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l’Immaculée Conception à Lyon

1100

 

 

 

 

 

Le diocèse de Lyon aurait été le premier des Gaules à introduire la fête de la l’Immaculée Conception dans son calendrier liturgique.

 

En 1100, lors de son séjour à Lyon à l’abbaye d’Ainay, Anselme de Cantorbery, qui partage la pensée de Eadmer, auteur du premier Tractatus de conceptione sanctae Mariae, aurait été à l’origine de la consécration d’un autel à la Conception de Marie dans l’église abbatiale. Certains auteurs pensent qu’en fait Anselme n’adhérait pas à cette théologie mariale.

 

En 1107, le Pape Pascal II préside la cérémonie de dédicace de la nouvelle église abbatiale d’Ainay, dédiée à saint Martin, et bénit l’autel consacré à la Conception de Marie.

 

En 1136 les Chanoines de Lyon célèbrent la fête de la Conception de Marie en la Primatiale Saint-Jean. Les calendriers liturgiques lyonnais mentionnent désormais cette fête ; les offices reprennent ceux de la fête de la Nativité de Marie du 8 septembre.

 

En 1139, Bernard de Clairvaux adresse aux chanoines de la Primatiale Saint-Jean une lettre leur reprochant d’avoir institué une telle fête.

 

De toutes les Eglises de France on ne peut nier que celle de Lyon soit la première par l'importance de son siège, par son zèle pour le bien et par ses règlements, qu'on ne saurait trop louer. Où vit-on jamais discipline plus florissante, mœurs plus graves, sagesse plus consommée, autorité plus insigne, antiquité plus imposante ? C'est principalement pour les offices de l'Eglise qu'elle s'est montrée fermée à toute tentative d'innovations. Jamais cette Eglise pleine de bon sens ne s'est laissé aller à un zèle juvénile qui aurait pu lui imprimer au front la tache de la légèreté. Aussi ne puis-je assez m'étonner qu'il se soit rencontré parmi vous, de nos jours, des chanoines qui veuillent flétrir l'antique éclat de votre Eglise, en introduisant une fête nouvelle dont l'Eglise n'a pas encore entendu parler, que d'ailleurs la raison désapprouve, et qui ne s'appuie sur aucune tradition dans l'antiquité. Avons-nous la prétention d'être plus pieux et plus savants que les Pères de l'Eglise ? C'est une présomption dangereuse d'établir, en pareille matière, ce dont ils ont eu la prudence de ne pas parler. Or la chose en question était de nature à fixer particulièrement leur attention s'ils n'avaient point cru qu'il n'y avait pas lieu de s'en occuper.

S'il en est ainsi, sur quelle raison peut-on s'appuyer pour établir la fête de la Conception de la Vierge ? Comment la présenter comme sainte, quand, au lieu d'être l'œuvre du Saint-Esprit, elle n'a peut-être été que le fruit du péché ? Mais si elle n'est pas sainte, comment en faire un jour de fête ? Croyez que notre glorieuse Vierge se passera bien d'un honneur qui ne peut échapper à cette alternative de s'adresser, en elle, au péché, ou de lui supposer une sainteté qu'elle n'a point connue. Ajoutons qu'elle ne salirait à quelque titre que ce fût goûter un culte qui n'est introduit dans l'Eglise que par un esprit de présomption et de nouveauté, fécond en entreprises téméraires, aussi voisin de la superstition que de la légèreté. Après tout, s'il paraissait à propos d'instituer cette fête, il fallait d'abord consulter le saint Siège, au lieu de condescendre précipitamment et sans réflexion à la simplicité d'hommes ignorants. J'avais déjà remarqué que cette erreur s'était emparée de l'esprit de plusieurs, mais je faisais comme si je ne m'en apercevais point, et j'excusais une dévotion que leur inspiraient la simplicité de leur âme et leur zèle pour la gloire de Marie. Mais à présent que l'erreur s'attaque à des hommes connus pour leur sagesse, et que cette superstition s'insinue dans une Eglise justement fameuse dont je me regarde comme l'enfant, je crois que je ne pouvais dissimuler plus longtemps ma pensée sans m'exposer à vous offenser tous. Toutefois je soumets mon opinion au jugement des personnes qui sont plus habiles que moi, mais je défère particulièrement en ce point, comme dans tous les autres de ce genre, à la décision et à l'autorité de l'Eglise romaine, et je déclare que je suis prêt à changer d'opinion si je diffère de sentiment avec elle en quelque point que ce soit.

