Théophile Raynaud
1583-1663
Théophile
RAYNAUD naît à Sospel en 1583 ou 1587.
En
1599 il étudie au Collège jésuite en Avignon.
En
1602 il entre dans la Compagnie de Jésus.
En
1606 il enseigne les Lettres au collège jésuite d'Avignon.
En
1607 (1608) il étudie la théologie en Avignon.
En
1612 il accomplit sa troisième année de noviciat toujours en Avignon.
En
1612 (1613) il est ordonné prêtre.
Il
enseigne alors au Collège jésuite de la Trinité à Lyon d’abord la philosophie jusqu’en 1619, année où il
prononce ses vœux solennels, puis en 1620 la théologie scholastique jusqu’en
1627.
En 1627
(1630) il part enseigner la théologie en Avignon.
En
1631 il est demandé à Paris comme confesseur de Maurice de Savoie. Ayant refusé
de réfuter publiquement les thèses d’un théologien espagnol hostile à la
politique d’alliance avec les Réformés du cardinal de Richelieu, il revient à
Lyon comme préfet des études.
En
1633 il part pour Grenoble puis Chambéry.
En
1635 il refuse le siège épiscopal de Genève. Il revient à Lyon.
En 1639
il est à nouveau en Savoie, où il est inquiété pour avoir soutenu un de ses
amis adversaire du cardinal de Richelieu et où l’impression de son ouvrage Heteroclita Spiritualis est
stoppée ; il part à Rome pour obtenir la poursuite de l’impression de cet
ouvrage.
En
1645 ayant refusé au Pape de publier un ouvrage de réfutation du théologien
Pierre de Marca, il revient à Lyon.
En 1647 (1646) il retourne à Rome où il
enseigne les Écritures Saintes au Collège Romain des jésuites jusqu’en 1651.
De
retour à Lyon il s’occupe de la Congrégation des Messieurs et de la
bibliothèque du Collège de La Trinité où il décède en 1663.
Théophile
RAYNAUD a écrit, selon ses propres relevés, près d’une
centaine d’ouvrages en latin, dont quelques-uns sont traduits par ses
collègues jésuites, où il aborde une grande variété de thèmes allant de la
christologie à la censure, de la morale aux superstitions, de l’édition
d’Anselme de Cantorbery au sanctoral de l’Eglise de Lyon, etc. Il publie aussi
sous pseudonyme ses écrits les plus virulents. Ses éditeurs se situent à Lyon
principalement, Grenoble, Rome, Cologne, Avignon ou Gand.
Plusieurs
de ses ouvrages ont été condamnés par l’Inquisition comme :
1630, De Martyrio per pestem ad martyrium
improprium et proprium vulgare comparato
où il considère
comme martyrs les fidèles qui soignent les pestiférés
ouvrage mis à l'Index le 18 décembre 1646 ; réédité avec les corrections demandées par Rome le 20 mars 1664
sous le titre Erotemata de malis
ac bonis libris…
1630, Calvinismus bestiarum religio
paru sous le pseudonyme de Antoine Rivière,
où il s’en prend aux Calvinistes et au dominicain Domingo Bannez
ouvrage mis à l'Index le 26 avril 1632
1637, Error popularis de
communione pro mortuis
où il réduit la portée de la communion des
fidèles pour le rachat des âmes du Purgatoire
ouvrage mis à l’Index le 18 décembre
1646 ; des corrections sont demandées par le décret de Rome du 20 mars
1664
1646, Heterocita spiritualia et
anomala pietatis, coelestium, terrestrium et infernorum
où il estime que la théologie doit réguler
les multiples dévotions
ouvrage mis à l’Index le 18 décembre 1646
1653, Erotemata de malis ac bonis libris
où il critique la censure des
livres
ouvrage mis à l’Index le 3 février 1659
1662, De immunitate authorum
Cyriacorum a censura
où il critique les Dominicains
qui dirigent l’Inquisition
ouvrage mis à l’Index le 20 juin 1662
Après
sa mort la Compagnie de Jésus rassemble ses diverses publications et les
édite :
-
en 1665 avec 19 tomes,
-
en 1669 avec un 20ème tome
qui réunit sous le titre Apopompaeus
(bouc émissaire) les textes originaux
condamnés par l’Inquisition sans les corrections que RAYNAUD avait acceptées ou
d’autres non publiés de son vivant en raison de leur contenu souvent satyrique
ouvrage
mis à l’Index le 1er septembre 1671.
