édition religieuse à Lyon
1472-1993
(à
compléter)
Avec
l’invention de l’imprimerie le livre devient, à la fin du XVème siècle,
l’un des moyens majeurs de la diffusion des idées.
Le nombre d’imprimeurs
et de libraires à Lyon indique la place importante de cette ville dans
l’édition, et l’édition religieuse en particulier (voir notice sur les
éditeurs religieux à Lyon). Ces maisons, auxquelles de grands noms sont
attachés, ont ainsi participé, à leur manière, aux débats théologiques et
pastoraux des six derniers siècles : Contre-Réforme, Jansénisme,
Restauration, Modernisme, Catholicisme
social, Action
Catholique, Concile Vatican II...
C’est en 1476 à Lyon qu’est imprimée
pour la première fois par Guillaume Le Roy à la demande du libraire Barthélemy
BUYER la traduction française du Nouveau
Testament. Ce sont deux frères de l’Ordre des Augustins, Pierre Farget et
Julien Macho, qui en assurent l’édition, à partir de la traduction de Guyart
des Moulins (Bible historiale, 1297).
C’est vingt ans plus tard, en 1496, que sera éditée à Paris l’Ancien et le
Nouveau Testaments par Jean de Rély.
Cy
commence la table du nouveau testament
En
ce present volume, qui est dit le nouveau testament sont contenus viii livres.
…
Cy
finist lapocalipse et samblablement le nouveau testament veu et corrige par
venerable personne freres iullien macho et pierre fagret docteurs en theologie
de lordre des augustins de lyons sus le rosne Imprime en la dicte ville de lyon
par Bartholomis Buyer citoien dudit lion.
Le même Barthélemy BUYER édite :
- en 1473, le Compendium breve du cardinal
Lothaire, qui deviendra le pape Innocent III,
- en 1475, Le Livre des merveilles du monde, qui est le premier livre imprimé
en français,
- en 1476, La Légende dorée, Jacques de Voragine (†1298), dans une traduction
française de Jean Batalier.
En même temps que l’édition lyonnaise promeut la
langue française, elle met à disposition des savants les textes hébraïques,
permettant de nouvelles traductions et interprétations de la Bible.
La ville de Lyon
a été la pionnière de l’imprimerie hébraïque en France : premier
caractères gravés en 1486, première impression d’un texte biblique – les
Psaumes – en 1530, première grammaire importante de Pagnini en 1526, premier
dictionnaire hébreu-latin de Pagnini en 1529, première édition du Lexicon de
Calepino avec de l’hébreu en 1553, première traduction d’un Targum en 1554.
(SCHWARTFUCHS, 2008, p.44)
A partir de 1525 paraissent de multiples éditions de
l’Ancien et du Nouveau Testament, ou du Psautier, dans des traductions
françaises plus ou moins autorisées par les évêques ou les pasteurs, à partir
de la version latine de la Vulgate mais aussi de versions plus anciennes, avec
des commentaires qui prêtent à débat entre théologiens. La diffusion de la Bible en français va ainsi permettre à
davantage de fidèles d’accéder directement aux textes fondamentaux de la foi
chrétienne et leur interprétation donnera lieu à des controverses par la voie
de livres de théologie, d’autant que, « à la différence du catholicisme, le protestantisme envisage la doctrine
comme discutable, soumise à débat. La conversion ne se fait pas par la
transmission de celle-ci mais par l’argumentation » (CONSTANTIN 2011, p.14).
Progressivement,
à la suite du Concile de Trente (1545-1563), la Contre-Réforme catholique
emprunte les mêmes procédés que la Réforme : diffusion d’images et
d’affiches, édition de livres de piété, de commentaires, de traduction, etc.
La production imprimée est au cœur de la Réforme et
Contre-Réforme, ce qui place les professionnels du livre au centre de la
controverse religieuse. De la Bible grand format aux feuillets pamphlétaires,
le livre religieux devient à cette époque un enjeu politique et donc un outil
de propagande dans la querelle opposant les catholiques et les réformés. (CONSTANTIN,
2011).
