érection du
Diocèse de
Saint-Etienne
1971
1855-1905
Avant la loi de séparation
de l’Eglise et de l’Etat de décembre 1905, en régime concordataire, le
gouvernement nomme les évêques et décide des limites des territoires
diocésains, en accord, souvent après de longues négociations, avec les services
du Saint-Siège.
L’idée
d’un diocèse de Saint-Etienne séparé du diocèse de Lyon vient de l’importance
prise par la ville minière à partir de XIXème siècle, qu’entérine le
décret impérial du 25 juillet 1855, faisant de Saint-Etienne le chef-lieu du
département de la Loire à la place de la ville de Montbrison à compter du 1er
janvier 1856.
Le
27 octobre 1856 le Conseil municipal de Saint-Etienne demande aux autorités
civiles que la nouvelle préfecture devienne siège d’un nouvel évêché. Le Maire
de Montbrison, de son côté, demande que sa ville devienne évêché en
compensation de la perte de son statut de préfecture.
Régulièrement
les élus stéphanois en appellent aux ministres, et pendant la maladie du
cardinal de BONALD en 1869 portent une pétition au Préfet pour réclamer un
diocèse.
Mgr
GINOUHLIAC est nommé en 1870 sans que le décret ne parle d’un nouveau diocèse.
Toutefois il entend la requête provenant principalement de laïcs, élus et
notables du Forez, alors que le clergé est plutôt pour le maintien en l’état du
diocèse. Il convoque un synode diocésain, prévu selon le Droit Canon tous les
dix ans et réunissant uniquement des prêtres, avec deux sujets à l’ordre du
jour :
- la réorganisation
du diocèse qui, depuis la Révolution, n’a plus ni archiprêtrés ni archidiaconés
ni évêque auxiliaire,
- l’éventualité de la
création d’un nouveau diocèse à Saint-Etienne.
Pour
préparer le second débat, l’archevêque demande à quatre curés de la ville un
rapport, qui lui est remis le 11 juin 1872, et donne un avis :
- opposé à la
création d’un évêché,
-
opposé
à la nomination d’un Vicaire général résident,
- favorable à la
nomination d’un curé-doyen représentant l’archevêque.
Par
ailleurs il consulte, début 1873, les évêques originaires du diocèse, dont les
avis sont partagés : 3 favorables et 3 opposés.
Le
Synode a lieu du 22 au 26 septembre 1873 au Grand Séminaire Saint-Irénée (Lyon
5ème arrdt).
La
veille, le 21 septembre, le journal Le
Salut Public publie un éditorial dénonçant la création d’un diocèse de
Saint-Etienne comme démembrement organisé du diocèse :
(c’est) la dernière phase de la lutte séculaire
entre l’ultramontanisme et le gallicanisme, entre les congrégations religieuses
et le clergé séculier, entre l’indépendance, le libéralisme des Eglises
nationales et l’absolutisme romain, (…)
(et ce) pour amoindrir et annihiler l’épiscopat,
pour arriver – ce qui est l’idéal des congrégations romaines, et ce qu’elles
ont déjà obtenu, ou peu s’en faut, en Italie – à faire que les évêques ne
soient plus que les subordonnés du pape, ses serviteurs dévoués et silencieux.
Aussitôt
Mgr GINOUILHAC, déjà en délicatesse avec le Saint-Siège depuis sa prise de
position au Concile Vatican I contre la notion d’une infaillibilité réservée à
un pape détaché du collège épiscopal, retire le sujet de l’ordre du jour synodal.
Le
synode approuve la création de 60 archiprêtrés (un par canton), 29 dans le
Rhône et 31 dans la Loire, promulgués par l’ordonnance du 3 janvier 1874.
Cette
année-là, parallèlement, une délégation des prêtres de la Loire est reçue au
ministère des cultes, pour prôner le statu
quo, et un groupe de laïcs stéphanois, le Comité de l’Evêché, favorable à un diocèse de Saint-Etienne, est
reçu par l’archevêque dans sa maison d’été de Vernaison, le 7 juillet 1874.
Après cette entrevue, une entente se fait et l’archevêque fait la proposition à
Rome de nommer un évêque auxiliaire, Vicaire général en résidence à
Saint-Etienne.
Le 9
mai 1875 Mgr THIBAUDIER, prêtre de la Société des prêtres de Saint-Irénée
(Chartreux), jugé « libéral » comme l’archevêque par le pouvoir
civil, est consacré évêque, auxiliaire de l’archevêque de Lyon en résidence à
Saint-Etienne. Mais il doit rester à Lyon auprès de l’archevêque malade. Le 17
novembre meurt Mgr GINOUHLIAC.
