musée du diocèse de lyon

entrée

Société Saint-François-Xavier

1844

 

(à compléter)

 

 

 

 

 

En 1844 est fondée à Lyon la Société Saint-François-Xavier sur le modèle de celle qui a été fondée en 1837 à Paris.

 

C’est une société destinée aux ouvriers.

 

Sa direction est assurée par l’aumônier des Frères des Ecoles Chrétiennes, l’abbé Jayol. Ont participé à sa fondation l’écrivain François Zénon Collombet, ami de Louis Veuillot, et Auguste Hébrard, lyonnais actif dans la même société à Paris.

 

La société organise conférences et entraides. Plusieurs sections s’ouvrent après celle des Lazaristes montée Saint-Barthélemy dans les paroisses lyonnaises (Saint-Polycarpe, Saint-Bonaventure, Ainay, Brotteaux…) ou Charlieu dans la Loire en 1854. Le nombre de 5 000 membres est atteint dès la deuxième année.

 

Un conseil central est présidé par l’archevêque qui manifeste souvent son soutien à la société, qu’il considère comme une œuvre d’évangélisation des ouvriers avec le souci conjoint des âmes et des corps. Chaque « section » est présidée par le curé de la paroisse et divisés en « centuries ».

 

Les réunions, généralement semi-mensuelles, abordent les questions de religion, d’art et de science, mais non de politique. A partir de 1947 une caisse de secours est mise en place. La cotisation donne droit à des aides lors de maladie. Un bureau de placement est ouvert pour faciliter les embauches.

 

Les sections de la société sont animées par des hommes d’origines diverses : Collombet historien ultramontain et rédacteur du journal de la société Mémorial catholique paraissant à partir de 1847, Hébrard qui donne des poèmes, Pierre Charnier, canut révolté de 1831, fondateur d’un atelier mutuelliste et représentant des travailleurs au Conseil des Prud’hommes, Jérôme MORIN démocrate républicain…

 

Dans une époque où les organisations ouvrières sont interdites, le gouvernement du roi Louis-Philippe tolère la société en tant qu’œuvre de moralisation des masses par les autorités catholiques ; mais la presse républicaine y voit une entreprise de démobilisation sociale, un groupe politique lié aux « carlistes » (partisans du retour à la royauté), une agence de recrutement pour les ateliers de travail des Frères, etc. On accuse par exemple les congrégations religieuses d’employer des enfants dans des couvents-ateliers pour la fabrication d’ornements d’église, concurrençant ainsi les ouvriers de la soierie.

 

En janvier 1846 La Tribune lyonnaise informe qu’« une nouvelle sainte Ligue appelant à elle les hommes simples pour les transformer plus tard en séides se forme au milieu de nous sous le manteau de la religion », animée en sous-main par des Jésuites, et interroge : « est-il nécessaire d’instituer des Confréries qui ressemblent à des Armées ? ». Le Cardinal De BONALD propose de placer la société sous le patronage de saint Joseph plutôt que du saint jésuite.

 

En février 1848 des manifestants détruisent plusieurs ateliers dirigés par des religieux, ainsi que le pensionnat des Frères et l’appartement de l’abbé Jayol. Sous la pression de ses amis ouvriers Pierre Charnier démissionne.

 

En mars l’abbé Jayol réplique aux articles parus dans le Censeur :

 

Tout ce que dit le Censeur est donc faux, absolument faux, savoir :

1° Que la société de St.François-Xavier soit l’ouvrage du légitimisme.

2° Que tout autre que moi en soit le fondateur à Lyon et le directeur ; par conséquent ce n’est point M.Cattet, encore moins MM. les prêtres des Chartreux, qui ne m’ont jamais donné leur concours ;

3° Que les capitalistes soient le moins du monde mêlés parmi nous ; les capitalistes de notre œuvre sont des ouvriers dans la détresse ;

4° Que les bruits sinistres qui alarment la société partent de nos rangs. Je réponds des membres de notre œuvre ; ils sont trop calmes, trop paisibles et trop résignés.

