inscription d’Innocent IV – pont du Rhône
XIIIè s.
Salut Marie, pleine de
grâce, le Seigneur est avec toi.
Protecteur des vertus, pourfendeur des vices, Pape
de haute lignée, féroce comme un lion, doux comme un agneau,
justement appelé Inoffensif lui qui ne veut pas
offenser,
fit grande dépense pour qu’ici un pont put
être fait.
Le Pont des âmes construisit le Pont de pierres,
pour que pas un homme du peuple n’ait à
porter l’un et l’autre.
Celui qui bénira tant ce pontife
Et lui donnera un précieux argent pour que le pont sorte des eaux,
A lui une année entière et quarante jours d’indulgence.
Ce noble Pont est l’œuvre du souverain Pontife.
Christ, à toi l’action de grâce de son auteur,
quand l’éloignement de l’offensive lui donne
ce nom
qui, pour la gloire de Dieu, en est la
manifestation.
Seigneur Pape Innocent, S.Nicolas.
NOTES
Cette
inscription se situait à l’entrée du pont de pierre construit sur le Rhône
entre 1190 et 1572 ; elle signale le soutien significatif à cette œuvre du
pape Innocent IV lors de son séjour à Lyon ; elle a été détruite par la
suite.
Cette dédicace s’appuie sur deux séries de jeux de mots :
- l’une
autour du verbe nocere :
nuire, traduit ici offenser
o
Innocens : Innocent nom du pape
o
Innocuus : non nocif, traduit ici
Inoffensif
o
nocumenti : nuisance, traduit ici
offensive (des eaux en crue destructrices ou du passage d’armées)
- l’autre
autour du substantif pons :
o
Pontifex : responsable romain du
pont en bois sur le Tibre, démonté pour éviter le passage d’ennemis, remonté
après chaque crue ; c’est l’un des titres du pape
o
Pons animarum : pont des âmes, allusion
à la traversée de la mort des pèlerins de cette vie ; c’est l’un des
titres du pape
o
Pontem petrarum : pont de pierres, pont pour que
les pèlerins traversent sans encombre le Rhône, en remplacement du pont de bois
précédemment écroulé lors du passage des armées des Croisés
S.Nicolas : nom d’une
des deux chapelles situées à l’entrée lyonnaise du pont
DOCUMENTS
- GUIGUE
Marie Claude, 1876, Notre-Dame
du Pont. Recherches sur l’origine du pont de la Guillotière
et du grand Hôtel-Dieu et sur l’emplacement de l’hôpital fondé à Lyon, au VIè siècle, par le roi Childebert et la reine Ultrogothe, Société
littéraire, historique et archéologique de Lyon. Années 1874-1875, pp.
183-328, p.221
- Mémoires
pour l'histoire des sciences et des beaux-arts, 1729, vol. 114, pp.1249sq
- voir notice sur l’Œuvre du Pont