accord entre Renaud
de Forez, le Chapitre et les Bourgeois de Lyon
1208
Au nom de Notre Seigneur Jésus Christ, O., duc de
Bourgogne, R., évêque de Langres par la grâce de Dieu, P., évêque de Macon par
la même grâce, A., abbé de Bonnevaux, à tous les fidèles en Christ, salut.
Tous ceux qui liront cet écrit sauront que le désaccord
qui opposait le seigneur archevêque R. et le Chapitre de Lyon, d’une part, et
les citoyens lyonnais, d’autre part, par notre entremise et celle d’autres
hommes distingués, s’est éteinte par le texte formulé ci-dessous :
Le seigneur archevêque avec l’Eglise de Lyon a repris de
plein droit la propriété, la juridiction et le pouvoir sur toute la cité, de
part et d’autre de la Saône, et le seigneur archevêque fut investi des clés de
toutes les fortifications et portes.
De plus, afin que la paix redevienne plus certaine entre
le seigneur archevêque et les citoyens, il est convenu :
+ qu’est confiée jusqu’à la quinzaine de Pâques à O., duc
de Bourgogne, la garde des fortifications et des clés de la ville au-delà la
Saône,
+ qu’une fois ces clés remises par le seigneur archevêque
il les possédera en son nom propre jusqu’à ce moment-là,
+ et qu’il les conservera sous serment en toute bonne foi
au profit de l’archevêque et du chapitre et de toute la cité,
+ et que, le terme annoncé atteint, l’empêchement temporel
étant levé, il remet ces fortifications et les clés de ces portes à
l’archevêque de Lyon,
+ et que si d’aventure, ce qu’à Dieu ne plaise !, la
nature humaine le frappait, celles-ci seraient remises au chapitre.
En vertu de ce serment qu’il a prêté le même O. est tenu
de mettre sans délai la tour du pont qui regarde Saint-Nizier et la tour de
Saint-Marcel au pouvoir des citoyens, mais pas au pouvoir de l’archevêque ou du
chapitre, si ce n’est de par la volonté et avec l’accord des citoyens.
De plus, les clés des portes et des tours une fois restituées
à la date annoncée au seigneur archevêque et au chapitre, comme déjà dit, O.
remet la garde des clés des portes à celui ou ceux qu’il voudra, de sorte que
les citoyens ne puissent mettre en avant une coutume selon laquelle la garde
des clés leur est remise à eux ou à quelqu’un avec leur accord expresse.
De plus, les citoyens peuvent réparer à leur guise les
clôtures et les fossés qui sont du côté de Saint-Marcel, selon le présent texte
; mais ils ne peuvent pas construire de nouvelles fortifications sans l’accord
de l’archevêque et du chapitre ; et l’autre tour du pont sera immédiatement
détruite.
Le seigneur archevêque et le chapitre prometteront de
conserver de bonne foi aux citoyens la bonne liberté de la cité et les bonnes
coutumes écrites ou non écrites.
En outre, l’archevêque et le chapitre par leur serment
sont tenus de conserver ces quatre choses, à savoir :
+ ne pas déshériter quelque citoyen, ou s’emparer de lui,
ou l’exécuter, ou le mutiler, si ce n’est au nom de la coutume de la justice et
de l’exigence seigneuriale ;
+ à cela s’ajoute dans le même serment que s’il arrivait
qu’un citoyen quitte son domicile ou en change, restent en sa possession les
biens librement constitués dans ou hors de la cité, excepté le cens et droit
d’usage seigneuriaux ;
+ de plus, les citoyens jureront conserver en vie les
personnels de l’archevêque et les clercs de l’Eglise de Lyon et leurs
familiers, ainsi que les propriétés autrefois justement acquises des
prédécesseurs du seigneur archevêque et de l’Eglise,
+ à cela s’ajoute dans le serment qu’en aucun temps, par
eux-mêmes ou par d’autres, ils ne chercheront auprès de quiconque à diminuer le
droit de l’Eglise ou de l’archevêque.
Et puisque le serment concerne tout désaccord, les
citoyens jureront ne faire en aucun temps, jamais, aucune conspiration ou
conjuration dans la commune ou le comté, exceptés les engagements qui sont
faits licitement à propos de sociétés de commerce ; de même prêtent serment à propos de conspiration
l’archevêque et le chapitre.
Et concernant les dommages et injustices portées à
l’archevêque et au chapitre et à leurs assistants, ceux-ci font la paix avec
les bourgeois et leurs assistants. De même les bourgeois font la paix avec
l’Eglise et l’archevêque et leurs assistants. Et concernant les dommages
portées à ceux qui ne furent pas dans ce conflit, qu’ils fussent prêtres ou
clercs ou hommes de l’Eglise ou de l’archevêque, l’Eglise et l’archevêque font
observer la paix avec les citoyens sans amende à venir.