Vont
donc sortir des imprimeries lyonnaises des ouvrages signés de Réformés (Calvin,
Théodore de Bèze, Viret…), mis sous pseudonymes ou non signés, des textes
composites d’inspiration « évangélique » mêlés à des textes
« catholiques », des livres dont on modifie préface ou notes pour
éviter la censure, Bible réformée accompagnée d’un calendrier liturgique
catholique, etc., (CARBONNIER-BURKARD,
2010, pp.249-251, GILMONT, 2006). Le milieu lyonnais de l’édition, libraires et compagnons,
est souvent favorable aux idées de la Réforme ; certains adhèrent à la
« nouvelle religion », d’autres prennent leurs distances mais en
gardent l’esprit. La liberté d’action varie selon les périodes : elle
diminue lors des dominations protestante ou catholique. Certains prennent des
risques jusqu’à devoir s’enfuir.
Le modèle offert
par Marguerite de Navarre est sans doute l’idéal de nombre d’entre eux : la recherche d’un
renouveau sans rupture radicale avec l’Eglise traditionnelle.
(GILMONT, 2006, p.1004)
Puis le XVIIème siècle voit
les imprimeurs libraires de Lyon publier des ouvrages de théologie morale,
écrits à l’origine en italien ou espagnol par des jésuites ou des dominicains,
avec les débats sur la grâce, et reprendre les textes issus du Concile de
Trente et les écrits qui constituent la Tradition.
Lyon (…) occupe la première
place avec deux fois plus de publications que Venise qui est la seconde, et
loin devant Mayence, Salamanque, Anvers et Rome qui se suivent dans cet ordre.
Et lorsqu’on recherche d’une façon plus générale les traités de caractère
scolastique, l’impression se confirme que les grands libraires de Lyon, et
surtout Horace
Cardon et ses associés, firent de leur cité la métropole des publications
de ce genre.
(MARTIN, CHARTIER, 1969, I., p.125)
C’est à Lyon (…) que les derniers
monuments de la théologie post-tridentine trouveront leurs libraires. Et c’est
à Lyon encore que paraîtra en 1682 la dernière et la plus monumentale
Bibliothèque des Pères de ce temps : 22 volumes in-folio à l’adresse d’Anisson, qui constituent en quelque sorte la somme et
l’aboutissement du travail accompli depuis plus d’un siècle par plusieurs
générations d’éditeurs de textes.
(MARTIN, CHARTIER, 1969, II, p.776
C’est dans ce contexte que l’édition de
catéchismes
reflètera les tendances du catholicisme en particulier au sein du diocèse de
Lyon avec le débat autour de la « théologie
de Lyon » et des thèses jansénistes, et ce jusqu’à la Révolution
française.
Défait sur le
terrain doctrinal, le jansénisme va s’affirmer sur le plan moral par l’ascèse
de vie de ses apôtres, de ses sectateurs et par un style de spiritualité qui
voulait restaurer les valeurs de l’Eglise primitive.
(AVENTURIER, 1999).
A la Restauration ce retour aux sources
du christianisme sert à montrer l’ancienneté de la liturgie
lyonnaise par rapport à celle de Paris et de Rome. L’édition lyonnaise sera
alors marquée par les controverses entre « gallicans » et
« ultramontains » qui perdureront jusqu’aux crises, intellectuelle du
modernisme et politique de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, avec, par
exemple, la revue Demain.
