Sac de Lyon
(du Beaujolais et du Forez)
par le Baron des Adrets
1562
A Lyon se rencontrent des marchands,
des banquiers, des imprimeurs, des écrivains, venus de toute l’Europe ;
les idées nouvelles comme celles portées par la Réforme sont accueillies
favorablement par une grande partie de la population. On estime qu’un tiers de
ses 50 000 habitants sont proches de la Religion Réformée. De grands
« bourgeois » se convertissent et, devenus consuls malgré
l’opposition du clergé catholique, représentent le « parti
protestant ».
Mais les tensions sont vives entre
les deux partis : en 1552 cinq pasteurs de passage à Lyon sont arrêtés et
exécutés en mai 1553 aux Terreaux. A l’été 1560, Antoine d’ALBON, abbé de
Savigny, qui tient lieu de gouverneur de Lyon, déjoue une tentative de coup de
force des protestants ; 900 maisons sont déclarées suspectes, deux milliers
de protestants s’enfuient.
L’archevêque François de TOURNON
tente d’enrayer l’influence protestante. Par exemple il nomme des prédicateurs
« sûrs » à Saint-Nizier et à la Primatiale. En 1560 il propose au
Consulat lyonnais de confier le Collège municipal de la Trinité à « certains prêtres religieux nommés jésuites,
lesquels sont propres pour instruire la jeunesse en bonnes mœurs et en religion
chrétienne, sans prendre aucun gage ni salaire ». Mais les échevins
renouvellent leur confiance au responsable Barthélemy ANEAU « homme de bien, de bonnes lettres, savoir et
expérience, religieux et catholique », alors même que certains le
soupçonnaient d’être trop favorable à la Réforme.
Lors de la procession de la
Fête-Dieu, le 15 juin 1561, un jeune profane le Saint-Sacrement ; une
émeute s’ensuit qui s’attaque au Collège de la Trinité, et son recteur
Barthélemy ANEAU est lynché par la foule.
En 1561, comme légat du Pape, ou au
bénéfice de l’âge selon les sources, François de TOURNON préside l’ouverture du
Colloque de Poissy, convoqué par Catherine de Médicis, entre catholiques et
protestants, bien qu’il ne fût pas favorable à cette rencontre. La paix semble
revenir entre les deux partis. A la fin de l’année deux protestants entrent au
Consulat de Lyon.
Le 1er mars 1562 à Wassy
(Haute-Marne) des protestants sont massacrés. Le parti protestant lyonnais fait
appel aux troupes armées dauphinoises de François de Beaumont, Baron des Adrets
(1512-1587), récemment converti au protestantisme, pour assurer le contrôle de
la cité. Dans la nuit du 29 au 30 avril 1562, l’Hôtel de ville est pris
d’assaut, et sont occupées la place du Change et la rue Saint-Jean ; le
lieutenant-général du Roi doit s’enfuir.
Début mai, les statues de la façade
de la cathédrale et le jubé sont détruits, les
églises Saint-Etienne et Sainte-Croix sont saccagées comme celles de
Saint-Just, de Saint-Nizier, des Cordeliers et l’abbaye d’Ainay. Les troupes
s’emparent de la résidence épiscopale du château de Pierre-Scize, des maisons
des chanoines, des couvents de la ville (Cordeliers, Célestins…). Des tombes
sont profanées comme celle de saint Bonaventure au Couvent des Cordeliers dont
la dépouille est réduite en cendres jetées au fleuve ; est épargné le
reliquaire contenant sa tête.
A la
mi mai, le Baron quitte Lyon avec ses troupes pour Grenoble, Vienne,
Pierrelatte, puis revient à Lyon. En juillet il part pour
le Beaujolais : Belleville est prise le 2 mai, Villefranche le 23 ;
puis le Forez : sont pris le 3 juillet Feurs, le 14
Montbrison, le 15 Montrond où s’est réfugié le gouverneur du Forez ; puis
le Baron revient à Lyon.
Beaucoup
d’exactions sont commises envers les catholiques et leurs prêtres au cours de
ces expéditions. Pour n’avoir pu contrôler ce déchaînement de violences ou pour
l’avoir trop bien ordonné, le Baron des Adrets, critiqué par les autorités
protestantes et Calvin lui-même, est remplacé le 17 juillet par Soubise, un
réformé plus modéré. Il se dirige alors vers Carpentras, Mornas, puis Valence,
Sisteron…
En
décembre douze échevins réformés sont élus pour diriger la ville, sous le
contrôle du Consistoire. Le culte catholique est interdit.
Une
volonté de réforme se retrouve jusque dans l’urbanisme, sans doute aussi pour
faciliter la police de la ville : pour atteindre Saint-Just est ouverte à
travers le mur d’enceinte du cloître Saint-Jean la rue de la Brèche et aménagée
la montée du Chemin Neuf ; pour accéder au fleuve est élargie la rue
Bourgchanin (rue de la Barre) ; pour le stationnement des troupes est
asséchée la place Belle-Cour ; pour relier les Terreaux à Belle-Cour est
créée à travers le Couvent des Jacobins la rue Saint Dominique (actuelle rue
Emile Zola)…
Après
l’édit d’Amboise de mars 1563, l’occupation de Lyon par les protestants prend
effectivement fin le 15 juin 1563 avec la nomination d’un nouveau gouverneur
représentant le Roi. Le chapitre invite le jésuite Auger à prêcher à la
cathédrale en juillet. Le culte catholique est rétabli le 18 juillet. En août
un synode national rassemble à Lyon des milliers de Réformés. La paix revient.
Le
Baron est arrêté début 1563 par les Protestants qui craignent toujours ses
violences, emprisonné à Nîmes et libéré après l’Edit d’Amboise. En 1567, il
revient au catholicisme et, à la tête d’une armée, reprend aux Réformés des
cités du Dauphiné, ce qui n’empêche pas le lieutenant-général du Dauphiné de le
faire arrêter en juin 1570 et de l’enfermer à Lyon au château de
Pierre-Scize car il apparaît trop dangereux et aux catholiques et aux réformés.
Il est libéré en janvier 1571 et obtient la grâce du Roi Charles IX.
DOCUMENTS
- Musée de Gadagne, Le
sac de Lyon par les Calvinistes
- Musée militaire
de Lyon, Le Baron des Adrets
- Eglise Réformée de
Villefranche
- Le
Centenaire du Temple de Villefranche
- Forez-Histoire, La Prise de
Montbrison
- LONGEON Claude, 1975, Une
Province française à la renaissance. La vie intellectuelle en Forez au XVIè
siècle
- PORCHU-RICHERD Tatiana, 2000, La
Saint-Barthélemy et l’intolérance des Lyonnais pendant les guerres de religions
(1562-1572), Bulletin de la Société
Historique, Archéologique et Littéraire de Lyon, t.30, pp.13-31
- voir notice sur Barthélemy
ANEAU
g.decourt