En outre, si des religieux, laïcs ou non, qui ne sont pas
des hommes de l’Eglise ou de l’archevêque, ont des réclamations, s’ils ne
peuvent s’entendre entre eux, on ne refusera pas la censure ecclésiastique,
mais il ne sera pas permis à l’archevêque de soumettre à interdit un ou deux
d’entre eux mais l’ensemble pour les plaintes ainsi soulevées. (*)
Aussi, afin que la teneur de cette paix soit
inviolablement observée, nous apposons nos sceaux au présent document et les
sceaux de l’archevêque et du chapitre de Lyon. De plus, doivent le faire les
évêques d’Autun et de Chalon ; et les abbés de Cîteaux et de Cluny et le
chapitre des Chartreux et les Maisons du Temple et de l’Hospitalité
pareillement doivent apposer leurs propres sceaux pour porter témoignage à la
vérité concernant la paix ainsi contractualisée par la volonté de l’une et
l’autre partie.
Le seigneur O., duc de Bourgogne, est tenu solidaire de la
paix entre l’une et l’autre partie ; et le comte de Nevers est tenu à l’une et
l’autre partie pour mille marcs.
Et le seigneur archevêque et son official, si au temps du
conflit les citoyens se sont infligé entre eux un dommage corporel,
abandonneront amende et justice, et ne pourront pas forcer l’outrageant à donner
réparation l’outragé.
De plus, les fortifications faites sur les rives doivent
rester comme elles sont actuellement jusqu’à la quinzaine de Pâques ; à
cette exception : si ces fortifications font obstable à l’accostage sur
les rives où les bâteaux ont l’habitude d’accoster, elles sont détruites pour
permettre l’accostage. De la même manière, si l’archevêque ou l’Eglise a
concédé un endroit de la rive à quelqu’un pour construire, elles sont détruites
pour permettre la construction.
Aussi par ce document valable à perpétuité sont totalement
annulés tous les autres documents concernant la première paix.
Et ce document sur les usages se trouve consolidé par le
sceau de l’archevêque et de l’Eglise pour affirmer son autorité.
Acté en l’année de l’Incarnation du Seigneur MCCVIII, au
mois de septembre.
NOTES
O.,
duc de Bourgogne, R., évêque de Langres par la grâce de Dieu, P., évêque de
Macon par la même grâce, A., abbé de Bonnevaux : Othon (Odon) duc de Bourgogne, Robert de Chatillon
évêque de Langres, Ponce de Villars évêque de Macon, Amédée abbé de Bonnevaux
archevêque
R. et le Chapitre de Lyon :
archevêque RENAUD de FOREZ ; le Chapitre de Lyon est parfois dit Eglise de Lyon
si
la nature humaine le frappait :
s’il mourait
Saint-Marcel : porte d’entrée sur Lyon au nord de Saint-Nizier
(voir GAUTHIEZ), avec fossé et tour
de
bonne foi, bonne
liberté, bonnes coutumes :
juste, bien établie
consulatus : traduit ici comté (voir DUCANGE 1.)
* : traduction incertaine
première
paix : paix conclue entre l’archevêque
Jean de Bellesmains et les Bourgeois de la cité en 1193
DOCUMENTS
-
Archives
Nationales de France, Copie authentique délivrée le 26 février 1298 de Litteroe
Odonis III, ducis Burgundioe, Roberti II de Castellione, Lingonensis episcopi,
et A. Bonoevallis abbatis, de pace inter ecclesiam Lugdunensem et cives
Lugdunenses ordinata, du 1208
septembre
- THIERRY Augustin,
1843, La
Commune de Lyon au Moyen Age, pp349sq, Revue
du Lyonnais, n°17
- GRANDPERRET Théodore, 1843, De
l'état politique de la ville de Lyon depuis le dixième siècle jusqu'à l’année
1789, pp47sq
-
MONTFALCON Jean Baptiste, 1855, Origines
et bases de l’histoire de Lyon, pp.407sq
- VILLENEUVE Etienne
(de), XIVès., Cartulaire
de la Ville de Lyon, pp.377sq, éd. par GUIGUE Marie Claude 1876, rééd.
1978
-
GAUTIER Bernard, 1994, La
topographie de Lyon au Moyen Age, Archéologie du Midi médiéval, 12/1, pp.3-38
- voir
notices sur JEAN
BELLESMAINS, RENAUD de
FOREZ