Pierre de Savoie
†1332
En 1308 Pierre de Savoie, fils
de Thomas III de Piémont, neveu d'Amédée V comte de Savoie, chanoine et doyen
de Lyon, devient archevêque de Lyon.
Pouvoir temporel, pouvoir spirituel
Alors que le Roi Philippe le Bel avait obtenu l’année précédente
la suzeraineté sur la ville, constituant un conseil de 12 consuls élus, le
nouvel archevêque convainc le chapitre cathédral de reprendre le pouvoir sur la
ville avec l’aide de la population et du comte de Savoie. Mais en 1310,
Philippe le Bel envoie une armée conduite par son fils Louis (le Hutin)
reconquérir la ville et ni le comte de Savoie ni l’empereur ne
réagissent ; l’archevêque Pierre de Savoie se réfugie dans son château de
Pierre-Scize où il est mis en résidence surveillée. Il est libéré grâce à
l'intervention du Pape. Il doit accepter par le traité de Vienne (Isère) du 12
avril 1312 de perdre tout pouvoir temporel, par exemple le droit de justice. Il garde juridiction sur
le Château de Pierre-Scize et le Cloître Saint Jean, tandis que les
représentants du Roi gèrent la cité.
Pierre de Savoie crée en 1312 le blason du diocèse
qui deviendra plus tard celui de la ville de Lyon : il y a désormais face
au lion une fleur de lys qui rappelle l’allégeance à la couronne de France,
puis plus tard trois fleurs de lys domineront le lion : de gueules au lion à la queue léopardée
d'argent, au chef cousu d'azur chargé de trois fleurs de lys d'or.
En 1318 la population lyonnaise se dresse contre l’autorité ecclésiastique et, au
cri de « Avant, avant, lion le
melhor », qui deviendra la devise de la ville, réclame davantage de
libertés et exige d’élire ses dirigeants. Pierre de Savoie entame des
négociations qui n’aboutissent qu’en 1320.
Le 4 avril 1320 un accord est conclu :
- l’archevêque et le chapitre
reconnaissent la souveraineté royale,
- l’archevêque et le chapitre
recouvrent leur juridiction temporelle (de premier degré),
- la cour d’appel relève de l’autorité
royale et est sise à Macon.
Conformément à cet accord, prêtent serment de fidélité
au Roi :
- le 9
juin l’archevêque et le chapitre,
- le 18
juin les fondés de pouvoir des citoyens de Lyon, élus en l’église Saint-Nizier par 3000 chefs de familles lyonnais
pour une population estimée de 15
000 habitants.
Le
21 juin 1320 est définitivement signée entre l’archevêque et les représentants
des lyonnais la « Charte Sapaudine » (Sabaudia
voulant dire Savoie), approuvée par le roi Philippe V le Long. Cette charte est
le document qui fonde les libertés communales ; elle réduit les pouvoirs
de l’archevêque au seul domaine religieux, confirme
les usages, les franchises et les coutumes de la cité de Lyon et de ses
habitants ; les lyonnais peuvent désormais élire leurs consuls pour
gérer la cité, se réunir pour délibérer,
porter les armes pour se défendre, garder les clés de la cité, fixer leurs
impôts, conserver leurs archives, se comporter en communauté d'habitants pour
des actions d'intérêt commun. La justice de première instance
relève de l'archevêque, et non du chapitre, peu apprécié des lyonnais. La justice d’appel relève du tribunal royal
de Mâcon et s'établit en 1328 à l'Ile
Barbe puis à Lyon même, dans la Maison
de Roanne à côté du groupe cathédral, la présence royale s’imposant
ainsi dans le quartier ecclésiastique. La charte Sapaudine est signée
au château de Pierre-Scize.
Le Pape Jean XXII par une lettre du 15 septembre se
félicite qu’un tel accord soit signé qui ramène la paix entre les différents
protagonistes.