(Lettre CLXXIV)

 

L’argumentation de Bernard semble écarter l’implication de l’archevêque de Lyon, son ami Pierre FOULQUES, dans cette innovation qui n’a pas reçu l’aval de Rome. La liturgie lyonnaise se démarquant des pratiques romaines depuis la réforme carolingienne, cette lettre n’a pas favorisé l’accueil dans le diocèse des Bernardins par rapport aux Clunisiens (RUBELLIN, 2003, p.435).

 

Le franciscain Bonaventure, qui meurt à Lyon en 1274 lors du concile, partage le point de vue de Bernard.

 

A la fin du XIVème siècle le Chapitre de la Collégiale Saint-Paul organise des processions à l’occasion des fêtes de l’Annonciation, de la Purification, de l’Assomption, de la Nativité et de la Conception de Marie, jusqu’à l’église voisine Sainte-Marie ou Notre-Dame-de-la-Saônerie près du port Saint-Eloy (Port Dauphin).

 

Deux actes du Chapitre de Lyon confirment l’ancienneté du culte rendu à l’Immaculée Conception dans le diocèse :

 

En 1650 :

Nous, doyen et chanoines de Lyon :

 

Très illustre et très Révérend André Dusaussay, official et vicaire général de Paris, évêque désigné de Toul, ayant désiré qu'un titre authentique lui soit donné par Nous, qui fasse foi de ce qu'a été le sentiment de l'Eglise de Lyon, dès le temps de saint Bernard, au sujet du culte de la Conception de la Bienheureuse Vierge Marie ; Nous, pour satisfaire aux pieux désirs d'un homme qui par sa science a bien mérité de toute la république chrétienne, nous voulons attester par les présentes lettres, que, dans notre Eglise, à partir de l'année 1126, le culte de la Bienheureuse Vierge Marie conçue sans péché, n'a pas cessé d'être en vigueur, et que le jour du 8 décembre a toujours été consacré à fêter solennellement l'Immaculée Conception avec office du rit double. En témoignage de tout ce qui précède, nous avons donné les présentes scellées du sceau de notre Chapitre.

A Lyon l'an du Seigneur 1650, et le 6 du mois de juillet.

Pour le Chapitre :

DE REBÉ, Archidiacre.

(Semaine religieuse du diocèse de Lyon, 1904, p.13)

 

En 1668 :

Du vendredi septième décembre mil six cent soixante-huit.

 

Messieurs les Doyen, Sacristain, des Escures, de Pierreclos et de Talaru, chanoines comtes de Lyon, assemblez extraordinairement après la grande messe au subject du bref que Sa Sainteté a accordé au mois de febvrier dernier, à la prière que le roy en a faict pour la célébration de la Conception Immaculée de la Très Sainte Vierge pendant l'octave à perpétuité dans toutes les esglises de son royaume, et en conséquence de la lettre que Sa Majesté a escrite à Monsr l'Archevesque : a esté arresté, attendu que cette esglise a l'avantage d'estre la première de la crestienté qui a célébré cette teste, que l'office en sera faict pendant l'octave à perpétuité selon les ordres qui en ont esté donnez pour cet effect au soubz maistre, et qu'il en sera faict acte au premier Chapitre.

(Semaine religieuse du diocèse de Lyon, 1904, p.13)

 

 

En 1802 les sept fondateurs à Lyon de la Congrégation des Messieurs, alors clandestine, refusent que celle-ci se nomme Congrégation du Saint Cœur de Marie et lui donnent comme patronne la Sainte Vierge et son Immaculée Conception.

 

En 1817, sortant de la clandestinité, la Congrégation fonde une nouvelle section qui s’adresse aux ouvriers ; ceux-ci refusent de se nommer Congrégation de l’Annonciation de la Sainte Vierge et choisissent le nom de Congrégation de l’Immaculée Conception de la ville de Lyon, dite aussi Petite Congrégation de l’Immaculée Conception.

 

En 1852 l’inauguration de la statue dorée de Notre-Dame de Fourvière, prévue le 8 septembre, fête de la Nativité de Marie, est reportée à la prochaine fête mariale, celle de la Conception de Marie le 8 décembre. Cette inauguration est marquée par une illumination de la ville grâce à des lumignons déposés aux rebords des fenêtres, selon la coutume lyonnaise des « entrées » de personnalités royales ou ecclésiastiques (papes, archevêques) dans la cité.