Le
théologien, le jésuite Théophile Raynaud (…), s’il demeure une figure marginale
de l’histoire de la théologie – ou plutôt du récit que tiennent les théologiens
sur l’histoire de leur discipline – est en effet un individu marginalisé a
posteriori. Au moment de sa mort, à l’orée du dernier tiers du siècle, il est
au contraire une figure centrale de la scène théologique européenne. Les
jésuites de la province de Lyon pensent, à ce moment, pouvoir faire fond sur sa
célébrité et promeuvent la publication de ses Opera omnia en vingt volumes par
le libraire Boissat. Le premier volume inclut une série de témoignages sur
l’autorité du théologien dans le monde catholique en France et hors de France.
(GAY, 2015, p.35)
RAYNAUD
se refuse à polémiquer publiquement sur des questions qu’il estime devoir être
traitées uniquement entre théologiens. En effet à cette époque n’est plus
possible la discussion théologique sur des sujets sensibles, comme la grâce par
exemple, qui opposent Jésuites, Jansénistes, Dominicains… ; il prône le retour
à la controverse entre théologiens qu’il estime être le seul moyen efficace de
combattre les hérésies. Incontournable à son époque, il est souvent critiqué
pour la virulence de ses propos ; puis il sera rapidement oublié après sa mort
avec l’avènement de nouveaux modes de connaissance et d’exposé des idées
philosophiques ou théologiques.
On voit par les Ouvrages de cet Auteur
qu'il avait une grande lecture, et une mémoire prodigieuse; mais il n'y paraît
pas beaucoup de jugement, de goût, ni de discernement. Il n’y fait aucun choix
des auteurs qu'il cite et se contente de compiler quantité de passages et de
citer beaucoup d'auteurs anciens et modernes, bons et mauvais, sans aucune
critique et le plus souvent sans réflexion.(…) Tout cela n’empêche pas que ses
ouvrages ne soient quelquefois d’usage, et qu’il ne soit bon de les consulter
quand on veut étudier les matières qu’il a traitées.
(DUPIN, p.91)
Au moment de sa mort en 1663
Raynaud est célébré comme un des théologiens, c’est-à-dire comme un écrivain et
un acteur de l’énonciation doctrinale, les plus importants de son temps.
(GAY, 2018, p.11)
Si Raynaud est indubitablement
un théologien, sa théologie se place à une position d’interface entre
scolastique et théologie patristique. Sans rompre avec une formalité
scolastique, Raynaud apparaît comme un compilateur, attentif à soutenir
constamment son argument par une théologie patristique, qui inventorie les
soutiens de ses arguments chez les Pères et les théologiens médiévaux. La place
des citations dans son œuvre est considérable. On aurait tort d’ailleurs de le
voir comme une figure de transition entre deux régimes de la théologie. Sa
tentative constitue bien un moment en
soi de l’histoire théologique du XVIIe siècle, et ce d’autant plus que, comme
tous les théologiens, en particulier en France, il est confronté à la manière
dont l’émergence du littéraire donne congé aux savoirs majeurs de la
Renaissance, en particulier à la théologie dogmatique et au droit.