Pendant
la vacance du siège, les partisans et les opposants font le siège du ministère
des cultes. Le 4 décembre 1875, M.TARDIF, du ministère, rend un rapport qui
distingue quatre options possibles :
- la création d’un
nouveau diocèse de la Loire,
+
avec Montbrison comme évêché,
+ avec
Saint-Etienne comme évêché,
- le statu quo.
Si
le Nonce penche pour la création d’un diocèse, le gouvernement préfère le statu quo, moins coûteux pour les
finances publiques.
Un
décret gouvernemental du 20 avril 1876 nomme Mgr THIBAUDIER évêque de Soissons,
et Mgr CAVEROT, jugé « anti-libéral », archevêque de Lyon.
Le
26 mai 1876 l’archevêque de Lyon nomme le curé de la paroisse Notre-Dame de
Saint-Etienne, l’abbé DELPHIN, âgé de 83 ans, prêtre de Saint-Irénée, « pro-vicaire » et à ce titre son
« représentant spécial »
avec « prééminence sur les
archiprêtres et sur tout le clergé de la ville ».
1905-1958
La loi de
séparation de 1905 enlève au gouvernement le pouvoir de nommer les évêques et
de définir les territoires diocésains : c’est le Saint-Siège qui a
désormais l’entière responsabilité de l’organisation interne du culte
catholique.
L’archevêque,
Mgr COUILLE, demande à Rome un évêque auxiliaire en la personne de son Vicaire
général, Louis-Jean DECHELETTE qui est consacré le 25 mars 1906. Un pro-vicaire
continue de le représenter à Saint-Etienne.
Le
29 septembre 1911 il envoie à Rome un « mémoire contre tout projet de division du diocèse ». Il meurt
le 11 septembre 1912.
Le 1er
octobre 1912 un groupe de laïcs piloté par MM PRENAT, GUITTON, LYONNET, alors députés
de la Loire, envoie à Rome un rapport demandant la création d’un évêché
stéphanois.
Se
trouvent en même temps et incidemment à Rome :
- une délégation
stéphanoise, composée de prêtres et de laïcs comme MM.PRENAT et GUITTON, qui
demande que Mgr DECHELETTE soit le premier évêque de Saint-Etienne,
- une délégation du
clergé lyonnais qui demande au pape Pie X la nomination de Mgr DECHELETTE comme
archevêque de Lyon.
En
effet, Mgr DECHELETTE, qui avait présidé les trois Congrès diocésains destinés
à organiser et coordonner l’action catholique (œuvres, mouvements,
ligues…) : à Lyon en 1908 et 1910 et fin février 1912 à Saint-Etienne, est
très apprécié du clergé et des responsables laïcs. Mais, à cette époque les
« milieux romains » voient en l’Eglise de Lyon « un foyer de modernisme » (JOMAND,
1978), avec, par exemple, la revue « libérale » Demain,
fondée en 1905 par Pierre JAY, où s’expriment des opinions
« progressistes » en matière politique, sociale et religieuse, revue
qui arrête d’être éditée en 1907 après une mise en garde, jugée tardive par
certains, du cardinal COULLIE et de Mgr DECHELETTE.
Le
26 octobre 1912 c’est Mgr SEVIN que Rome choisit comme archevêque. Mgr
DECHELETTE fait savoir à Rome qu’il refuserait d’être nommé à Saint-Etienne,
car il est opposé comme feu le cardinal COUILLE à l’érection d’un diocèse
séparé. Il est nommé évêque d’Evreux en 1913.
Le 9
février 1913 Mgr SEVIN met en garde Rome contre MM.PRENAT et GUITTON.
Le
cardinal SEVIN, mort en 1916, est remplacé par Mgr MAURIN qui est intronisé
l’année suivante ; le pape Benoît XV lui donne immédiatement, le 30
octobre 1916, un nouvel évêque auxiliaire « en résidence à Saint-Etienne », « pour la ville et pour les endroits de cette province civile les plus
éloignés du siège de Lyon ». Le 28 juin 1917 est nommé à ce poste Mgr
CHASSAGNON, Vicaire général archidiacre de Saint-Etienne depuis 1915, consacré
le 10 octobre 1917.
Un Comité représentant les catholiques de la
Loire, animé par les mêmes MM.PRENAT et GUITTON, envoie à Rome le 3 juin
1921 une supplique demandant l’érection d’un véritable évêché. Le cardinal
MAURIN écrit à Rome le 9 juillet qu’il y est opposé.
