musée du diocèse de lyon

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Monseigneur Ginoulhiac

1806 - 1875

 

 

 

Dans la suite des archevêques de Lyon au XIXe siècle, Monseigneur GINOULHIAC est sans doute celui qui a le moins marqué. Non faute de personnalité, mais de temps.

 

Prêtre du diocèse de Montpellier, où il était né le 9 décembre 1806, il enseigna la théologie au séminaire, avant d'être appelé par l'archevêque d'Aix comme vicaire général. La publication, en 1852, d'une importante Histoire de dogme catholique dans les trois premiers siècles de l'Eglise et jusqu'au Concile de Nicée, où il faisait face aux interprétations rationalistes de l'histoire du christianisme antique, confirma une réputation de théologien déjà établie.

 

Sa nomination au siège de Grenoble par le gouvernement impérial, la même année, ne fut pourtant pas acceptée de bon cœur à Rome. GINOULHIAC, en effet, entre les deux courants qui tendaient déjà à se partager le catholicisme français, se rangeait délibérément du côté des libéraux, plus conscients que les ultramontains de l'autonomie de l'ordre politique et social. Il n'en fut pas moins, à Grenoble, un évêque parfaitement traditionnel, proche du peuple fidèle et de son clergé, à la formation doctrinale duquel il s'intéressa tout particulièrement.

 

Quand s'annonça le premier concile du Vatican, où devait être traitée et tranchée, entre autres questions, celle de l'infaillibilité pontificale, GINOULHIAC fut l'un des évêques les plus réticents à l'idée de la proclamation de ce dogme. A défaut de pouvoir frotter ses idées à celles de ses pairs (sous le régime concordataire, les évêques ne pouvaient se réunir librement), il les exposa dans le Concile Œcuménique, où il insistait sur la place revenant à l'épiscopat dans la direction générale de l'Eglise, notamment dans un concile.

 

Le concile était ouvert depuis le 8 décembre 1869, et GINOULHIAC y faisait figure « d'inopportuniste » notable (ainsi appelait-on ceux qui jugeait « inopportune » la proclamation de l'infaillibilité), quand, le 25 février 1870, mourut le cardinal de BONALD, archevêque de Lyon. Sans traîner, dès le 2 mars, Napoléon III, pour renforcer le camp libéral, nomma GINOULHIAC à sa succession. Celui-ci, préconisé seulement le 27 juin, continua au concile de défendre les thèses de la minorité, soutenant que le siège apostolique est composé de tous les évêques, dont le pape est le premier, ou encore, devant la certitude de la proclamation du dogme, demandant que le collège épiscopal fut explicitement associé à l'infaillibilité. Il fit partie de ceux qui s'en allèrent de Rome avant le vote de la constitution Pastor aeternus, le 13 juillet 1870. Il rentra en France, et prit personnellement possession de son siège le 11 août, à Saint-Jean, dans une cérémonie à laquelle les nouvelles des premiers désastres de la guerre donnaient une atmosphère lourde d'inquiétude.

 

Monseigneur GINOULHIAC, qui avait bien entendu envoyé tout de suite son adhésion sans réserve à la constitution Pastor aeternus, prit en mains son diocèse, aidé de l'abbé SERVONNET, son secrétaire général, qu'il amenait de Grenoble et qui était avec lui en communion d'idées. La tâche la plus urgente fut le soutien aux œuvres de guerre, notamment les secours aux prisonniers, dont il s'occupa activement. La paix revenue, il put entreprendre la visite canonique de son vaste diocèse, qu'il parcourut entièrement en trois ans. Il eut là l'occasion de prêcher activement, laissant voir l'homme d'étude, qu'il resta toute sa vie. On sait peu de chose sur son éloquence, j'imagine qu'elle devait correspondre à l'esprit incisif, au caractère méditatif et réservé que nous montre son portrait.

 

Il encouragea et soutint le vœu pour la construction de Fourvière, à laquelle il s'attacha, et veilla à l'application de la liturgie romano-lyonnaise décidée sous Monseigneur de BONALD en 1869 ; mais le rituel qu'il publia dut être retiré. Son œuvre la plus importante fut, en 1873, la réunion d'un synode diocésain (à cette époque, il ne rassemblait que les délégués du clergé), pour la classique mise à jour des règles de vie et de direction des paroisses. Il voulut qu'on y étudiât en outre la question de la division du diocèse (entre Rhône et Loire), celle des études ecclésiastiques, qui lui tenait à cœur, et aussi l'organisation des « associations ouvrières ». On notera, à ce dernier propos, que sa lettre pour le carême de 1874, qui fit quelque bruit, avait pour sujet « le riche qui se perd, le pauvre qui se sauve ». Voyant la question ouvrière en libéral, sous l'angle de la justice et de la charité personnelles, non de l'organisation sociale ou politique, il avait, selon l'antique tradition des prédicateurs, des mots très précis et très durs sur les riches.

 

Retiré de la vie active par la maladie dès la fin de 1874, il mourut à Montpellier, le 17 novembre 1875. Il n'avait pas eu le temps de se rétablir dans la pleine confiance du siège apostolique.

 

 

Henri HOURS

Eglise à Lyon, 1996, n°12