le
cardinal Coullié et la Petite Eglise
1900-1905
document A
ARCHEVECHE
DE LYON
†
Lyon, le 22 février
1900
(En la fête de la
chaire de saint Pierre.)
MES
TRES CHERS FRERES,
Je
suis chargé d'accomplir auprès de vous une très douce mission.
Le
Souverain Pontife Léon XIII se préoccupe de vos âmes ; son cœur souffre en les
voyant privées des sacrements, sources de la grâce divine, si nécessaires pour
parfaire l'œuvre de notre salut. Inspiré par une bonté toute paternelle, le
Saint-Père vous tend les bras et vous appelle à la pratique de la vie
catholique, sous sa conduite si sûre, dans l'obéissance la plus filiale.
Je
viens au nom de Sa Sainteté vous adresser cet appel. Vous ne voudriez pas y
fermer l'oreille, car il est, en vérité, l'appel de Dieu.
Et,
en effet que reste-t-il, mes bien chers Frères, entre vous et la sainte
hiérarchie de l’Eglise Catholique, qui puisse vous être encore une barrière
infranchissable ?
Les
faits et les controverses qui furent, à l'origine, la cause de votre
séparation, sont bien loin aujourd'hui, effacés par le temps et par la
succession des événements qui se sont précipités au cours du siècle.
A
cette heure, la situation est tout autre qu'alors. La lutte est entre les
croyants et les incroyants, entre les disciples de Jésus-Christ et ceux qui lui
refusent leur foi et leur amour.
Vous
avez, durant ces cent années écoulées, conservé d'une admirable manière la foi
à la doctrine de la sainte Eglise, la fidélité aux commandements de Dieu, et
même, autant qu'il vous paraissait possible, la fidélité aux commandements de
l'Eglise.
Mais
hélas ! privés des sacrements institués par Notre-Seigneur Jésus-Christ pour
dispenser la grâce, vous savez bien que vous laissez s'atténuer dans vos âmes
la vie surnaturelle, que la sainte Eucharistie surtout doit nourrir. Vous savez
bien que la force d'en-haut ne vous est plus dispensée par le sacrement de
l'Esprit-Saint, et que vos familles elles-mêmes ne sont point établies sur les
bénédictions divines, authentiquement données par le prêtre.
Et
puis, ne voyez-vous pas, mes très chers Frères, que l’Eglise représentée par
notre Saint-Père le Pape Léon XIII est la véritable Eglise de Jésus-Christ ?
Oui,
il vous en souvient, c'est le divin Maitre qui établit son Eglise sur
l'inébranlable fondement de la Papauté : « Tu es Pierre, disait-il au chef des
apôtres, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les portes de l'enfer ne
prévaudront point contre elle... Et voici que je suis avec vous jusqu'à la
consommation des siècles ».
La
parole de Jésus-Christ ne saurait tromper. L'Eglise de Jésus-Christ est vivante
aujourd'hui ; elle vivra demain et jusqu'au dernier jour du dernier des
siècles. Où est-elle donc cette Eglise, si elle n'est point celle qui est
visible à tous les yeux, répandue sur toute la terre et tout unie sous
l'obéissance de Léon XIII, le successeur de Pierre ?
Et
votre Archevêque, établi canoniquement le successeur des Pothin, des Irénée,
des Eucher, de toute cette admirable lignée des évêques de Lyon, dont vous vous
glorifiez, autant que nous nous en glorifions nous-mêmes, oui, il est bien le
successeur des apôtres, et, il le sent dans les ardeurs de son amour pour vos
âmes, il est bien véritablement vote Père !
Venez
donc ! mes très chers Frères. Avec le grand Pontife qui gouverne la sainte
Eglise, nous vous ouvrons les bras. Venez! en obéissant à Léon XIII, notre père
bien-aimé, comme au vicaire de Jésus-Christ, en reconnaissant votre Archevêque
comme représentant le Pape dans le diocèse de Lyon, vous ferez un acte de foi
et d'obéissance qui vous ouvrira toutes les sources de la grâce ; et, dans ce
diocèse heureux, il n'y aura plus qu'un troupeau et qu'un pasteur.
Courage
donc et confiance, mes très chers Frères ; bientôt, je l'espère, appelé par
vous, je vous porterai avec toute l'affection de mon cœur, la bénédiction que
Léon XIII aime à répandre sur ses enfants fidèles.
Agréez,
mes très chers Frères, l'expression de cet ardent désir aussi bien que de mes
sentiments tout paternels en Notre Seigneur.
†
PIERRE card. COULLIÉ, archev. de Lyon.
(Semaine
religieuse du diocèse de Lyon, 1906 p.305-306)
document B
ARCHEVECHE
DE LYON
†
LYON, le 22
février 1905.
CHER
MONSIEUR LE CURE,
Bien
que le silence ait été la réponse faite à la lettre pastorale que j'ai
adressée, au nom du Saint-Père, aux membres de la Petite Eglise, je ne les
oublie pas ; car ils sont réellement mes enfants, et leurs âmes me sont chères
; je dois et je veux travailler à leur salut.
Comme
votre paroisse abrite le plus grand nombre de ces familles, je viens de nouveau
vous demander d'être auprès d'elles l'interprète de mes désirs et le délégué de
mes pouvoirs pour les ramener au bercail.
Ils
savent déjà avec quelle facilité ils peuvent entrer dans la vie complètement
chrétienne. Le Saint-Père ne demande aucune allusion au passé, un peu de bonne
volonté et c'est tout.
En
ce moment où la sainte Eglise est persécutée, n'est-ce pas l'heure de la
consoler par un retour généreux qui sera une réponse à l'impiété, car je sais
que tous ces fils ont la foi et veulent la garder.
Et
puis, quelle consolation et quelle force pour eux de retrouver les sacrements
et toutes les joies de nos fêtes religieuses !
Si
vous le pouvez, dites-leur tout cela, dites-leur que je les aime, que je
voudrais les voir et les bénir.
J'abandonne
ces vœux à votre charité sacerdotale. Je bénis tous vos efforts et votre zèle
en vous renouvelant l'expression de mon respectueux et paternel dévouement.
†
PIERRE, card. COULLIE, arch. de Lyon.
(Semaine
religieuse du diocèse de Lyon, 1906 p.306)