« action liturgique de masse »
La
Doua 1969-1970
Dans
la suite de leur participation aux événements de mai 1968, des étudiants de
l’aumônerie de l’INSA de Villeurbanne décident d’inventer des « actions liturgiques de masse ».
Il
s’agit de convoquer les étudiants du campus de La Doua à une liturgie qui
permette l’expression des uns et des autres.
Orchestre
avec batterie et guitares électriques, prises de paroles aux divers micros,
lectures proclamées sur fond de batterie, etc., tout ceci pour créer une
atmosphère de chaleur communicative, mobilisatrice des énergies.
Se
rassembler en Eglise pour faire la fête et prendre du plaisir à prier ensemble
paraît alors « révolutionnaire » dans une Eglise aux liturgies en
décalage avec les mentalités. En effet, les textes de la messe maintenant
compréhensibles dans leur traduction française marquent un divorce avec le
langage et la manière de penser du moment et, tout particulièrement, de la
jeunesse étudiante, spécialisée de plus dans les sciences « dures ».
Le
mode inventif est de mise tant par la musique composée pour chaque célébration,
que pour les textes de prière, prière eucharistique comprise, écrits par des
aumôniers.
L’église
de la Sainte-Famille de Villeurbanne accueille une fois par mois ces
liturgies-événements, qui visent l’unanimité (« une seule âme ») là
où se pressent l’absence de consensus : divergence des motivations, des
options sociales, des implications ecclésiales, etc., des participants.
Au
cours des années 1969-1970, dans plusieurs communautés (paroisses ou aumôneries
de lycées) voient le jour des célébrations, eucharistiques ou non, animées par
des orchestres « pop » ou « rock », guitare électrique et percussions
constituant l’innovation de l’époque. Un travail sur les textes des chants et
des prières, l’usage de textes « profanes » dans les liturgies, sont
aussi la marque d’une époque où les rituels, issus de la réforme liturgique du
Concile Vatican II, ne sont pas encore véritablement établis. Assemblées peu
politisées pour la plupart (sinon pour appeler à la fin des guerres ou à la solidarité
avec le Tiers-Monde), surtout empreintes de caractères festifs (musique, danse,
gestuelle...), fortement impressionnées par la proximité de Taizé avec ses
premiers rassemblements de la jeunesse mondiale, fréquentés par de nombreux
groupes venus du diocèse.
L’objectif,
affiché ou non, était de susciter l’adhésion à l’action collective (liturgique)
par l’expression personnelle, ce qui constitue une forme ecclésiale propre :
celle-ci se situe donc en opposition avec une autre forme ecclésiale, où les individualités
se fondent dans le groupe, et s’inscrit dans la mouvance des
« idées de 68 » fortement marquées par la « révolte du
sujet » contre tout « système ».
Pour
une meilleur compréhension, on peut se reporter à :
- HERVIEU LEGER
Danièle, De la Mission à la protestation.
L’évolution des étudiants chrétiens en France (1965-1970), 1973, Paris,
Cerf
- Un exemple de prière
eucharistique composée en 1970
g.decourt