Après
les pro-vicaires de 1876 à 1916, il y a donc désormais des évêques auxiliaires
résidents :
- CHASSAGNON,
1916-1922, Vicaire général archidiacre de Saint-Etienne
-
FAUGIER,
1922-1928, Vicaire général, Recteur de Fourvière, né à Rive-de-Gier (42)
-
DELAY,
1928-1937, Vicaire général, né à Lorette (42)
- BORNET, Vicaire
général, directeur de l’enseignement catholique, né à Lyon.
En 1954
ressurgit la question : dans une lettre du 5 septembre Mgr MAZIOUX,
directeur des Oeuvres à Saint-Etienne, demande la création du diocèse au
cardinal GERLIER qui ne répond pas, du moins par écrit.
Le
13 octobre 1957, nouvelle lettre du même Mgr MAZIOUX auquel le cardinal GERLIER
réponds « je vous promets d’étudier
la question ».
Le
28 décembre 1957, 14 prêtres de Saint-Etienne écrivent en ce sens au cardinal
GERLIER, et, le 15 février 1958, 17 laïcs, présidents d’œuvres et de
mouvements.
Le 17
février 1958 Mgr BORNET démissionne pour raisons de santé.
1958-1971
Le
29 avril 1958, le cardinal GERLIER réunit les prêtres de Saint-Etienne :
une quasi unanimité se prononce pour un diocèse à Saint-Etienne.
Le
27 mai 1958, le cardinal GERLIER réunit les prêtres de Roanne : une quasi
unanimité se prononce pour le maintien du Roannais dans le diocèse de Lyon.
Le
13 juin 1958 le cardinal GERLIER installe une commission de réflexion.
Rome
fait savoir qu’il ne veut pas de nouveau diocèse.
Le
pape Pie XII meurt et Jean XXIII lui succède le 28 octobre 1958.
Le
17 décembre 1959 sont annoncées en même temps et la nomination de Mgr VILLOT
comme évêque coadjuteur avec droit de succession à Lyon et celle de Mgr
MAZIERS, Vicaire général de Saint-Flour, comme évêque auxiliaire en résidence à
Saint-Etienne.
Dans
son ordonnance du 4 mars 1960, le cardinal GERLIER précise que Mgr MAZIERS
a :
« mandat spécial prévu par le Droit canon,
pour accomplir, en accord avec nous ou avec notre coadjuteur, les actes suivants :
a)
nommer les curés,
b)
nommer les vicaires
paroissiaux,
c)
pourvoir aux autres
charges et offices ecclésiastiques, à l’exception du Petit Séminaire de
Montbrison et des Ecoles cléricales,
d)
autoriser la
construction d’églises nouvelles. »
De plus
le nouvel évêque dispose de son propre conseil épiscopal et a autorité sur
l’Action catholique, les Œuvres d’apostolat et la Direction des Œuvres.
En
1966, Mgr MAZIERS est nommé à Bordeaux et remplacé par Mgr ROUSSET, Vicaire
général de Belley, qui, par décret épiscopal du 15 mars 1966, a, en plus,
autorité sur la Direction de l’enseignement religieux, la Direction de
l’enseignement libre, la pastorale scolaire, les vocations, les religieuses et
l’Office des paroisses nouvelles.
Le
28 mai 1967 Mgr RENARD succède au cardinal VILLOT nommé à Rome.
Le
22 octobre 1968 le Nonce vient à Lyon installer une Commission interdiocésaine
pour étudier l’érection des évêchés de Saint-Etienne, de Roanne et de Vienne.
Le
20 mars 1969 la commission rend son rapport à la Nonciature ; puis les
évêques font les propositions suivantes :
- un évêché à
Saint-Etienne comprenant les arrondissements de Saint-Etienne et Montbrison,
-
un
évêché à Roanne comprenant l’arrondissement de Roanne et 4 cantons de
Saône-et-Loire,
-
un
évêché pour Vienne et La Tour du Pin comprenant des communes de l’Isère, du
Rhône, de la Loire et de l’Ardèche,
-
17
paroisses du diocèse de Grenoble intégrant le diocèse de Lyon,
- 8 paroisses du
diocèse de Belley intégrant le diocèse de Lyon.
Pour
susciter un large débat, un document épiscopal est rendu public dans le numéro
du bulletin diocésain, Eglise à Lyon,
du 20 février 1970.
Le Conseil
presbytéral de Lyon donne son avis lors de sa session des 24, 25 et 26 avril
1970 :
- favorable à un
évêché à Saint-Etienne,
-
favorable
à un évêque auxiliaire résident à Roanne,
- favorable aux
intégrations des paroisses des diocèses de Belley et de Grenoble dans le
diocèse.
