Edmond Auger
1530-1591
François
de TOURNON, archevêque de Lyon de 1551 à 1562, tente d’enrayer l’influence protestante.
Par exemple il nomme des prédicateurs « sûrs » à Saint-Nizier
et à la Primatiale. En 1560 il propose au Consulat lyonnais de confier le
Collège, municipal, de la Trinité à « certains
prêtres religieux nommés jésuites, lesquels sont propres pour instruire la
jeunesse en bonnes mœurs et en religion chrétienne, sans prendre aucun gage ni
salaire ». Mais les échevins renouvellent leur confiance au responsable
Barthélemy ANEAU « homme de bien, de
bonnes lettres, savoir et expérience, religieux et catholique », alors même
que certains le soupçonnent d’être trop favorable à la Réforme. C’est François
de TOURNON que le Pape choisit en 1561 comme son légat au Colloque de Poissy,
convoqué par Catherine de Médicis, entre catholiques et protestants, bien qu’il
ne fût pas favorable à cette rencontre. Mais les tensions entre catholiques et
protestants se sont réveillées, dans la ville de Lyon particulièrement, et en
1561 Barthélemy ANEAU est lynché. Huit jours après la mort de François de
TOURNON, le 30 avril 1562, Lyon est saccagé par les Calvinistes.
C’est
dans ce contexte qu’arrive en 1563 à Lyon Edmond AUGER.
Edmond (Emond)
AUGER naît en 1530 à Allemant (Marne).
Il serait passé par Lyon pour ses
études avant d’aller à Rome rejoindre les premiers « jésuites ». En
1559 il est envoyé en France pour contrer l’avancée des idées
protestantes ; il prêche à Pamiers, à Foix. Il devient recteur du Collège
de Tournon confié à son ordre par le cardinal François De TOURNON. Il est
arrêté par les armées du Baron des Adrets à Valence où il prêche en 1562. Il
devrait au pasteur Pierre Viret d’avoir eu la vie sauve. Il se réfugie à
Issoire.
Après
l’édit d’Amboise de mars 1563, l’occupation de Lyon par les protestants prend
effectivement fin le 15 juin 1563 avec la nomination d’un nouveau gouverneur
représentant le Roi. Le Chapitre primatial invite le père AUGER à prêcher à la
cathédrale lors du rétablissement du culte catholique le 18 juillet. En août un
synode national rassemble à Lyon des milliers de Réformés. La paix revient.
Lors
de la peste de 1564 le Père AUGER organise les secours et part confier la ville
de Lyon à Notre-Dame du Puy-en-Velay pour la sauver de l’épidémie. Là commence
sa popularité auprès des lyonnais.
En
avril 1565 meurt le successeur d’ANEAU au rectorat du Collège de La Trinité. A
la demande de l’archevêque des négociations s’ouvrent entre AUGER et le
Consulat pour que le Collège soit confié aux jésuites, en dépit de l’opposition
des échevins protestants. Le 1er mai le collège est confié de
manière provisoire au Père AUGER nommé recteur, en attente de l’accord du Pape
et du Supérieur des jésuites qui sera effectif en 1567.
Le
Père AUGER écrit alors des ouvrages d’enseignement de la doctrine catholique,
dont son catéchisme, traduit des livres de théologiens de la Contre-Réforme et
une histoire de la Compagnie de Jésus dans le monde. Il participe à des
controverses publiques avec le pasteur Viret dont il
obtient bientôt le départ de Lyon.
En
septembre 1567, une conjuration de Protestants tente de s'emparer de la ville ;
elle échoue en partie grâce au Père AUGER ; le 29 septembre des temples
protestants sont détruits. De nombreux Réformés sont alors exilés ; des listes
de personnalités suspectes établies ; les fonds des bibliothèques épurés ; les
quatre échevins protestants remplacés par des catholiques ; des nombreux arrêts
et ordonnances s’en prennent aux Réformés. Il n’y a plus ni pasteur, ni temple,
ni consul protestant dans Lyon ; les jésuites cherchent à convertir les
réformés ; le nombre de réformés a fortement diminué. Lyon est redevenue
catholique.
En
1569 le Père AUGER part à Paris prêcher devant la cour du roi Charles IX. Il
est appelé dans divers lieux du royaume pour accompagner les troupes
catholiques, prêcher, fonder des collèges : Jarnac, Avignon, Toulouse,
Metz, Bordeaux, La Rochelle…
En
1574 il est à Lyon pour y accueillir le Roi Henri III puis le suit. Il est
nommé confesseur et aumônier du Roi.
C’est
à partir de ce moment qu’il va enrichir la bibliothèque du Collège de dons du
Roi Henri III. Ce fonds est toujours répertorié comme tel à la Bibliothèque
Municipale de Lyon : « Ex-dono d'Henri III aux
Jésuites de Lyon par le P. Auger ».
En
1582 à nouveau la peste sévit à Lyon. AUGER revient organiser les secours. Il
part confier Lyon à Notre-Dame de Lorette.
En
1588 dans le conflit qui oppose le roi Henri III à la Ligue catholique, il
soutient le Roi. Les Ligueurs obtiennent son départ de la cour. Il revient à
Lyon. Mais là aussi on lui reproche son influence.
