le pape Urbain II à
Hugues au sujet de la primatie
1096
Urbain, évêque,
serviteur des serviteurs de Dieu, au vénérable frère Hugues, archevêque de Lyon
et primat, et à ses successeurs canoniquement promus,
à jamais.
Le devoir du Siège
apostolique et l’autorité des saints canons nous amènent à corriger les actes
établis de travers et à confirmer les actes établis convenablement dans toutes
les Eglises partout sur la terre. Aussi comme le Providence d’En-Haut nous a
accordé de venir en Gaules, ce fut notre souci de convoquer un concile général
à Clermont d’Auvergne. Ici entre autres choses portées à l’attention synodale
pour être discutées, ta fraternité a exposé la plainte du primat de la sainte
Eglise de Lyon, déjà amenée devant déjà plusieurs conciles provinciaux. Sont
lus à la même assemblée les privilèges de l’autorité romaine et apostolique
garantissant ce primat.
Donc, alors que
Richer, archevêque de Sens, est prié de répondre à ce sujet le deuxième jour,
et qu’il n’a donné en retour aucune excuse légitime, cependant il nous plut, de
par l’abondance de la bonté apostolique, d’accorder un délai jusqu’au troisième
jour pour soumettre à délibération le sujet.
C’est pourquoi au
troisième jour, alors que Richer, en partie parce que l’affaire l’incommodait,
en partie parce qu’il avait une indisposition, s’était absenté du convent
synodal, il a été recherché par des légats et, refusant d’obéir, il réclamait
encore un délai pour se décider.
Aussi la sentence
de définition étant maintenant imminente, de nouveau un délai au lendemain est
obtenu par les suffragants de l’Eglise de Sens pour une réunion des
conseillers.
Et promesse faite
pour que, si aussi Richer continue de s’obstiner, eux cependant obéissent à
l’unanimité à la définition de ce concile.
Plus tard,
maintenant au sixième jour depuis le début du concile, alors que Richer résistait
à satisfaire aux délais, par choix et jugement de tout le synode il est ratifié
que l’archevêque de Sens doit au primat de Lyon tant sujétion qu’obéissance,
parce que et l’ancienneté des catalogues et l’autorité du Siège apostolique
attestaient cela même.
Et de fait, à cette
sentence chacun des suffragants de l’Eglise de Sens professe de sa propre voix
obéir humblement.
La même chose est
confirmée de la part de l’Eglise de Rouen.
Au sujet de
l’Eglise de Tours, puisque depuis déjà des temps reculés elle obéissait sans
opposition, aucune plainte n’est aujourd’hui soulevée.
Et au huitième jour
du concile, ta fraternité de nouveau s’est plainte : l’archevêque de Sens
ayant été rappelé par tes légats, à savoir Aganon d’Autun et Lambert d’Arras
évêque, jusqu’à maintenant nulle déférence pour le primat de l’Eglise de Lyon
n’a été professée.
A cause de ça,
nous, avec le consentement de tout le concile, nous interdisons à l’archevêque
de Sens l’usage du pallium et l’obéissance de ses suffragants, jusqu’à ce que
lui-même obéisse.
Pour Rouen qui lui
aussi était absent, nous promulguons cette même sentence, si dans les trois
mois après la connaissance de la sentence il ne promettait la sujétion qu’il
doit par écrit, s’il ne pouvait vraiment pas le faire de vive voix.
Ainsi donc, les
suffragants de Richer qui étaient présents ayant accepté notre sentence avec
l’humilité que l’on doit, et promis obéissance, enfin la plainte de l’Eglise de
Lyon, avec l’approbation du Seigneur, est close.
Donc par l’écrit du
présent privilège, nous confirmons à ton Eglise de Lyon le primat sur quatre
provinces, et par lui à toi et tes successeurs, pour autant qu’ils auront été
élus ou promus dans l’ordre de succession, primat dont le titre fut par le
privilège de Grégoire VII de sainte mémoire attribué à ton prédécesseur Jubin.
Aussi ces
provinces, nous disons de Lyon, de Rouen, de Tours et de Sens, nous vous
confirmons qu’elles doivent s’acquitter envers l’Eglise de Lyon de la digne
obéissance et de l’hommage, que les pontifes romains par leurs propres écrits
ont prescrit de rendre avec dévouement et humilité, sauve en toutes choses la
déférence au Siège apostolique et à son autorité.
Si demain une
personne ecclésiastique ou séculière connaissant très bien l’écrit de ce
privilège, tentait de lui contrevenir, après deux ou trois avertissements, si
elle ne se corrigeait par une réparation convenable, qu’elle soit privée de sa
dignité de pouvoir et d’hommage, sache qu’elle est accusée par le jugement de
Dieu de l’injustice commise, soit éloignée du corps et du sang de Dieu très
sacrés de Notre Seigneur Jésus Christ, et soit soumise au jugement dernier à
une sévère punition.
Aussi à tous les
proches serviteurs de cette Eglise soit la paix de Notre Seigneur Jésus Christ
jusqu’à ce qu’ils perçoivent ce fruit de leur action et trouvent auprès du juge
sévère les récompenses de l’éternelle paix. Amen.
Furent présents à
cette définition douze archevêques de diverses provinces, avec quatre-vingts
évêques, quatre-vingt-dix abbés, et plus encore.
Donné à Clermont
d’Auvergne, de la main de Jean S. de l’Eglise romaine, cardinal diacre, aux
calendes de décembre. Indiction 3, en l’année de l’Incarnation du seigneur
MXCVI, et la huitième année du pontificat du pape Urbain II.
NOTES
Date :
10 décembre 1096 (vérifier)
definitio : arrêté final, traduit ici définition
familiaribus : serviteurs,
de la Curie, traduit ici conseillers
TEXTE LATIN
-
1644, Conciliorum.
Ab anno MLXXIII ad annum MLXXIII, tome 26
-
1701,
Recueil
de quelques-unes des principales pièces produites au procès
- 1734, Bullarum,
privilegiorum ac diplomatum Romanorum Pontificum amplissima, tome 2
- 1806, Recueil
des historiens des Gaules et de la France, tome 14
- MONTFALCON Jean
Baptiste, 1855, Lugdunensis
historiae monumenta
DOCUMENTS
-
VILLARD François, 1991, Primatie
des Gaules et réforme grégorienne, Bibliothèque
de l'Ecole des chartes, 149/2, pp.421-434
- voir notices sur
Hugues de Lyon, sur le procès
de 1698-1702