Après
avis des bureaux des Conseils presbytéraux des diocèses concernés réunis le 12
mai 1970, les évêques réunis les 23 et 24 juin 1970 proposent alors à
Rome :
- l’érection d’un
diocèse de Saint-Etienne,
- l’intégration dans
le diocèse de Lyon de paroisses des diocèses de Belley et de Grenoble.
Le
15 juin 1970 se réunissent les évêques de la zone interdiocésaine de la Vallée du Rhône (diocèse de Grenoble,
diocèse de Lyon, archidiaconé de Saint-Etienne), créée en 1967. Ils constatent
que les réponses à l’enquête plutôt opposées à l’érection d’un diocèse Vienne -
Le Tour du Pin, les laïcs y étant plutôt favorables. Ils prolongent l’existence
de cette zone et souhaitent, comme les réponses à l’enquête, la présence sur
place d’un responsable de la zone.
Le
26 décembre 1970, en la fête de Saint Etienne, est signé par le pape PAUL VI le
décret d’ « érection du diocèse
de Saint-Etienne et changements de limites des diocèses de Belley, de Grenoble
et de Lyon ». :
- le diocèse de
Saint-Etienne comprend les arrondissements civils de Saint-Etienne et de
Montbrison dans la Loire,
-
sa
cathédrale est l’église Saint-Charles à Saint-Etienne,
- les communes du
Rhône qui appartiennent encore aux diocèses de Belley ou de Grenoble intègrent
le diocèse de Lyon.
Le 1er
janvier 1971 l’Archevêque de Lyon nomme un nouveau Vicaire général pour
l’archidiaconé de Saint-Etienne « en
prévision de l’érection du diocèse ».
Le
23 février 1971 Mgr ROUSSET, évêque auxiliaire résident à Saint-Etienne,
devient le premier évêque de ce nouveau diocèse.
Le
bulletin du diocèse de Lyon, Eglise à
Lyon, publie le 5 mars 1971 un texte des évêques de Belley, Grenoble et
Lyon intitulé « Aménagement des
diocèses de la région lyonnaise et érection du diocèse de Saint-Etienne ».
Il rappelle les dates de :
- 1823, réduction des limites du diocèse de Lyon,
-
1960,
statut particulier de l’archidiaconé de
Saint-Etienne au sein du diocèse de Lyon,
-
1966,
projet de cardinal VILLOT de modifier les
limites du diocèse de Lyon,
-
1967,
installation d’une commission de
réflexion,
-
1968,
intégration de communes de l’Ain et de
l’Isère dans le département du Rhône,
-
1969,
rapport de la commission
- 1970, publication d’un document épiscopal soumis à
débat,
réunion des
Conseils presbytéraux,
transmission
du document épiscopal à Rome.
Le
30 mai 1971 ont lieu les transferts de pouvoirs de juridiction (autre date
mentionnée pour ce transfert : 1er juin)
Le
bulletin du diocèse de Lyon, Eglise à
Lyon, du 21 mai 1971qui comprend une partie réservée au diocèse de
Saint-Etienne, publie un texte des évêques de Lyon, Belley, Grenoble et
Saint-Etienne au sujet de « dispositions
pour l’aménagement des diocèses de la région lyonnaise », qui précise
les transferts financiers et canoniques, et les « conventions pastorales » entre les évêques concernés pour les
paroisses suivantes :
- Meys (Rhône)
rattachée à l’archiprêtré de Chazelles,
-
Trèves
(Rhône) rattachée à l’archiprêtré de Rive-de-Gier,
-
Chatelus
(Loire) rattachée à l’archiprêtré de Saint-Symphorien-sur-Coise,
-
Saint-Michel
et Vérin (Loire) rattachées à l’archiprêtré de Condrieu,
-
La
Chapelle et Verlieux (Loire) rattachées à l’archiprêtré de Pélussin,
-
Chambost-Longessaigne,
Villechenève et Affoux (Rhône) rattachées à l’archiprêtré de Panissières,
-
Sainte-Colombe-les-Vienne
(Isère) rattachée à Vienne,
- Vancia (Rhône)
rattachée au Mas-Rillier.
Le
17 juin 1971 une célébration se déroule dans la nouvelle cathédrale
Saint-Charles de Saint-Etienne.
DOCUMENTS
- Histoire
de la cathédrale Saint-Charles de Saint-Etienne
- LUIRARD Monique,
1974, Vers un diocèse de Saint-Etienne (1856-1971), Etudes
foréziennes, VII, Aspects de la vie
religieuse en Forez, pp.169-184
- JOMAND Joseph,
1978, La Longue marche (1856-1971) vers
le diocèse de Saint-Etienne
g.decourt