Adélaïde Perrin
1789-1838
Louise-Adèle,
dite Adélaïde, Perrin naquit à Lyon, le 11 avril 1789, dans une famille de bourgeoisie
moyenne et de fortune modeste, dont la condition devint médiocre après la mort prématurée
du père. Ses deux frères devaient plus tard être fort connus, tous deux membres
de l'Académie de Lyon : Théodore, médecin, qui devait faire souche, et Louis,
célèbre imprimeur.
Jeune
fille, Adélaïde passait le plus clair de son temps, d'une part, à s'occuper d'enfants pauvres, de l’autre, à visiter les malades, à
domicile et dans les hôpitaux, quand,
en 1819, elle fut sollicitée pour prendre en charge une jeune fille qui venait
de subir un long traitement à l'Hôtel-Dieu, mais restait incurable. Il n'y avait
rien, alors, pour les cas de ce genre. Elle refusa, d'abord : vivant petitement
avec sa mère, elle ne se voyait pas assumer une telle responsabilité. Ebranlée
par l'insistance de la solliciteuse, peut-être une « Charlotte »,
émue par la confiance que mettait en elle la jeune malade, elle réussit à faire
admettre cette dernière à l'hospice Saint-Polycarpe, et à payer sa
petite pension en frappant à quelques portes. Mais ce n'était qu'un répit, car
l'hospice, lui non plus, n'était pas fait pour les séjours de longue durée.
Trois autres jeunes malades étaient dans le même cas. Adélaïde put alors
louer une chambre à Saint-Georges
et y installer ses protégées. Début classique de nombreuses fondations.
La vie commença,
au jour le jour, et d'un secours sur l'autre. Les malades faisaient les petits
travaux dont elles étaient capables et qu'Adélaïde s'efforçait de faire payer
un prix convenable : « Il
conviendrait mieux, disait-elle, de donner assez à l'ouvrier pour qu'il
pût travailler avec ardeur, que de venir l'humilier par une aumône qui finit
par l'accoutumer à attendre son pain de la charité au lieu de l'attendre de
ses bras ».
En dépit de
la précarité de ses ressources, elle parvint à installer ses protégées, qui maintenant étaient huit, au
dernier étage de la maison de la Manécanterie, dans laquelle elle logeait
elle-même. Elle organisa alors un ouvroir de dames qui travailla pour les
jeunes malades, et finit par se constituer en conseil, pour donner à l'œuvre une structure stable et solide. On
soupçonne que, dans cette étape décisive, Adélaïde Perrin fut aidée par la
Congrégation de Demoiselles, alors sous la direction spirituelle du célèbre
abbé Linsolas, dont elle était membre et qu'elle présida même de 1827 à 1829. En
cette période, les progrès furent importants : des dons venus de sources
diverses, y compris de la municipalité, de la Dauphine, du Roi lui-même,
permettaient d'entretenir trente-cinq malades (chiffre de 1829), dont s'occupait un conseil de
quatorze dames entre lesquelles les tâches étaient réparties. L'établissement
avait traversé la Saône et trouvé à se loger, d'abord rue Vaubecour, en location, puis dans la
maison Capelin qu'on put acheter, rue de l'Abbaye d'Ainay, à l'emplacement de laquelle devait s'élever plus
tard l'édifice actuel.
La
direction intérieure, hospitalière aussi bien que spirituelle, devenait lourde,
et il apparaissait qu'une communauté serait mieux indiquée pour s'en charger.
Les Sœurs de Saint-Joseph, restaurées à Saint-Etienne puis à Lyon par la Mère Fontbonne, connaissaient alors un succès
grandissant, et étaient intervenues en plusieurs occasions semblables. En 1825
elles s'installèrent dans la maison. Mais cela ne réussit pas : les religieuses n'étaient pas
venues pour se voir dicter leur conduite par les laïques ; Adélaïde Perrin et
ses amies ne les avaient pas appelées pour se voir évincées de la direction
générale d'une œuvre qu'elles avaient créée de rien. En des organisations de ce
genre, de tels conflits ne sont pas exceptionnels. Les religieuses se retirèrent donc.
Suivirent quelques années moralement pénibles. L'archevêché exerçait une
pression insistante pour que les laïques cédassent la direction ; des dissensions
divisaient le conseil et même les demoiselles à qui avait été confiée la direction quotidienne, et dont quelques-unes voulaient entrer chez
les Sœurs de Saint-Joseph ; en ville et chez les bienfaiteurs, cela faisait
mauvais effet. Et pourtant, l'œuvre continuait de croître lentement, sous la
surveillance médicale, toute bénévole du docteur Perrin et de son ami J.-P.
Pointe.
Adélaïde
Perrin mourut le
15 mars 1838, laissant un grand vide. Le conseil confia alors la maison aux
Filles de la Charité qui, on ne sait pour quelle cause, n'y restèrent que six
mois. En 1839, finalement, les religieuses de Saint-Joseph furent à nouveau
appelées, cette fois sans concurrence, et s'y établirent définitivement. A la
mort de la fondatrice, la maison abritait cinquante malades, le nombre devait
doubler en moins de dix ans.
Henri HOURS
Eglise
à Lyon,
1996, n°2