La
Maison de Savoie ne perd pas pour autant sa place dans la cité. Amédée de
Savoie achète en 1310 les terres de la plaine du Velin comprenant les villages
de Manissieu, Saint Bonnet de Mure, Saint Laurent de Mure, Grenay, Saint
Priest, Vaulx en Velin, Bron, Villeurbanne, Béchevelin…, c’est-à-dire jusqu’au
pont sur le Rhône. En 1315 il achète une partie du temple des Hospitaliers de
Saint-Jean de Jérusalem, pour en faire la Maison de Savoie dans Lyon (rue d’Estrée,
rue de la Bombarde).
L’Oeuvre du Pont
En 1309, il ôte à l’Oeuvre du Pont
l’administration de l’Hôpital du Pont pour la confier aux religieux de
Hautecombe de l’ordre de Cîteaux. Mais devant les difficultés à la gérer, les
moines demandent à en être déchargés. En 1314 l’hôpital est alors confié aux
moines de Chassagne-en-Bresse.
L’Oeuvre du Pont gère une petite structure hospitalière que
les Frères « pontifes » créent lorsqu’ils reconstruisent vers
1184-1185 un pont sur le Rhône reliant Lyon à la Guillotière. L’archevêque
Renaud de Forez confie ensuite à l’Oeuvre du Pont la
gestion d’un hôpital plus ancien tout proche, l’Aumônerie du Saint-Esprit, ces
deux structures étant à l’origine de l’Hôtel-Dieu.
En 1328, le pape Jean XXII intervient
pour mettre de l’ordre dans la gestion contestée de l’Oeuvre du Pont par l’abbé
de Chassagne ; il veut « se faire rendre des comptes par tous ceux
qui ont été administrateurs du pont depuis vingt ans » et « ordonne
de plus que désormais ces biens seront régis par deux hommes probes nommés par
les consuls de Lyon et un tiers désigné par l'archevêque, lesquels rendront
annuellement compte de leur gestion » (GUIGUE, 1876, Cartulaire).
En 1334, l’archevêque Guillaume de Sure, devant les
difficultés de gestion par l’abbé de Chassagne, « attendu que nul ne
peut être tenu à l’impossible, consent à la division de l’œuvre entre les
religieux de Chassagne et les citoyens de Lyon » (De VILLENEUVE,
1876). Les religieux gardent l’hôpital et la chapelle, la municipalité prend en
charge le pont.
C’est
au couvent des Frères Prêcheurs de
Lyon (Cordeliers) que le conclave se réunit le 28 Juin 1316 pour élire un nouveau pape le 7 août,
l’évêque de Porto qui prend le nom de Jean XXII et est couronné le 5 septembre
dans la cathédrale Saint-Jean. En 1328 (1329) Pierre de Savoie consacre la
nouvelle église des Cordeliers abritant le tombeau de saint Bonaventure mort en
1274 durant le concile.
Pierre de Savoie procède à des travaux
d’agrandissement de la Primatiale.
C’est
aussi sous son épiscopat que le nombre de chanoines fut réduit dans différents
chapitres de la cité, dont celui de la Primatiale fixé à 32.
En 1328, à la suite de plaintes de lyonnais, le
pape Jean XXII demande à « l'archevêque d'empêcher les exactions
immodérées, onéreuses et illicites qu'exigent les recteurs, prieurs et curés
des églises paroissiales de la ville à l'occasion des bénédictions nuptiales et
des enterrements, et de faire observer les sanctions et les décrets canoniques,
en employant, sans appel, la censure ecclésiastique contre les récalcitrants »
(GUIGUE, 1876, Cartulaire)
En 1332 il décède et est inhumé en
l’église Saint-Just.
DOCUMENTS
-
Charte Sapaudine
- le résumé par Etienne de Villeneuve
- présentations sur le site des Pennons,
de la Bibliothèque
Municipale de La Part-Dieu, du Vieux-Lyon
-
Cartulaire
municipal de la ville de Lyon. Privilèges, franchises, libertés et autres
titres de la commune. Recueil constitué au XIVe siècle par Etienne de
Villeneuve,
publié par M.C. Guigue, Lyon, 1876
-
voir la notice de M.HOURS sur le Chapitre
de Saint-Nizier, la notice sur la Cathédrale Saint-Jean
a.chapel