musée du diocèse de lyon

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Compagnie de la Propagation de la foi

statuts

1660

 

 

 

 

 

(extraits de la délibération du 21 juin 1660)

 

 

 

Institution, règles et statuts de la Compagnie de la Propagation de la foi établie à Lyon par Monseigneur l'illustrissime et révérendissime archevêque de Lyon sous le titre de l'Immaculée Conception de la bienheureuse Vierge Marie, avec la Bulle des Indulgences accordées par Notre Saint Père le Pape Alexandre VII à la dite compagnie.

 

 

 

Chapitre I

En forme d’avant-propos et

De la fin de l’institution de la Compagnie de la Propagande de la Foi

 

 

Dieu qui ne manque jamais des moyens nécessaires pour ramener les errants et tous les dévoyés de la foi à la connaissance de la vérité et à son Evangile, par l'ardent désir qu'il a toujours eu de toute éternité, conformément à sa bonté, de sauver tous les hommes, ne voulant que personne périsse, ainsi qu'il a fait prononcer autrefois à ses plus fameux oracles, ayant suscité depuis plusieurs années quantités de personnes zélées, puissantes et courageuses, pour entreprendre l'avancement de sa gloire par l'étendue de la foi en faveur de tant de pauvres brebis égarées du véritable troupeau de l'Eglise, «  hors laquelle il n'y a point de salut ». Cette même providence qui avait inspiré un si généreux dessein fit concevoir en même temps dans l'esprit de Monseigneur l'archevêque une forte inclination d'y faire paraître son zèle ordinaire, ce prélat ne pouvant avoir de plus sensible contentement que lorsqu'il s'agit d'autoriser tous les moyens qui servent à procurer la gloire de Dieu et le salut des âmes.

C'est ce qui l’a obligé à contribuer de tout ce qui serait de son autorité et de sa protection, pour consentir à l'établissement d'une si sainte, si illustre et utile compagnie qui ne regarde en général que la plus grande gloire de Dieu et le salut des âmes.

Et qui se propose en particulier (pour sa fin unique ou principale) d'employer tous ses soins pour travailler puissamment avec ardeur, zèle et charité, à la confirmation des catholiques (particulièrement de ceux qui sont en danger de se pervertir), à la conversion des hérétiques ou autres personnes dévoyées de la foi.

Et de pourvoir ensuite à tous les moyens nécessaires soit pour arriver à cette fin, soit pour les confirmer dans la foi, soit enfin pour les employer ou les faire subsister, s'ils se trouvent dans la nécessité.

 

 

 

Chapitre II

Du nombre des Officiers et de ceux qui composeront la Compagnie

 

 

Comme une armée ne peut se maintenir dans le bon ordre que sous la bonne conduite d'un chef accompagné de ses officiers, de même la Compagnie de la Propagation de la Foi étant comme une armée dressée, non pas pour faire une guerre sanglante à la personne des hérétiques mais seulement à leurs erreurs, et pour défendre les intérêts de la foi, il a fallu pour son affermissement qu'elle fut conduite sous l'autorité d'un chef et des officiers.

Elle sera composée de treize officiers à l'imitation de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de ses douze apôtres qui ont sacrifié leur sang, leur vie et tous les travaux pour la conversion des âmes et pour établir l'empire de la foi par toute l'étendue de la terre.

Il y aura un directeur, un sous-directeur, un administrateur, un modérateur des conférences de controverses, un trésorier, sept conseillers et le secrétaire.

Le nombre de ceux qui composeront la compagnie sera indéterminé. L'on y pourra recevoir indifféremment tous ceux qui auront les qualités requises.

Il y en aura quelques-uns qui seront reçus en qualité d'associés qui ne pourront entrer aux assemblées.

Il y aura une congrégation des dames associées à la compagnie qui jouiront des mêmes privilèges et indulgences dont il sera aussi parlé en son lieu.

 

 

 

Chapitre III

De l'emploi des Officiers

 

 

Du Directeur

 

Monseigneur l'Archevêque s'étant réservé, et à ses successeurs archevêques, la nomination de cette charge, a voulu donner à la naissance de cette compagnie ces preuves toutes particulières de son zèle et de sa protection, par le choix qu'il a fait de M. l'Abbé de Saint-Just, son vicaire général, ce qui oblige à considérer cette charge comme la première et la principale de toutes qui ne peut être occupée que par des ecclésiastiques qui soient libres, éminents en vertu, doctrine, sainteté, dignité et très zélés pour ce qui regarde la gloire de Dieu et la conversion des hérétiques.

Son emploi sera de présider à toutes les assemblées. Il en fera l'ouverture par l'invocation du Saint-Esprit et il les finira par les prières qui seront prescrites ci-après.

