de Saint-Florent à Vimy, son village avec le
port, et tout ce qui touche cette église et le village,
L’Eglise de Saint Pierre située à Montanay,
Et aussi l’Eglise des saints Marcelin et Pierre à
Bressolles,
Et aussi l’Eglise de Saint Jean à Niost, et son
village,
Et Rillieux et l’autre Rillieux avec les villages,
Et puis l’Eglise de Sainte Marie à Openac, et le
village entier,
L’Eglise de Saint Cyprien à Bey, et de Saint André à
Huyriat,
L’Eglise de Saint Genès à Fleury, et de Saint Pierre à
Amodus,
Et aussi le sanctuaire de Saint Martin en Forez,
Et l’Eglise de Saint Bonnet à Cleppé avec le village et
ce qui le touche,
Et aussi le sanctuaire de Occiacum avec l’Eglise de
Saint André, et la chapelle à côté dédiée en l’honneur de saint Cosme, et
Noailly, et tous leurs environs,
Et le sanctuaire de Saint Martin de Firminy, et
l’Eglise de Sainte Marie de Cottance.
Ensuite en Provence le village Bollène, avec l’Eglise,
dédiée à l’honneur de saint Sauveur, et avec toutes les dépendances attenantes
à ce village,
Et aussi la Chapelle de Saint Benoît, naguère édifiée
par ces moines,
Et tout ce qui est concédé dévotement en territoire de
Gap par Hugues évêque ou par d’autres fidèles de Dieu à ce monastère dans
quelques parties de notre royaume.
Et puis nous voulons et ordonnons qu’ils gardent par la
suite ces biens avec toutes leurs dépendances, sans aucune inquiétude ou
diminution.
Nous décidons donc, nous établissons et nous
confirmons, par notre pouvoir décisionnaire, que chaque année ce couvent verse
une livre d’argent aux questeurs de notre propre prélature, et que nul essaie
de leur demander davantage ou de réclamer des biens leur appartenant, ose
exiger droits de gite et couvert ou quelques autres revenus. Mais que les
moines qui y servent Dieu puissent posséder ce sanctuaire pour leurs propres
usages, avec tous les biens qui lui reviennent justement, et les bateaux, tout
le temps, intégralement, sans division ou diminution ; qu’ils rendent hommage à
leur chef, comme il se doit, librement et sincèrement avec l’accord du
Seigneur ; qu’ils aient aussi le pouvoir d’élire l’abbé de leur couvent,
et de présenter les élus à l’évêque de la cité lyonnaise, pour que, ayant reçu
la bénédiction, il s’applique à gouverner la communauté qui lui est confiée.
Nous voulons aussi, et nous décidons par notre présent diplôme, que nul juge
public, ou quiconque de par un pouvoir judiciaire, n’essaie n’importe quand
d’instruire des causes et de requérir des taxes, enlever des garants, ou
écarter injustement l’immunité des hommes qui habitent ce monastère, ou
n’essaie d’engager un impôt, d’entrer dans les lieux et biens de l’Eglise évoquée,
ou de reprendre ce qui est noté plus haut.
Qu’ainsi les moines que Dieu nous a confiés, en servant
là le Seigneur avec davantage d’attention, et même de liberté, puissent
implorer la miséricorde du Seigneur pour nous et pour la stabilité de notre
royaume.
Et pour que demeure notre présent diplôme, nous le
signons ci-dessous de notre propre main, et nous ordonnons qu’y soit apposée la
marque de notre sceau.
Daté du 13 des calendes de septembre. En l’année de
l’Incarnation du Christ neuf cent soixante et onze. Indiction 14. En l’année 29
du règne de Conrad très invincible roi.
Fait en la cité de Vienne.
Au nom de Dieu heureusement. Amen
NOTES
Vimy : actuellement
Neuville sur Saône
Bressolles : Ain, pays
des Côtières
Saint Jean à Niost : Ain, pays
des Côtières, identifié parfois à Neyron dans l’Ain
Openac : localité disparue de l’Ain
Bey : Ain
Amodum : localité disparue de l’Ain
Saint André d’Huyriat : appelé Cimalocus
Occiacum : actuellement
Saint-Rambert-sur-Loire
Noailly : incertain, ou
« jeunes vignes »
Cottance : près de Feurs
Ecclesia : traduit ici Eglise, aussi
bien communauté qu’édifice
Cella : traduit ici sanctuaire, désignant généralement une partie d’un
temple
Villa : traduit ici village,
désignant généralement un ensemble de bâtiments comme un hameau
- IOGNAT-PRAT Dominique, 2006, La Maison Dieu. Une histoire monumentale de
l’Eglise au Moyen Age
13 des calendes de septembre : 20
septembre
Indiction 14 : l’indiction
étant une période de 15 ans à compter de l’année 312, il s’agit de : 312 +
(15x43) + 14 = 971
l’année 29 du règne de Conrad : Conrad,
très jeune, succède à son père en 337 et peine à établir son autorité ;
l’année 971 pourrait correspondre à la 29ème année après son premier
acte officiel paru le 1er octobre 942
- BRUEL Alexandre, 1880, Études sur la chronologie des rois de France et de Bourgogne d'après les diplômes et les chartes de l'abbaye de Cluny aux IXe et Xe siècles, Bibliothèque de l'école des chartes, n°41, pp. 329-374
DOCUMENTS
- Texte latin
o
LE
LABOUREUR Claude, 1665, Les
Masures de l'Abbaye royale de l'Isle Barbe Les Lyon ; ou Recueil historique
de tout ce qui s'est fait de plus memorable en cette Eglise, depuis sa
Fondation iusques à present : avec le Catalogue de tous ses Abbez, tant
Reguliez que Seculiers, pp.64-65
o
MENESTRIER
Claude-François, 1696, Histoire civile
ou consulaire de la ville de Lyon. Preuves,
p.XXXVIII
o
SCHEIDT
Christian Ludwig, 1751, Origines
Guelficae. Preuves
n°XLVIII
o
Congrégation
de Saint Maur
1757, Recueil des historiens des Gaules
et de la France, tome 9, p.703
o
MILLE Antoine Emile, 1771, Abrégé
chronologique de l'histoire ecclésiastique, civile et littéraire de Bourgogne
-
site Dictionnaire topographique de la
France comprenant les noms de lieux anciens et modernes
- site SUTER Henry,
Noms de lieux de Suisse
Romande, Savoie et environs
- voir les notices
sur l’abbaye de l’Ile-Barbe : documents,
monuments,
initiatives