prières à Fourvière pour la fin des pluies
1753, 1757
Le
Cardinal de TENCIN, archevêque de Lyon de 1740 à 1758, ordonne dans son
mandement du 7 juillet 1753 qu’une procession se fasse à Fourvière le vendredi
27 juillet 1753 pour demander la fin des pluies.
Le public fut
confirmé, par les événements heureux qui ont suivi, qu’il ne recourt jamais
inutilement à la Mère de Dieu et à la protectrice de la France et des Lyonnais.
Le Chapitre a cru devoir déposer dans ses Archives ce monument de la piété de
Son Éminence et de son Clergé, et de la confiance des peuples envers la Sainte
Vierge honorée d’un culte si spécial, si étendu, si constant, dans l’église de
Fourvière.
En témoignage de
quoi et pour édifier la postérité, Messieurs les Sacristain, Chantre, et
Chanoines de l'Église de Fourvière ont signé le présent acte à Lyon le douzième
août 1753.
Ainsi signé :
Carrier, Sacristain-Chanoine et Curé de Fourvière, Rousselet, Verdelet, Altinier, Gourgouliat, Potot, Coquiers.
(Actes capitulaires
de Fourvière, Cahier 29)
Le
Cardinal de TENCIN dans son mandement du 4 juin 1757 ordonne à nouveau qu’une
procession se fasse à Fourvière le mardi 7 juillet 1757 pour faire cesser les
pluies.
Le mardi 31 mai
dernier, la pluie commença à tomber très abondamment, et n'ayant pas
discontinué pendant plusieurs jours, le Rhône et la Saône débordèrent avec
impétuosité et ravagèrent tous leurs rivages ; les moindres ruisseaux devinrent
des torrents furieux qui portèrent la désolation dans les campagnes. Dans une
saison et les circonstances où la récolte en tout genre donnait les plus
grandes espérances, les alarmes publiques engagèrent S. E. à ordonner par son
mandement du 4 juin suivant de dire à la messe l'oraison ad coercendam imbrium
abundiantiam pendant quinze jours ; mais la pluie
n'ayant pas cessé, et les blés et les foins ayant été renversés par la grande
quantité d'eau qui les submergeait, la consternation devint générale. MM. les
Prévôt des Marchands et Échevin se rendirent au Château d'Oullins pour supplier
S. E. d’ordonner des prières plus solennelles comme celles des Quarante heures ou
une procession générale. La proximité de l'octave du Corps de Dieu ayant fait
préférer la procession, S. E. l'indiqua pour le 7 du même mois dans l'église de
Fourvière ; elle se rappelait que celle qu'elle avait fait faire en conséquence
de son mandement du 7 juillet 1753 dans la même église, avait rempli son
attente et la confiance du public ; elle fit afficher son mandement où les
motifs les plus pressants et touchés avec une onction pathétique exposent le
danger où l’on se trouvait.
La procession, composée
du Clergé de l'Église Primatiale, de celles de Saint-Just, de Saint-Paul et de Saint-Nizier, des religieux dans l'ordre ci-après suivant
leur rang d'ancienneté d'établissement dans la ville : les Augustins de la
Croix-Rousse étaient à la tête de la procession ; viennent ensuite les
religieux du Tiers Ordre de la Guillotière, les
Capucins des deux couvents, les Cordeliers de l'Observance, les Minimes, les
Augustins de Saint-Vincent, les Carmes des Terreaux, les Cordeliers de
Saint-Bonaventure et les Dominicains qui précédaient immédiatement le Clergé
séculier ; le Consulat en corps le suivait avec un grand nombre d'arquebusiers.
La procession partit de l'Église primatiale à trois heures et demi et à l'issue
des vêpres ; on chantait les Psaumes pénitentiaux ; on arriva à cinq heures
seulement à Fourvière à cause du concours prodigieux des fidèles de l'un et de
l'autre sexe qui se rendait en foule de toute part pour y assister ; il y avait
une garde aux deux portes de l'Église et de la Chapelle pour empêcher que le
peuple ne les emplit avant que le Clergé y fût arrivé ; les religieux furent
placés dans le chœur des Chanoines et dans la nef qui le précède et les
Chapitres dans les chapelles anciennes et nouvelles de la Sainte Vierge. Plus
de cinquante mille personnes avaient assisté à la procession ; mais ne
pouvant pénétrer jusqu'à l’église, une grande partie resta à la place des
Minimes, une autre à celle de l'Antiquaille, une autre au plâtre et dans le
Cloître de Fourvière. La piété du Clergé, la modestie des fidèles se
disputèrent à l'envi le mérite de l'édification soit en allant, soit au retour,
ce qui formait un spectacle admirable et digne de la ferveur de la primitive
Eglise. La procession rentra à Saint-Jean à six heures et trois quarts dans
l'ordre qu'elle était montée. Il n'y eut aucun citoyen qui se dispensa de venir
pendant l'Octave faire sa prière avec effusion de cœur et son action de grâces
avec empressement dans l'église de Fourvière et n'ayant pu se trouver à la
procession. Avant de partir et dans la durée de la procession le ciel fut
chargé de nuages qui annonçaient l'orage le plus affreux ; mais la pluie resta
comme suspendue, il ne tomba pas une goutte d'eau ; et bientôt après le
vent du nord ayant rendu la sérénité, les prés et les blés rétablirent dans
leur état naturel, la chaleur succéda et fit renaitre des espérances encore
plus flatteuses que celles qu'on avait eues avant le désastre ; les denrées
dont on avait déjà augmenté les prix retombèrent au taux précédent ;
l'abondance a secondé les vues du Pasteur et des peuples qui ont remercié le
Seigneur des bénédictions qu'il avait daigné répandre sur les biens de la terre
par l'intercession de la Sainte Vierge.
(Actes capitulaires
de Fourvière, Cahier 33)