Il prendra les voix sur les propositions que l'on aura mises en délibération, particulièrement des officiers, chacun selon son rang, au sentiment desquels pour l'ordinaire la compagnie se conformera (sinon que ce fut pour donner plus de lumière et d'éclaircissement à ce qui aura été proposé).

Quand l'administrateur, son substitut, ou autres de la compagnie auront proposé ceux qui seront dans le dessein de se convertir, ou qui auront besoin d'être confirmé dans la foi, il nommera quelque ecclésiastique de la compagnie pour avoir le soin de les instruire, de les assister en toutes leurs nécessités spirituelles, qui feront le rapport de temps en temps aux assemblées de l'état de leurs dispositions.

Et pour ce qui regarde l'emploi ou leurs nécessités temporelles, il les renverra aux soins de l'administrateur ou de son substitut.

Il fera lire tous les premiers lundi de chaque mois par le secrétaire le catalogue des noms des nouveaux convertis, pour s'informer s'ils persévèrent dans la foi, de leur vie, mœurs, emploi, demeure, de quoi l'ecclésiastique qui en sera chargé, fera rapport avec l'administrateur ou son substitut.

 

 

Du Sous-Directeur

 

Le Sous-Directeur fera la charge du Directeur en son absence. Et lorsqu'il sera présent, il tiendra toujours le premier rang après lui et donnera le premier son avis.

Il sera élu par la compagnie.

 

De l'Administrateur

 

Il n'y a point de doute que la charge de l'administrateur ne soit la plus importante de toutes puisqu'elle s'étend à prendre le soin de toutes les affaires qui regardent la fin que la compagnie s'est proposé. C'est pourquoi l'on jettera toujours les yeux au temps des élections sur une personne agissante, zélée, assidue et intelligente aux affaires de la compagnie.

Ce sera à l'administrateur de proposer dans les assemblées ordinaires ou extraordinaires toutes les nécessités temporelles ou spirituelles des nouveaux convertis.

Il signera avec le secrétaire tous les billets, mandats, commissions des charités, qui auront été résolus par la compagnie en faveur des nouveaux convertis…

Lorsque la compagnie aura loué ou acquis quelques maisons pour loger les nouveaux convertis, l'administrateur et son substitut en auront le soin et la direction entière...

Il passera tous les actes en son nom, comme cédules, obligations, ou autres instruments à l'avantage de la compagnie.

Il soutiendra les instances intentées ou à intenter qui regarderont le Bien et l'avancement de la compagnie.

 

Le substitut fera sa charge à son absence dans les assemblées.

 

 

Du Modérateur des Conférences de Controverses

 

Cette charge est aussi l'une des plus importantes et des plus utiles pour la fin que la compagnie s'est proposée et qui oblige celui qui la possède à des qualités toutes particulières.

Il sera bien versé aux matières de controverses, au sens et à l'intelligence de l'Ecriture Sainte, particulièrement selon l'interprétation des Pères des cinq premiers siècles et des conciles généraux.

Il n'aura pas une médiocre suffisance dans les sciences de la philosophie et de la théologie comme aussi de l'intelligence des langues grecque et hébraïque.

Cet exercice, qui regarde particulièrement les ecclésiastiques et autres personnes de lettres, se pratiquera la dernière heure des assemblées, c'est-à-dire après les affaires de la compagnie, que si le temps ne le permet pas, on pourra choisir quelque jour sur semaine pour entretenir un si noble exercice qui ne tend à d’autre fin que d’exercer les ecclésiastiques de la compagnie ou autres personnes qui souhaiteront de s'appliquer aux matières de controverse.

Pour observer quelque ordre, l'on y pourra procéder par deux voies, la première, que l'on suivra le plus souvent, sera de faire un discours sur quelque point de controverses que le modérateur choisira et celui qui en sera prié à la dernière conférence par le modérateur établira premièrement la croyance des catholiques et de l'Eglise, soit par l'Ecriture, soit par les Pères et les conciles, soit enfin par la théologie, philosophie et autres preuves et raisonnement.

En second lieu, il établira la croyance des hérétiques avec toutes les preuves et raisons, qu'il tâchera de détruire par des preuves tirées de l'Ecriture, des Pères, des conciles et de la théologie ou philosophie, en sorte que la vérité du point de controverse paraisse entièrement éclaircie en faveur des catholiques et l'erreur des hérétiques reconnue.

Après quoi, le modérateur, s'il le juge à propos, éclaircira ensuite encore mieux le point de controverse et donnera ensuite la dernière résolution, qui sera écrite par le secrétaire de la compagnie, ou autres, dans un livre particulier destiné pour cet effet.