Après avoir beaucoup concouru à la
restauration religieuse par des livres de piété, des manuels d’instruction
religieuse, des traités théologiques pour prêtres et séminaristes, des images
pieuses, des carnets de chants, etc., progressivement l’édition lyonnaise
s’essouffle au profit de l’édition parisienne. « Entre 1806 et 1906 Lyon occupe la deuxième place dans l’édition
religieuses avec 1005 titres, derrière Paris (3875 titres), avant Limoges avec
Ardant et Barbou (557) et Tours avec Mame
(505) » que détaille ce tableau :
Année |
Maison |
Nombre de titres |
Place en France |
1816 |
Rusand |
22 |
1 |
1826 |
Périsse |
47 |
1 |
|
Rusand |
32 |
4 |
1836 |
Périsse |
63 |
1 |
|
Pélagaud |
16 |
5 |
|
Guyot |
10 |
12 |
1846 |
Pélagaud |
28 |
2 |
|
Périsse |
25 |
4 |
|
Guyot |
8 |
11 |
1856 |
Périsse |
195 |
1 |
|
Pélagaud |
105 |
3 |
|
Girard et Josserand |
21 |
18 |
1866 |
Pélagaud |
50 |
8 |
|
Girard |
32 |
15 |
1876 |
Pélagaud et Roblot |
63 |
5 |
|
Josserand |
20 |
18 |
1886 |
Vitte et Perrussel |
29 |
6 |
|
Delhomme et Briguet ? |
17 |
10 |
1896 |
Delhomme et Briguet ? |
23 |
7 |
|
Vitte |
23 |
7 |
1906 |
Vitte |
29 |
5 |
(SAVART, 1985) |
La
vie diocésaine se concentre alors davantage sur l’action et la « pastorale des
œuvres » : missions, écoles, patronages, centres sociaux, etc., qui suscitent
la publication de périodiques. Au XXème siècle les courants apostoliques, catéchétiques
et liturgiques, qui aboutiront au Concile Vatican II, expliquent des
initiatives comme la Librairie Crozier Saint-Augustin,
les Editions du Chalet,
aujourd’hui disparues, ou la Librairie des
Editions Ouvrières (L.E.O.) devenue La
Procure-LEO.
Une longue tradition
d’édition catholique s’achève avec la disparition de la Librairie
VITTE en 1969 et la transformation de la Librairie du Sacré-Cœur en Librairie DECITRE en 1970.
Naissent des publications émanant des institutions (théologie, catéchétique,
œcuménisme, diocèse, etc.), ou de mouvements comme, par exemple, Témoignage Chrétien et Golias.
Désormais
avec l’invention du réseau informatique internet le web devient, à la fin du
XXème siècle, l’un des moyens majeurs de la diffusion des idées.
DOCUMENTS
(à compléter)
- MONFALCON
Jean-Baptiste, 1857, Manuel
du bibliophile et de l’archéologue lyonnais
- AUDIN Marius, 1948,
Somme
typographique. L’imprimerie à Lyon aux XVIIe et XIXe siècles
-
MARTIN
Henri-Jean, CHARTIER Roger, 1969, Livre, pouvoirs et société à Paris au XVIIème
s., tome
I, tome
II
- SAVART, Claude, 1985, Les
catholiques en France au XIXe siècle : le témoignage du livre religieux
- HIGMAN Francis M., 1998, Lire
et découvrir
- Bibliothèque Nationale de France, 2004, Répertoire
d’imprimeurs/libraires (vers 1500-vers 1810)
- GILMONT
Jean-François, 2006, Le « Protestantisme » des libraires et
typographes lyonnais (1520-1566), Revue
d’Histoire Ecclésiastique, 101/3-4, pp.998-1013
- BENOIT Bruno, 2004, L’imprimerie
à Lyon au temps de la Renaissance. Un des
fondements de son humanisme, Grand Lyon, Mission Prospective
- Association des Bibliothèques Chrétiennes de
France, 2007, Evangéliser et imprimer. Lyon,
ville d’édition et de mission
- KRUMENACHER
Yves, 2007, Le
livre religieux au XVIème siècle (1517-1561)
- SCHWARZFUCHS Lyse,
2008, L’Hébreu
dans le livre lyonnais au XVIe siècle. Inventaire chronologique
- BEGHAIN, BENOIT, CORNELOUP, THEVENON, 2009, Dictionnaire historique de Lyon
- CARBONNIER-BURKARD Marianne, 2010, Calvin
clandestin en France. Ou les avatars d’un livre de prières
« évangélique »
-
Bibliothèque Municipale
de Lyon, La Part-Dieu, 2010, Le Chant de
David. Les Psaumes en vers français (XVIè-XVIIIè
siècles)
-
CONSTANTIN Léa, 2011, Les enjeux de
la controverse religieuse dans l’imprimerie lyonnaise, 1560-1565,
ENSSIB mémoire de recherche
- Musée de
l’Imprimerie de Lyon
- ENSSIB, Ecole Nationale Supérieure des Sciences de
l’Information et des Bibliothèques de Lyon, ressources
numériques
-
voir notice sur les éditeurs religieux
lyonnais