Les
Ecoles cléricales
Les
petits séminaires furent une création du XIXe siècle ; l'Ancien Régime ne
connaissait que les écoles de clergeons, auprès d'églises cathédrales, collégiales,
voire monastiques, dont elles soutenaient la liturgie tout en formant de futurs
prêtres. Sans compter, bien entendu, quelques prêtres de paroisses qui
éduquaient au service de l'autel de jeunes garçons à qui ils enseignaient les
rudiments du latin : ce qu'on allait appeler, plus tard, les « écoles
presbytérales ».
Rien
d'étonnant si, dès les premiers signes de détente après la Terreur, des prêtres
zélés voulurent, en 1798, faire revivre, avec des fortunes diverses, ces écoles
ecclésiastiques. Les unes prirent leur autonomie, comme celle de M.Devie à
Saint-Jodard, et, sous l'impulsion du cardinal Fesch, devinrent les premiers
petits séminaires. Celle que M. Animé, illustre missionnaire de la
clandestinité, réunit à Saint-Martin-en-Haut resta liée à sa cure ; une autre
du même genre naquit à Ampuis. En 1805, l'archevêque donna son accord
chaleureux aux vicaires de Saint-Nizier pour en ouvrir une chez eux ; conscient
des services qu'elle pourrait rendre au recrutement sacerdotal, il lui donna même
un règlement destiné, dans sa pensée, à tout le diocèse, et qui ne fut
d'ailleurs pas appliqué. Entre 1810 et 1840 néanmoins, quelques établissements
virent le jour, à Lyon (Saint-François, Ainay), aux Salles, dans la Loire, et à
Amplepuis. On les appelait des « manécanteries », comme celle de
Saint-Jean, ou déjà des « écoles cléricales », pour les distinguer
des écoles ordinaires, les deux termes étant employés indifféremment.
En
1841, M.Duplay fut nommé supérieur du grand séminaire. Depuis longtemps inquiet
d'une diminution du recrutement sacerdotal, il voyait toute l'utilité, à cet
égard, des écoles cléricales et, dès que Monseigneur de Bonald, la même année,
lui en eut confié la direction générale, il leur consacra une partie de son
ministère, les visitant, veillant aux choix des professeurs, mettant au point
la doctrine de leur mission et de leur fonctionnement. Par ses soins, des
établissements très informels et un peu livrés aux initiatives individuelles
devinrent une institution, qui semble bien être restée propre au diocèse de
Lyon et qui conserva ses caractéristiques jusqu'à la deuxième guerre mondiale.
Les
écoles cléricales ou manécanteries avaient pour but de démultiplier l'action
des petits séminaires. On peut même les considérer, au moins quelques unes, comme des petits séminaires de premier
cycle : à partir
de 1854 en effet, la politique de l'archevêque fut de limiter leur enseignement
à la
classe de 4e. Toujours liées à une paroisse et sous la direction du curé, elles étaient pourvues
de professeurs, généralement de jeunes prêtres officiellement affectés. A
partir de 1858, elles figurèrent à l'annuaire diocésain, et les statuts synodaux les prirent en
considération, de 1874 à 1949. Certaines, au rayonnement étendu
et à l'effectif
nombreux - 3 ou 4 prêtres -, ressemblaient à des petits séminaires en réduction : Claveisolles, les
Salles, Joubert à Marlhes.
Les autres, plus locales, se rapprochaient des écoles presbytérales.
Les
jeunes enfants y restaient proches de leurs familles et souffraient moins du
dépaysement ; la vie y était simple, rustique, voire familiale : tel recevait
de chez lui ses provisions de la semaine, tel autre pour alléger le prix de la
pension, cultivait le jardin en même temps que les langues anciennes. De plus,
proche des populations, elles constituaient comme « un appel de
vocations » (F.Lavallée).
Elles
se développèrent d'abord en ville : en 1858, le diocèse en comptait 20, dont 14
à Lyon
et 4 à Saint-Etienne.
Le maximum fut atteint vers 1900 : 33, dont 16 à Lyon et 6 à Saint-Etienne. Leur rôle dans le recrutement sacerdotal
apparaît en quelques chiffres. En 1864, sur les 90 élèves en première année de
théologie à Saint-Irénée,
43 avaient fait leurs débuts dans des écoles cléricales, 29 dans des écoles presbytérales.
En 1886, on comptait que 120 prêtres étaient sortis de Saint-Nizier, 90 de
Saint-François, 60 de Saint-Bonaventure ; à Saint-Etienne, 60 de Notre-Dame ; à la campagne, 130 d'Usson-en-Forez, 106
des Salles, 70 de Claveisolles, environ 60 d'Ampuis. En 1928, où il y avait
encore 22 écoles dans le diocèse, sur 62 entrées au grand séminaire de
philosophie, 32 provenaient d'écoles cléricales.
Mais
on peinait de plus en plus à pourvoir les postes de professeurs ecclésiastiques. En 1938, la concentration des écoles de Saint-Etienne et d'alentour à Sainte-Thérèse fut un premier signe. Les fermetures se
succédèrent, et l'année 1966 vit la fin de ces écoles cléricales, qui avaient
tenu une si grande place dans la formation du clergé diocésain.
Henri HOURS
Eglise à Lyon, 2000, n°1