musée du diocèse de lyon

entrée

lettre de Grégoire VII

aux Chanoines de Lyon

1079

 

 

 

 

 

Grégoire, évêque, serviteur des serviteurs de Dieu, aux Chanoines de l’Eglise de Lyon,

salut et bénédiction apostolique.

 

 

Certains d’entre vous sont venus à nous avec leur archevêque, et, après nous avoir consulté au sujet de l’état et de l’intérêt de votre Eglise, sont repartis sans bénédiction apostolique.

 

Nous avons supporté cela avec peine encore qu’avec raison ; cependant par bonté apostolique nous n’en laissons rien paraître, et, comme nous désirons pourvoir à votre salut, nous renonçons à poursuivre leur écart.

 

Au sujet de notre fils et doyen de votre Eglise, B….., nous faisons savoir à votre Charité que, guidé par un conseil sain et avisé il a renoncé spontanément entre nos mains aux obéances d’Eglise et autres bénéfices, qu’il avait acquis sans le commun accord des frères, et qu’il a promis de ne pas en admettre plus tard.

 

Pour se conformer à son geste, tant à ceux qui se sont retirés furtivement qu’aux abbés et à tous ceux de votre Eglise de quelque ordre clérical que ce soit nous prescrivons, de par l’autorité apostolique, que n’importe quelles obéances ou dispensations d’Eglise acquises par échange financier ou contrairement à l’excommunication que l’évêque Landry de Macon fit dans votre chapitre, ils se préoccupent de les remettre sans délai entre les mains de notre frère Jubin, votre archevêque.

 

Nous voulons en conséquence que votre Eglise conserve à présent avec soin l’excellence qui brilla jusqu’ici parmi toutes les Eglises des Gaules comme modèle de la vie religieuse, et qu’elle continue à présent d’accroître sa réputation de dignité qu’elle eut jusqu’ici devant toutes ces autres Eglises comme figure de la vie religieuse.

 

Votre Charité saura aussi que, si obéissants à nos saines injonctions vous pensez devoir renoncer en toute justice aux biens mal acquis jusque-ici, alors nous veillerons sur vous pour que tout à la fois vous ne soyez pas dépouillés de profits temporels et que vous puissiez obtenir de la divine miséricorde le pardon de cette erreur.

 

Si quelqu’un, vingt jours après que soient parvenues à sa connaissance nos présentes prescriptions, leur désobéit, allant d’un cœur endurci contre son propre salut, de par l’autorité apostolique nous interdisons à celui-là l’entrée de toutes les Eglises et la communion au Corps et au Sang du Seigneur, jusqu’à ce qu’il se repente.

 

Donné à Rome, le 12 des calendes de mai, indiction 2.

 

 

 

 

 

NOTES

 

Cette lettre est introduite selon les copies ainsi :

 

Lettre 36 aux Chanoines de Lyon. Année 1079

 

Prescrit (Grégoire VII) aux Chanoines de Lyon qu’ils remettent à l’archevêque Jubin les faveurs reçues par simonie et en contradiction avec l’interdit de Landry, évêque de Macon

 

Prescrit (Grégoire VII) que, de même que leur Doyen renonça entre ses mains aux bénéfices acquis sans l’accord des frères, de même ceux qui ont obtenu des bénéfices en contradiction avec l’excommunication ou par paiement les abandonnent entre les mains de leur archevêque.

 

 

notre fils et doyen de votre Eglise B….. : Baldinus

 

dilectio vestra : traduit ici votre charité, formule de politesse, comme votre Sainteté, avec une connotation affectueuse

 

obedientia : traduit ici obéance, bénéfice lié à une lourde charge (aumône, etc.)

 

dispensatio : traduit ici dispensation, office d’administration des biens ou répartition de ces biens, par exemple par distribution de nourriture (aumône)

(voir l’institution de l’aumône à Lyon)

 

12 des calendes de mai : 20 avril

 

 

 

TEXTE LATIN

 

 

MIGNE Jean Paul, 1853, Patrologia latina, tome 148, S. Gregorii VII Romani Pontificis Epistolæ et Diplomata pontificia, col.541-542

 

 

 

DOCUMENTS

 

 

-      1728, Gallia Christiana, tome 4, p.90

 

-      CEILLIER Rémy, 1757, Histoire générale des auteurs sacres et ecclésiastiques, tome 20, p.647

Le même jour (20 avril 1079) il (Grégoire VII) en écrivit une troisième (lettre) aux Chanoines de Lyon, à qui il fait savoir que l’un d’eux, c’était leur Doyen, avait remis entre ses mains les Bénéfices dont il s’était emparé, sans le consentement des frères. Il leur ordonne, par la même Lettre, de remettre eux-mêmes entre les mains de leur Archevêque, les Bénéfices qu’ils avaient obtenus par simonie, ou au mépris de l’excommunication prononcée dans leur Chapitre par Landri, Evêque de Macon.

 

-      COCHIN, 1762, Mémoire. Pour les Prieur, Sacristain, Chanoines Réguliers et Chapitre de S.Irénée de Lyon, de la Congrégation de France. Contre les Doyen, Chanoine et Chapitre de l’Eglise Primatiale, Comtes de Lyon, p.12

Sous le Pontificat de Grégoire VII les Chanoines de Lyon s'étaient partagé les revenus communs du Chapitre, afin de vivre séparément. Ce Pape zélé pour la discipline, quoiqu'imbu des maximes les plus dangereuses sur la distinction des deux Puissances, commit Landry, Evêque de Macon, pour informer de cette innovation. Le Prélat remplit sa commission, et prononça des censures contre les Chanoines de Lyon. Ceux-ci députèrent à Rome, soit pour se faire relever des censures, soit pour obtenir une dispense de la vie commune ; mais Grégoire VII refusa constamment la dispense. Volens, dit ce Pape, ut nobilitatem qua inter omnes Gallicanas Ecclesias Lugdunensis resplenduit, in religionis exemplo nunc quoque vigilanter custodiat ; & ut gloriam quam hactenus prae caeteris habuit in dignitate, nunc augere incipiat in forma Religionis. (L. 6. Ep. 36. Gall.Christ. Tom. 4. p.90) L'Eglise Primatiale de Lyon conserve encore un vestige de son ancienne Régularité. Les Chanoines, Comtes, vont tous les Dimanches bénir les aliments dans le Réfectoire de leur Cloître.

 

-      POULLIN de LUMINA Etienne-Joseph, 1770, Histoire de l'Eglise de Lyon, p.184

Pendant les différentes absences d’Halinard, et depuis, sous l’Episcopat d’Humbert, les Chanoines de l’Eglise de Lyon, lassés de la vie commune à laquelle ils avaient été assujettis depuis leur institution, commencèrent à se partager les biens de l’Eglise, afin de pouvoir vivre en leur particulier ; mais le Pape ayant été informé de cette transgression, leur ordonna de rentrer dans leurs anciens usages, et de restituer les biens qu’ils s’étaient appropriés, ainsi qu’on le peut voir par une lettre de ce Pontife, qui est la trente-sixième du Livre VI de ses Lettres, où il dit qu’il convient que l’Eglise de lyon, qui brille par-dessus toutes les autres Eglises des Gaules par sa noblesse et sa religion, conserve soigneusement ses anciens usages pour continuer de servir d’exemple aux autres. On voit, par cette lettre, que Jubin fit le voyage de Rome avec quelques Chanoines de son Eglise à cette occasion, vers l’an 1078.

 

-      voir notices sur les archevêques HALINARD (1046-1052), HUMBERT (1052-1077), JUBIN (1077-1081)

 

 

g.decourt