musée du diocèse de lyon

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Mgr Camille de Neuville

1606-1693

 

 

 

Le long épiscopat de Monseigneur Camille de Neuville de Villeroy (1653-1693) occupe, dans l'histoire du diocèse, une place bien caractérisée : après le foisonnement d'initiatives et de fondations de « l'invasion mystique » (environ 1610-1640), il fallait un temps de mise en ordre, de réalisation pratique ; ce fut l'œuvre de ce grand archevêque.

 

Son père, Charles d'Alincourt, marquis de Villeroy, était gouverneur des provinces de Lyonnais, Forez, Beaujolais. Destiné dès l'enfance à l'état ecclésiastique, le jeune Camille avait très tôt cumulé, comme il était, hélas, courant, plusieurs bénéfices, dont les abbayes lyonnaises d'Ainay et l'Ile-Barbe. Cela ne l'empêcha pas, quand son frère aîné succéda à leur père en 1642, de recevoir de lui sa lieutenance générale et donc d'exercer effectivement en son nom le gouvernement des provinces. Fidèle à la Couronne, selon la ligne familiale, il sut les conserver à l'écart des troubles de la Fronde ; ce fut peut-être ce qui lui valut l'élévation au siège de Lyon.

 

Pendant quarante années, il fut donc à la fois gouverneur et archevêque, ce qui ne troubla guère les contemporains, en un temps où l'union du trône et de l'autel allait de soi. Ce double pouvoir lui conféra, dans la ville et le gouvernement, une autorité exceptionnelle : durant tout ce temps, rien ne se fit, en aucun domaine de la vie publique, sans sa volonté ou au moins son consentement. Autorité de commandement, mais aussi morale due à la parfaite dignité de sa vie, à sa foi, à son zèle apostolique (il résida sur place et n'alla presque jamais à Versailles).

 

Il s'entoura tout de suite d'un petit nombre d'hommes de confiance : vicaires généraux, membres de l'officialité, conseillers particuliers. Retenons les noms du P. de La Chaize, le célèbre jésuite, de Charles Démia, que nous retrouverons, et surtout de son demi-frère Antoine de Neuville, son collaborateur intime et discret, avec qui la communauté de pensée était étroite et qu'on retrouve derrière toutes les grandes entreprises pastorales.

 


 

En élargissant le cercle, il pouvait compter sur l'activité convergente de divers corps : les jésuites, dont les collèges de Lyon et de Roanne diffusaient piété et culture, les capucins, voués à la prédication, les dominicains dont le couvent de Notre-Dame de Confort abritait des travaux théologiques ; un peu plus tard apparurent les joséphistes de Jacques Crétenet et les prêtres de la Mission. N'oublions pas la Compagnie du Saint-Sacrement, cette société de laïcs qui réalisa, inspira ou tout au moins soutint toutes les grandes œuvres de l'archevêque. Ce n'est donc pas un homme seul qui gouverna le diocèse, mais un groupe d'hommes fermement dirigé et œuvrant dans le même sens : évangélisation, éducation, moralisation, mise en place de structures de base.

 

Ce diocèse, il commença par le connaître et s'en faire connaître en tant qu'évêque. Sacré le 29 juin 1654, il se mit en route dès le 30 juillet, pour une visite canonique qui allait s'étaler sur six années. Après quoi il renforça l'autorité des archiprêtres en leur donnant mission de poursuivre régulièrement ces visites. De plus, il remit en vigueur le synode annuel des curés, pour lequel il fit construire la grande salle de l'archevêché. Devenant plus proches de l'archevêque et de ses auxiliaires, apprenant à se connaître entre eux, les membres du clergé commencèrent de former un corps diocésain. Une institution nouvelle devait y contribuer par dessus tout : le séminaire, créé dans la ligne du Concile de Trente, dont les débuts modestes devaient donner tout leur fruit au siècle suivant.

 

Outre les diverses fondations d'assistance et de redressement moral dues à la Compagnie du Saint-Sacrement, l'archevêque patronna directement l'œuvre de la Propagation de la Foi, destinée à favoriser la conversion des protestants (la révocation de l'Edit de Nantes, qui réintégrait la France dans la logique du système européen, fut accueillie sans état d'âme). Le plus grand succès, et le plus durable, devait revenir à l'organisation diocésaine des Petites Ecoles, œuvre de Charles Démia, promoteur de l'Officialité, qui fonda à cet effet une compagnie de maîtres et surtout, en 1680, les Sœurs Saint­-Charles.

 

A la mort de Camille de Neuville, en 1693, tout n'avait pas atteint son plein développement, certes, mais le diocèse était équipé de façon à conduire jusqu'aux populations des bourgs et des villages la réforme catholique lancée par le concile de Trente et qui n'avait encore touché que les villes.

 

 

Henri HOURS

Eglise à Lyon, 2002, n°12