 

 

 

Chapitre IV

Des Assemblées Ordinaires

 

Tous les lundis de l'année la compagnie (et très particulièrement tous les officiers) s'assembleront, sinon qu'aux jours des assemblées il se rencontra les fêtes principales de l'année et celles de la Bienheureuse Vierge Marie, auquel cas l'assemblée sera remise au lendemain, ou le lundi suivant.

L'assemblée durera deux heures, mesurés par un sablon, que le secrétaire mettra sur la table.

La première heure sera employée pour traiter des affaires de la compagnie, la dernière heure sera employée aux conférences de controverses comme il a été remarqué. Néanmoins l'on se règlera pour le temps, selon la quantité des affaires qui se rencontreront.

 

 

 

Chapitre VIII

De ceux qui aspirent à la Compagnie

 

Comme la fin principale de la compagnie s'étend à deux choses, la première de travailler puissamment à la conversion des hérétiques et autres dévoyés de la foi, la seconde de pourvoir à leur subsistance, c'est ce qui doit obliger la compagnie d'être très exacte à ne recevoir et ne proposer que des personnes de vertu et de probité et de capacité comme zélés pour la gloire de Dieu et le salut des âmes, particulièrement pour entreprendre la conversion des hérétiques.

Et parce que dans les grands desseins, et toutes les hautes entreprises l'on consulte pour l'ordinaire tous les moyens nécessaires, pour y arriver et y réussir heureusement, ce qui fait que le propre corps de la Compagnie de la Propagation de la Foi ne sera composé que des personnes de condition, qui, outre les qualités susdites, seront puissantes en moyens, crédit et autorité tant pour maintenir la compagnie que pour contribuer par leurs bienfaits, charités et aumônes, à la subsistance des nouveaux convertis.

Ceux qui désireront être reçus visiteront en particulier le directeur ou sous-directeur, à qui ils donneront leur nom par écrit, et le lieu de leur demeure.

Le directeur ensuite nommera en secret quelqu'un de la compagnie à qui il remettra le billet pour s'informer prudemment de la qualité, condition, vie, mœurs, capacité, commodités de celui qui se présente, dont ensuite il fera son rapport en secret au directeur ou sous-directeur, que s'il y a lieu de le recevoir, il sera proposé à la première assemblée pour être admis et reçu à la compagnie l'assemblée suivante, et sera averti par quelqu'un des confrères de se confesser et communier, pour gagner l'indulgence au jour de son entrée.

Néanmoins avant qu'il soit proposé à l'assemblée, il sera bon que le directeur ou le sous-directeur dans une assemblée particulière prenne l'avis des officiers.

Que s'il n'y a pas lieu de recevoir celui qui se sera présenté ou que l'on aura proposé secrètement, avant que la connaissance en vienne à la compagnie, on lui fera rendre réponse, selon que la prudence jointe à la charité que nous devons à notre prochain le dictera.

L'on remarquera que bien que l'on ne puisse recevoir dans la compagnie que des personnes de condition et qui soient puissantes, néanmoins par certaines considérations, l'on y pourra recevoir en qualité d'associés à la compagnie des personnes de médiocre condition, qui néanmoins ne pourront pas entrer aux assemblées ordinaires mais seulement aux générales et lorsqu'ils y seront appelées.

 

 

 

Chapitre XIII

Acceptation et ratification des règles et statuts par la Compagnie

 

La compagnie par ces présentes règles, statuts et constitutions, n'entend déroger aux règles et statuts qu'il a plu à Monseigneur l'Illustrissime et Révérendissime Archevêque et comte de Lyon, approuver ci-devant à l'établissement de la Compagnie de la Propagation de la Foi, ainsi qu'elle a déclaré et déclare par ses présentes.

Que si bien elle s'est étendue dans l'explication des susdits règlements, ce n'a été que sous son bon plaisir, et pour donner plus de lumière aux officiers et les obliger par ce moyen et ensemble tous les confrères d'observer plus exactement les dites règles.

 

En foi de quoi Nous sous signés sous-directeur, administrateur, modérateur, trésorier, conseillers et autres officiers de la compagnie, assemblés le lundi vingt unième du mois de juin de l'année mil six cent soixante, jour de notre assemblée générale, tenue dans la chapelle des pénitents de la Miséricorde de la Ville de Lyon, après que entière et pleine lecture nous a été faite des dites règles, avons arrêté et résolu comme nous arrêtons et résolvons par un commun consentement tant des dits officiers que des autres membres de la compagnie, que lesdites règles seront acceptées, reçues et ratifiées par nous officiers de la compagnie pour être par nous et par tous ceux qui seront reçus à l'avenir en ladite compagnie inviolablement gardés et observés selon leur forme et teneur.

 

 

 

SOURCE

 

-      MARTIN Odile, 1986, La conversion protestante à Lyon (1659-1687), pp.263sq