musée du diocèse de lyon

entrée

lette du pape Nicolas IV au Chapitre

(dite « bulle du glaive »)

1289

 

 

 

 

 

Nicolas, évêque serviteur des serviteurs de Dieu.

A nos fils bien aimés le Doyen et le Chapitre de l’Eglise de Lyon.

Salut et bénédiction apostolique.

 

 

 

Le souci de la charge pastorale nous oblige à regarder avec considération votre état et celui de votre Eglise, et à vous apporter le secours en grâce et faveur qui vous sera utile, pensons-nous, à vous et à votre Eglise.

 

Il parvient à nos oreilles que certains, ne songeant point à leur salut et se glorifiant de leurs méfaits, et nombre d’officiers royaux, ne se satisfaisant pas des limites de leur propre juridiction, ne craignent pas, tout respect de Dieu et du Siège apostolique rejeté, de vous infliger parfois de graves injustices et offenses et de vous accabler de charges préjudiciables et de pertes indues, vous, votre Eglise et les autres bénéficiers de votre Eglise, dans leurs personnes et leurs biens, et dans les droits de l’Eglise, les vôtres et ceux des vôtres.

 

Nous donc, à qui le souci de toutes les Eglises a été confié par décision d’En-Haut, nous cherchons à faire en sorte que vous et les bénéficiers de votre Eglise soyiez munis par ce Siège d’une autorité plus appropriée et plus efficace, pour pouvoir conserver et protéger vos biens et vos droits, avec ceci :

 

Nous vous concédons par grâce spéciale le glaive spirituel

contre ceux qui commettent injustices, préjudices, agitations, entraves,

où que ce soit,

de quelque prééminence, dignité, condition ou état soient-ils,

et ce librement, par vous-mêmes, par un autre ou plusieurs,

toutes les fois que vous le pourrez et quand vous le jugerez utile.

 

Nonobstant lettres, privilèges ou indulgences de notre très cher fils en Jésus-Christ Philippe illustre roi des Français, ou de ses prédécesseurs rois de France, ou des comtes, barons, nobles et autres, quelque soit leur teneur, leur forme, ou l’expression donnée aux mots, néanmoins nous voulons que ce glaive-là vous reste durablement et fermement, d’une manière ou d’une autre.

 

Pourtant il ne saurait être fait mention spéciale de ces lettres, privilèges et indulgences, de science sure, mot à mot, dans tous leurs contenus, et aussi des privilèges, lettres et indulgences concédées à l’avenir au Roi et aux autres, sans faire aussi mention, pleine et expresse, de cet indult, avec tout son contenu, mot à mot, et aussi mention de l’Eglise de Lyon.

 

Nous ne voulons pas que cette concession soit étendue aux personnes du Roi et de sa conjointe, ni à la Chapelle royale, en aucune façon.

 

Que personne donc ne se permette d’enfreindre cet écrit de notre concession ou de s’y opposer par une audace téméraire. Et si quelqu’un prétendait y attenter, qu’il sache qu’il encourrait l’indignation du Dieu tout-puissant et des bienheureux Pierre et Paul.

 

Donné à Rieti, le 15 des calendes d’août, en l’an 2 de notre pontificat.

 

 

 

 

 

NOTES

 

15 des calendes d’août : 18 juillet

an 2 de notre pontificat : 1289, Nicolas IV ayant été élu pape en 1288

 

 

 

DOCUMENTS

 

-      Texte latin

o    MENESTRIER Claude François, 1696, Histoire civile ou consulaire de la ville de Lyon

C’est en vertu de ce privilège que le Chapitre fit mettre à côté de ses armoiries une épée nue droite et de l’autre une crosse pour marque de sa double juridiction.

(MENESTRIER, p.358)

 

-      Bulle Unam sanctam du pape Boniface VIII, datée du 18 novembre 1302, établira la doctrine des deux glaives :

L’Eglise est une, sainte, catholique et apostolique ; nous sommes tenus de le croire et de l’admettre d’une foi pressante, nous le croyons fermement, nous le confessons simplement. Hors d’elle, point de salut ni de rémission des péchés. () En elle et sa puissance deux glaives : le spirituel et le temporel, nous enseignent les Evangiles. En effet les apôtres disent : voici là deux glaives (Luc 22/38), c’est-à-dire dans l’Eglise ; après les paroles des apôtres, le Seigneur répond : c’est trop mais assez. Certainement celui qui dit que le glaive temporel n’est pas au pouvoir de Pierre comprend mal la parole du Seigneur qui proclame : Remets ton épée au fourreau (Mtt 26/52). Donc l’un et l’autre sont au pouvoir de l’Eglise, le glaive spirituel et le glaive matériel. Mais l’un est manié pour l’Eglise, l’autre par l’Eglise, l’un par la main du roi et du soldat, l’autre par celle du prêtre, mais selon la volonté et la patience du prêtre. Eh bien il convient que le glaive soit sous le glaive, et que l’autorité temporelle sous soumise au pouvoir spirituel.