(GAY, 2018, pp.16-17)
OUVRAGES
(sélection)
1616, Breviarum Christianae Chronoligiae
1622, Theologia naturalis, où il
critique l’influence du nominalisme sur certains théologiens thomistes
1622, Theologia
naturalis, sive entis increati et creati, intra supremam abstractionem, ex
naturae lumine investigatio
1624, Scalae a visibili creatura ad Deum
1627, Splendor
veritatis moralis
1627, De Aequivocatione et restrictione mentali
1629, Hagiologium Lugdunens (Primature,
Saints lyonnais, S.Ambroise, Jean l’Evangéliste,
Piété mariale lyonnaise, S.Georges…)
1629, Indiculus sanctorum Lugdunensium, Les
Saincts de Lyon (traduction
française)
1630, De Martyrio per pestem ad martyrium improprium et proprium
vulgare comparator
1630, Calvinismus bestiarum religio, et appellatio pro Dominico Banne Calvinismi damnato (sous le
pseudonyme de Antoine Rivière)
1630, Dubia ex persona sectarii de Libertate expedia
1630, De Sectione Caesarea
1630, De Communione pro Mortuis
1631, Accurata et florulenta tractatio de virtutibus et vitiis
1632, Censura in officio censurae. Libri de Praedestinatione et Gratia
1632, Nova Libertas Gibieusiana discussa
1632, Ambrosius
succus caelestis, ubi Galliarum expressus
1632, Valerianus, Cemeliensis episcopus
1633, Faculae ad Raymund. Iordani Idiotam
1634, Metamorphosis latronis in apostolum
1634, De S.Latrone
1635, Non Causa ut casa, contra Guilelmum Camerarium
1636, De
minotiriis ecclesiasticis
ad extorquendam restitutionem
aut revelationem
1637, Error popularis de communione pro mortuis
1637, De
ortu infantium contra naturam, per sectionem caesaream, tractatio
1637, Theologia
naturalis
1640, De Apparitionibus Sacramentalibus
1642, Hipparchus de religioso negotiatore disceptatio…
(sous le pseudonyme de René de La Vallée)
1643, S.Benedictus Pastor et Pontifex Avenionensis
1643, Diptyca Mariana
1645, Hipparque, du religieux marchand , dispute
entre Médiastin et Timothée, sçavoir quelle sorte de négotiation répugne à l'estat
religieux (traduction en français)
1645, Candelabrum S.Septilustre de Eucharistia
1646, Terminalia Vitae et Mortis
1646, Hercules Commodianus in I.Launoyum
1646, Heteroclita spiritualia et
anomala pietatis, coelestium,
terrestrium et infernorum
1647, De stigmatismo sacro et profano,
divino, humano, daemoniaco
1647, Nomenclator Marianus
1647, Heteroclitorum spiritualium specimen
1647, Trinitas Patriarchum (Bruno, François de Paule, Ignace)
1647, Corona aurea super Mithram R.Pont
1648, De
bono regimine humano,
où il affirme les droits du théologien dans ses réflexions face à ses
supérieurs religieux
1648, Indae posteri, Apostatae a Religionsis ordinibus
1649, Laus Brevitatis
1650, Hoplotheca contra ictum calumniae, où il demande que le prévenu soit
entendu avant qu’une congrégation romaine ne le condamne
1650, De Justa et injusta confixione Librorum
1650, De Calumnia
1651, De Titulo Immaculatae Conceptionis retinendo, Cologne, Cornelium
1652, Trias Fortium David (Robert d’Arbrissel, Bernard, César de Bus)
1653, Erotemata de malis ac bonis libris
1653, La
dévotion que tous les chrétiens doivent avoir aux saints (traduction
française)
1653, De Sobria frequentatione alterius sexus
1653, Pietas specialis erga unum aliquem Sanctum
1653, De Absolutione moribundi
1653, Gemitus columbae de Judiciis saeculi
1654, Scapulare Stochianum
1654, De Incorruptione Cadaverum
1654, Mala e bonis Ecclesiae
1654, Heteroclita spiritualia et
anomala pietatis, coelestium,
terrestrium et infernorum (avec corrections après mise à l’Index)
1654, Confiteor
reformatum
1655, Tractatus de
pileo, caeterisque capitis tegminibus, tam sacris quam profanis
1655, De Eunuchismo
1656, De Piloe et Capitis integumentis
1656, Thomas Hurtado depilatus circa Communionem pro Mortuis
1656, Eiusdem depilatio altera circa Martyrium
1656, Eiusdem depilatio tertia circa Restruct. Et Missos Evangelic.
1657, Pietas Lugdunensis erga Immaculat. Concept. B.V.
1658, Scapulare
Partheno-Carmeliticum illustratum
et defensum
1658, Symbola Antoniana
1658, S.Maria Aegyptiaca
1658, De prima Missa et Christ. Pentec.