(JAYOL, 1948)

 

Face aux accusations de « carlisme » des sociétaires affichent alors leurs convictions républicaines. Pour atténuer les polémiques internes et externes, avant les élections d’avril les sections sont mises en sommeil ou parfois dissoutes ; des débats divisent les adhérents sur la gestion des fonds destinés aux secours.

 

En octobre la société est réactivée avec un nouveau bureau. La direction est confiée au curé de la paroisse Saint-Just, l’abbé Gonin. Le bureau est composé uniquement d’ouvriers.

 

En février 1850 la société change officiellement de nom comme en témoigne un document rédigé par le curé de Saint-Just, dont la signature est « légalisée » par le Cardinal de Bonald, et intitulé Société de Bienfaisance et de Secours mutuels fondée sous le patronage de saint Joseph, connue d’abord sous le nom de Société de St-François-Xavier. De nouveaux statuts sont adoptés.

 

Désormais font partie de la Société :

-      les ouvriers de 20 à 50 ans,

qui, par une cotisation mensuelle, ont droit, eux et leur épouse, à une protection en cas de maladie (visites d’un médecin, indemnités journalières, pension viagère annuelle en cas de maladie incurable) et à une aide en cas de décès (prise en charge des frais de sépulture et de célébrations de messes) ;

-      des membres honoraires,

qui, par leurs offrandes volontaires annuelles, accomplissent leur mission d’« évangéliser les pauvres par l’effusion de la charité » et permettent à la Société de St-Joseph de « réaliser tout le bien religieux et moral qu'elle aspire à opérer parmi les ouvriers ».

 

En faisant appel à la générosité innée de nos concitoyens, nous sommes sûrs d'être écoutés. Leurs offrandes ne seront pas oubliées de l'ouvrier qui doit en profiter. En bénissant la main qui le soulage dans sa misère, il saura distinguer la vérité de la malveillance de ces hommes qui cherchent à jeter la désunion et à fomenter la haine entre le fabricant et l'ouvrier. Cette vérité connue, les ouvriers et les fabricants ne feront plus qu'une seule et même famille, reconnaissant pour père de tous, le Dieu trois fois saint, et pour leur mère, l'Eglise catholique.

(GONIN, 1850, Société…)

 

Deux réunions mensuelles sont consacrées à l’instruction religieuse et morale, et sont organisées les célébrations de mariage des ouvriers.

 

En 1967 on note que la société mutualiste Saint-François-Xavier n°42/10 de Charlieu fusionne avec la société mutualiste La Ruche n° 42/537 sous le nom d’Entente mutualiste de Charlieu.

 

 

 

DOCUMENTS

 

 

-      La Tribune lyonnaise, revue politique, sociale, industrielle, scientifique et littéraire des travailleurs, 1846, janvier, Œuvre de St-François-Xavier

 

-      JAYOL, Liberté, Egalité, Fraternité. La Société de S. François-Xavier dévoilée. Lettre adressée au Censeur, 30 mars 1948

 

-      Société de Bienfaisance et…, comptes rendus 1849-1850

 

-      BUFFENOIR Maximilien, 1922, Le Mouvement social catholique à Lyon avant 1948, Revue des Etudes Historiques, pp.541-556

 

-      BAROU Joseph, 1984, Origines des sociétés de secours mutuels de Montbrison

 

-      DESSERTINE D., FAURE O., NOURRISSON D., 2005, La Mutualité de la Loire face aux défis: enracinement local et enjeux nationaux (1850-1980)

 

-      MAS Gabriel, 2007, Le cardinal de Bonald et la question du travail (1840-1870), thèse de doctorat en histoire, Université Lyon 2, chapitre 9, III. La Société de Saint-François-Xavier : rencontres et enjeux

 

-      Bibliothèque numérique de Lyon, Archives Pierre Charnier

 

-      Voir notice sur Jérôme MORIN

 

g.decourt