 

Le 8 décembre 1854 le dogme de l’Immaculée Conception de Marie est proclamé par le Pape Pie IX (bulle Ineffabilis Deus). L’illumination lyonnaise marque l’adhésion des fidèles à ce dogme, qui appartenait depuis longtemps à la piété mariale lyonnaise. Progressivement cet usage lyonnais s’étend à toutes les paroisses du diocèse.

 

En 1854, sur la paroisse de La Nativité à Villeurbanne, alors du diocèse de Grenoble, une école pour jeunes filles, ouverte en 1846, prend le nom de Pensionnat Immaculée Conception ou Pensionnat des Demoiselles.

 

En 1855 dans le nouveau quartier urbanisé des Brotteaux est érigée la première paroisse dédiée à l'Immaculée-Conception. En 1856 commencent les travaux de construction de l’église.

 

En 1860, Anne NICOUD, qui fait partie d’une association pieuse de sa paroisse de Savoie, vient travailler dans un atelier de La Guillotière. N’ayant pu entrer dans la Congrégation Saint-Charles, elle rejoint le groupe des « filles ouvrières » fondé par son curé et bientôt en prend la responsabilité. Ce groupe essaime et devient la Congrégation de l’Immaculée Conception de Chambéry. En 1863 Mgr De BONALD érige canoniquement la Congrégation de l’Immaculée Conception dans le diocèse de Lyon.

 

En 1860, le 15 août est bénie une nouvelle église sur la commune de Caluire dédiée au Saint-Esprit et à l'Immaculée Conception de la Vierge.

 

Le 8 décembre 1954 est fêté le centenaire de la proclamation du dogme. Lyon se veut l’autre cité mariale de France, sous l’égide de son archevêque, le cardinal GERLIER, ancien évêque de Lourdes, dont la devise est Ad Jesum per Mariam (à Jésus par Marie).

 

Plusieurs églises du diocèse sont dédiées à l’Immaculée-Conception : Caluire, Emeringes, Gleizé, La Ville, Lyon (Brotteaux), La Tuillière (dans le Roannais), Vénissieux (Moulin-à-Vent).

 

 

 

 

 

DOCUMENTS

 

 

 

-      EADMER, 1124, De Conceptione Sanctæ Mariæ, édition par Dom B. Del Marmol, 1923, Maredsous

 

-      BERNARD de CLAIRVAUX, 1139, Lettre CLXXIV. Aux chanoines de Lyon sur la Conception de la Sainte Vierge

 

-      PIE IX, 1854, Constitution apostolique Ineffabilis Deus

 

-      Congrégation de l'Immaculée Conception érigée canoniquement par son éminence Mgr de Benald le 30 avril 1863 et agrégée à la congrégation de Rome dite : prima-Primaria... le 30 janvier 1864 (Archives de Saint-Augustin).

 

-      BERNARD abbé, 1877, L’Eglise de Lyon et l'Immaculée Conception : essai théologico-historique

 

-      LESTRA Antoine, 1967, Histoire secrète de la Congrégation de Lyon

 

-      RUBELLIN Michel, 2003, Eglise et société chrétienne d'Agobard à Valdès. L’Eglise de Lyon face à saint Bernard : de la réserve à l’hostilité, pp.425sq

 

-      MAS Gabriel, 2007, Le cardinal de Bonald et la question du travail (1840-1870), thèse d’histoire Université Lyon 2

 

-      CHEVALIER BOYER Christine, 2007, Les sermons de Guillaume de Sauqueville : l’activité d’un prédicateur dominicain à la fin du règne de Philippe le Bel. III/2/B. Les Dominicains et la fête de la Conception de la Vierge (vers 1300-1320)

 

-      COLLOMB Pascal, 2012, L’inscription liturgique de la Conceptio beate Marie dans le calendrier diocésain. Le cas lyonnais (XIIe-XVIe siècle), L’Atelier du Centre de recherches historiques

 

-      Ecole de l’Immaculée Conception à Villeurbanne, historique

 

-      Paroisse de l’Immaculée Conception à Caluire, historique

 

-      Solennité de l’Immaculée Conception, offices liturgiques

 

-      Les Amis d’Ainay, visite de la basilique

 

-      Paroisse de l’Immaculée Conception, historique

 

-      voir notices sur le 8 décembre dans le diocèse, la Congrégation

 

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