1659, In symbolicam
S. Antonii Magni imaginem Commentatio
1661, Breviarium christianae chronologiae, tome 1, tome
2
1661, Christianum sacrum acathysmum
1661, S.Joannes Evangelista
1661, S.Georgius
1661, Rosa Mediana
1661, O Parasceuasticum
1661, Minutalia Sacra
1662, De immunitate authorum Cyriacorum a censura
1662, Hagiologium Lugdunense complectens ea quae de sanctis Lugduni praesidibus
1665, Opera omnia
02. De Attrinutis
Christi. Theologia partum nexa
scholasticae, allegoricae,
et morali
06. Eucharistia
07. Mariala
10. Pontificia
11. Critica
sacra
12. Miscella
sacra
13. Opusculorum
miscella pholologica
15.
Heteroclita
spiritualia et anomalia pietatis coelestium
16.
Heteroclita
spiritualia et anamolia pietatis terrestrium
17.
Ascetica
18.
Polemica
19.
Operum
omnium indices generales
1669, 20. Apopompaeus
1671, Heptas
quaesulum christiana,
édition des œuvres de Léon le Grand, maxime de Turin, Pierre Chrysologue,
Fulgence de Ruspe, Valérien de Cimiez,
Amédée de Lausanne, Astère d’Amasée
1714, Le moine marchand, ou
Traité contre le commerce des Religieux, sous le pseudonyme de Renatus
a Valle (traduction française)
1717, La censure du symbole
des apôtres, où il démontre ironiquement que l’ont
peut tout condamner lorsque l’on joue sur la signification des mots
DOCUMENTS
-
BAYLE Pierre, 1697, Dictionnaire
historique et critique, pp.916-62
-
DUPIN Louis Ellies,
1711, Nouvelle
bibliothèque des auteurs ecclésiastiques, tome 17-18, 18, pp.63-91
-
NICERON Jean Pierre, 1794, Mémoires pour
servir à l'histoire des hommes illustres dans la république des lettres,
tome 26, pp.248-293
-
JOLY Philippe Louis, 1748, Remarques
critiques sur le Dictionnaire de Bayle, pp.650-661
-
MICHAUD, Louis Gabriel, 1824, Biographie
universelle, ancienne et moderne, tome 37, pp.184sq (1ère éd. 1811)
-
COLLOMBET
François Zénon, 1839, Etude
sur les historiens du Lyonnais, pp.125-161
-
PERICAUD Antoine, 1861, Notes
et documents pour servir à l’histoire de Lyon.
Lyon sous Louis XIV, 2ème partie
-
DE BACKER A., DE BACKER Al.,
SOMMERVOGEL C., 1876, Bibliothèque
des écrivains de la Compagnie de Jésus, ou Notices bibliographiques,
tome 3, pp.60sq
-
VAN DAMME Stéphane, 2005, Les
jésuites lyonnais et l’espace européen de la presse savante (1690-1714), Dix-septième siècle, 3/228, pp.499-511
-
LE BRUN Jacques, 2006, Mutations
du débat philosophique et théologique à la fin du XVIIe siècle et au début du
XVIIIe siècle, Littératures
classiques, 1/59, pp.77-92
-
PIQUE Nicolas, 2006, La
controverse religieuse : questions de méthode et dynamique de la
confrontation, Littératures
classiques, 1/59, pp.67-76
-
GAY Jean Pascal, 2015, Théophile
Raynaud et le choix de la théologie comme rhétorique en soi. Partages
disciplinaires, ordre confessionnel et apologétique catholique au XVIIe siècle,
Histoire, monde et cultures religieuses,
3/35, pp.35-52
-
GAY Jean Pascal, Le dernier théologien ? Théophile Raynaud. Histoire d’une
obsolescence
-
B.N.F., Théophile Raynaud
-
BORDES Maurice, Le
Père Théophile Raynaud, jésuite né à Sospel (1583-1663), site Département06
-
SCHMUTZ
Jacob, Théophile Raynaud, site Scholasticon
- voir notice sur les mises à l’Index