musée du diocèse de lyon

Entrée

Esprit missionnaire

entre 1930 et 1950

 

 

Entre les deux guerres, Lyon restait l'un des premiers diocèses missionnaires. Abritant 4 % de la population française, il fournissait 10 % des sommes recueillies en France par la Propagation de la Foi. En 1935 encore, 6,25 % des prêtres missionnaires français, et 5 % des religieuses, venaient de lui.

 

La Propagation de la Foi publiait ses Annales et son hebdomadaire Les Missions catholiques, qu'accompagnaient L'Echo des Missions Africaines de Lyon, et Pôles et Tropiques des Oblats de Marie. Les Jésuites qui, dans leurs Lettres de Fourvière et leur Courrier France-Levant, donnaient des nouvelles de leurs missions dans la vice-province d'Orient, lancèrent en 1935 Jésuites missionnaires, devenu en 1947 Missi, ouvert à tous les problèmes de la mission. Outre les Pères des Missions Africaines, avec leur suggestif Musée missionnaire, et les religieuses de Notre-Dame des Apôtres, sociétés proprement lyonnaises de même que les Maristes, des instituts entièrement ou en partie missionnaires avaient à Lyon de fortes installations : jésuites, religieuses de Notre-Dame des Missions, Franciscaines Missionnaires de Marie, et même Pères Blancs et Sœurs Blanches.

 

Où qu'il portât les yeux, le jeune catholique lyonnais ne pouvait manquer de rencontrer la mission, dont l'idée lui devenait familière.

 

Sur cette plante vigoureuse, pouvait se greffer le nouvel esprit missionnaire du pontificat de Pie XI, illustré par la consécration, en 1926, des premiers évêques chinois et par la création, au même moment, de l'Action catholique spécialisée, car cela ne faisait qu'un. L'Eglise n'est pas un corps étranger plaqué du dehors ; en toutes les nations, en toutes les cultures, elle doit se naturaliser, s'enraciner, devenir partie intégrante et, à la fin, autochtone. Deux Belges, le lazariste V.Lebbe et le jésuite P.Charles, furent les hérauts les plus connus de cette missiologie rénovée. Les Lyonnais reçurent plusieurs fois le second dans leurs murs. Ils eurent surtout l'occasion de fréquenter à leur aise le P. Francis Aupiais, des Missions Africaines, qui, en Afrique, s'était convaincu de la nécessité pour l'Eglise de reconnaître comme siennes les valeurs naturelles portées par les civilisations non-chrétiennes, afin de pouvoir à son tour se greffer en elles et les christianiser.

 

 


Lyon était prêt à accueillir une telle réflexion. Le diocèse connaissait alors une étonnante richesse de vie intellectuelle, sur des lignes diverses et liées entre elles : pastorales paroissiales avec l'abbé Rémillieux à Saint-Alban, réflexions d'action sociale autour de Gonin et de la Chronique, prière pour l'unité guidée par l'abbé Couturier. Théologie, philosophie morale faisaient l'objet de recherche fondamentale en des cercles nombreux : Faculté de Théologie, Séminaire Universitaire, scolasticat jésuite de Fourvière, Société lyonnaise de Philosophie, Groupe lyonnais d'études médicales, tout cela formait un milieu où hommes et idées se brassaient dans un esprit commun.

 

Vicaire de l'abbé Rémillieux, l'abbé Duperray pensait déjà à la Chine, où il devait aller plus tard ; en attendant, il s'occupait du foyer franco­-chinois du fort Saint-Irénée. Il accueillit à Saint-Alban un groupe d'étudiantes de la Ligue Missionnaire des Etudiants de France, fondée à Lille en 1931 et à Lyon en 1932. De ce foyer de réflexion et de prière missionnaire l'abbé Monchanin qui, lui, pensait à l'Inde, devint l'inspirateur : lier mission et prière contemplative ; contribuer par son travail intellectuel à enraciner l'Eglise dans la culture des peuples, afin que le christianisme soit non plus traduit, mais pensé en chinois, en hindou, comme il le fut jadis en grec ou en latin ; aider à la naissance d'églises autochtones.

 

Monchanin quitta Lyon en 1938, pour la Société d'Aide aux Missions, à Louvain, puis de là pour l'Inde. Le groupe se dispersa, qui dans les ordres contemplatifs, qui dans des postes de laïcs missionnaires. Un autre se reconstitua en 1943, à l'ombre de la Propagation de la Foi, moins dynamique, mais encore fécond. C'est à Lyon qu'en 1945, la L.M.E.F. réunit les mouvements de laïcs missionnaires, en des journées dont les messes étaient dites à Saint-Alban.

 

En 1941, Mgr Lavarenne fonda aux Facultés catholiques une chaire des Missions, inaugurée par une conférence sur « Le Fondement théologique des missions », donnée par le P. de Lubac, dont la pensée avait tant aidé l'abbé Monchanin et ses amis. Les idées nouvelles commençaient de pénétrer dans le public. Trois ans plus tard, le relais allait être repris à Paris, par le Cercle Saint Jean-Baptiste, autour du P.Daniélou, que son séjour au scolasticat de Fourvière avait sans doute aidé à mûrir en lui ces pensées.

 

 

Henri HOURS

Eglise à Lyon, 1995, n°3