prieurés &
paroisses
L’institution paroissiale et l’institution
prieurale ont été conjointes durant un temps ; parfois en concurrence ou
en conflit, elles ont souvent fait l’objet de règlements et de consignes.
Paroisse
Une paroisse relève de la juridiction de l’évêque du lieu
qui nomme lui-même le curé, ou donnait son accord lorsque le curé était nommé
par d’autres que lui. L’ensemble des paroisses constituent progressivement la
cartographie d’un diocèse, lui aussi appelé autrefois paroisse.
La paroisse (…) un phénomène complexe, caractérisé par
trois éléments : le regroupement et l'ancrage des hommes à proximité des lieux
de culte, la formation d'entités territoriales correspondant à ces
regroupements, et enfin le maillage des territoires paroissiaux ainsi
constitués dans un monde désormais plein.
(LAUWERS, 2005)
Au curé de la paroisse revient d’assurer l’ensemble des
actes de la vie chrétienne de ses fidèles. AMOLON, archevêque de Lyon, dans une
lettre à Théobald, évêque de Langres, reflétant bien l’ecclésiologie de FLORUS
(vers 844), demande ainsi instamment que, plutôt de courir après les oratoires
et les miracles, chaque membre du peuple (plebs) reste sereinement dans sa
paroisse et son église, c’est-à-dire :
là où il reçoit le saint baptême,
où il reçoit le corps et le sang du Seigneur,
où il a l'habitude d'entendre la messe solennelle,
où il obtient de son prêtre pénitence pour la faute, visite dans la maladie, sépulture dans la mort,
où également lui est prescrit d’offrir dîmes et
prémices,
où il rend grâce pour la grâce du baptême accordée à ses enfants,
où il entend assidûment la parole de Dieu, et sait ce qu’il
doit faire et ne pas faire.
ubi sacrum baptisma
accipit,
ubi corpus et sanguinem
Domini percipit,
ubi missarum solemnia audire consueuit,
ubi a sacerdote suo
poenitentiam de reatu, uisitationem in infirmitate, sepulturam in morte consequitur,
ubi etiam decimas et primitias suas offerre praecipitur,
ubi filios suos baptismatis gratia initiari gratulatur,
ubi uerbum Dei
assidue audit, et agenda ac non agenda cognoscit.
(in Patrologie Latine, 116, c.82)
Prieuré
Un prieuré est généralement fondé par une
abbaye, où résident des moines sous la direction d’un prieur nommé par
l’abbaye. Ces religieux, soumis à une règle donc « réguliers », défrichant les terres, ont attiré près d’eux des
forestiers et agriculteurs, formant village.
Le prieur peut avoir
aussi la charge pastorale des gens du lieu (prieur-curé)
sinon c’est un « prieuré simple ».
Le prieur peut nommer
(droit de collation) un prêtre comme
curé de la paroisse, auquel revient une part convenable des revenus appelée portion congrue.
Le
prieur peut ne pas résider dans le prieuré et ne pas diriger la communauté de
moines, mais bénéficier des revenus du prieuré (prieur-commendataire, laïque ou prêtre).
Le prieur est appelé
parfois doyen ou, s’il n’est pas
titulaire, obédencier ou prévôt.
Existent aussi des prieurés liés à l’oratoire
d’un « moine ermite »
c’est-à-dire, à proprement parler, d’un « solitaire au désert ».
D’autres encore regroupent quelques religieux
sans « charge d’âme » (cura animarum),
voués à la prière pour les fondateurs défunts ou pour les âmes du Purgatoire,
un peu comme les « fondations de
messes » et les « sociétés
de prêtres séculiers ».
Certains (prieurés)
ont été fondés par des laïques désireux de s’assurer des prières auprès de leur
tombeau et de ceux des membres de leur famille.
D’autres sont si
isolés qu’ils ne peuvent s’expliquer que par une volonté de calme et
d’isolement : ils permettent aux moines de se reposer et surtout de
s’adonner librement à la prière et à la méditation.
D’autres enfin – les
plus nombreux ? – sont établis sur les terres données à l’abbaye afin de
surveiller facilement les tenanciers et de percevoir les revenus
(ETAIX, 1980, p.5)
Des prieurés peuvent
faire l’objet d’échange entre bénéficiaires des revenus. Ainsi, par exemple, en
1116 entre l’évêque de Clermont et des
chanoines de la cathédrale avec l’approbation de l’archevêque de Lyon et de
l’évêque de Viviers, ou en 1173 lors de la permutatio entre l’archevêque de
Lyon et le comte de Forez avec l’approbation du Pape, du Roi et de l’Empereur,
ou lors des « sécularisations »
en 1549-1551 de l’abbaye de l’Ile-Barbe, en 1684-1685 de l’abbaye d’Ainay, en
1780-1784 de l’abbaye de Savigny, ou dans le cadre d’accords entre prétendants
aux mêmes revenus (ainsi avec les possessions de l’abbaye de La Chaise-Dieu).
À partir du IVe concile du Latran
(1215), les moines étant invités à davantage résider dans leurs propres
abbayes, des prieurés sont « sécularisés »
c’est-à-dire confiés à un prêtre non religieux donc « séculier », dépendant directement d’un évêque. Les revenus
peuvent continuer de revenir à l’abbaye ; le curé de la paroisse perçoit
la dîme de ses paroissiens.
- Patrologie Latine, Œuvres
d’Amolon, 116/82
RICHARD Paul, 1898, Etat des Prieurés du diocèse de Lyon, à la fin du XVème siècle, Revue du Lyonnais
- ETAIX Raymond, 1980, Le Prieuré de Saint-Victor-sur-Rhins au Moyen-Age et son bréviaire, Revue du Lyonnais
(nouvelle édition), 2, pp.3-14
- IOGNA-PRAT Dominique,
ZADORA-RIO Elisabeth (dir.), 2005, La paroisse, genèse d’une forme
territoriale, Médéviales,
49
- LAUWERS Michel, Paroisse, paroissiens et territoire.
Remarques sur parochia dans les textes
latins du Moyen Âge, Médéviales, 49, pp.11-32
- voir notices sur FLORUS,
AMOLON,
Echange
de 1116, Permutation de 1173
g.decourt