Dès le 20 mars 1589, le P. Edmond Auger, célèbre
jésuite, qui avait été le directeur spirituel du roi Henri III auquel il était
resté fidèle, inquiète le consulat par l’influence qu’il peut exercer au
travers de ses prédications. Selon le conseil de la Ligue, le père Auger «
apporte beaucoup de mauvais offices à la cause de la sainte union des
catholiques par les pourparlers et conférences qu’il a avec plusieurs et par
ses lettres missives et encores par les exhortations
qu’il peut faire en la confession auriculaire et par le moyen d’icelle ». Il
lui enjoint alors de ne plus parler à d’autres jésuites, ni d’écrire, ni d’ouïr
en confession, « d’autant que par la grace de dieu
cette ville est très peuplée d’aultres bons
confesseurs ».
(ESTIER Delphine,
2004)
Il
doit quitter Lyon. Il part pour Rome dont l’entrée lui est refusée en raison de
sa trop grande proximité avec le roi de France. Il va en Vénitie.
Il meurt à Cosme en 1591.
ŒUVRES
(extraits des
catalogues, multiples rééditions de certains ouvrages)
-
1563, Catéchisme et sommaire de la religion
chrétienne, avec un formulaire de diverses prieres
catholiques et plusieurs advertissements pour toutes manieres de gens
-
1564, Epitre
consolatoire aux catholiques de Lyon, atteints de peste, avec une prière à Dieu
(réédité en 1577, 1581)
- 1565, De la Vraye,
reale et corporelle presence
de Iesuschrist au S.
Sacrement de l'autel. Contre les fauses [sic]
opinions, et modernes Heresies, tant des Lutheriens, Zuigliens, et Vvestphaliens, que Caluinistes. Livre second
- 1565, Livre troisieme
de l'institution, verite, continuation, et vtilite du sacrifice de la messe. Auec
Les Responces aux Obiections
des Caluinistes, et Dènombrement
des Erreurs et Heresies contenues en leur Cene
- 1565, Response à une epistre
liminaire de Pierre Viret, ministre des reformez de Lyon, en faveur de ceux de
la Compagnie de Jésus, communément appellez Jésuites,
en laquelle est un beau discours & histoire de l'estat,
source, progrès & manière de vie d'iceux / par le Translateur du livre du
Seigneur Diegho Portugois...
- 1566, Continuation de l'institution, vérité et utilité du sacrifice de
la messe. Avec les responses aux objections des
Calvinistes et dénombrement des erreurs et hérésies contenues en leur cène.
- 1567, Des sacremens de
l'eglise catholique et vray
usage d'Iceux : Doctrine averée par toute l'Antiquité
Chrestienne, contre les novateurs de ce temps. De la vraye, reale et corporelle presence de Iesus
Christ au Sainct Sacrement de l'Autel. Contre les faulses opinions, et modernes Heresies
tant des Lutheriens, Zvingliens,
& Wesphaliens, que Calvinistes. De l'Institution,
veritté et utilité du sacrifice de la Messe. Avec
dénombrement des Erreurs et Heresies contenues en la Cene Calvinienne
- 1568, Brevis Christianarum precum
methodus, quotidianis vitae
actionibus accommoda...
-
1568, Pégagogue d'armes, pour instruire un prince chrétien à bien
entreprendre et heureusement achever une bonne guerre, pour être victorieux de
tous les ennemis de son état et de l'Église catholique dans lequel il décrivait les
devoirs d'un prince chrétien et justifiait sa lutte contre des sujets rebelles.
-
1568, Sommaire des hérésies, abus, impiétez et blasphèmes qui sont en la cène des Calvinistes,
et nouvelle religion prétendue réformée. Extraict des oeuvres de M. Emond Auger, touchant la vraye,
réale et corporelle présence de Jésus-Christ au S. Sacrement de l'autel, par
Antoine Du Val
- 1570, Sucre
spirituel pour adoucir l’amertume des aigres malheurs de ce temps
-
1571, La Manière d'ouïr la
messe avec dévotion et fruict spirituel, ensemble la
manière de bien confesser ses péchez et se disposer à recevoir le corps de Nostre Seigneur... avec ung
sermon et briève explication des cérémonies de
l'Eglise catholique, tirée du latin de M. Jean Scoepper
et quelques prières générales pour toutes sortes de personnes...
- 1574, Du sacrement
de Pénitence, livres III, et de l’Extrême-onction, livre I
-
1576, Formulaire de
prières catholiques, avec plusieurs advertissemens
pour tous estats et manières de gens.
Préface
-
1586, La Saincte Bible contenant le Vieil & le Nouveau
Testament, traduicte de latin en franÑcois,
& approuvee par les theologiens
de Louvain. Avec les annotations des anciens peres
& docteurs de l'Eglise, aux marges... Ensemble une table bien ample, docte
et catholique, traduicte du latin de monsieur maistre Jean Harlemius
Traductions
-
1565, Le premier Livre des
explications catholiques du seigneur Diegho Payva, gentil-homme portugois, qui est, une apologie pour ceux de la Compagnie
de Jesus, contre certains ministres predicans d'Alemaigne, & aultres
- 1571, Histoire des choses memorables,
sur le faict de la religion chrestienne,
dictes et exécutées és pays & royaumes des Indes
orientales. Par ceux de la compagnie du nom de Jésus, depuis l'an 1542. jusques
à present…
-
1578, Jean Gerson,
L'Imitation de Jesuschrist, livres IIII. Nouvellement
reveu, conferé avec le
latin, & corrigé
DOCUMENTS
- DORIGNY Jean, 1716, La
Vie du Père Emond Auger de la Compagnie de Jésus,
confesseur et prédicateur du roi Henri III…
- PERICAUD Antoine, 1828, Notice
sur Emond Auger
- ESTIER Delphine, 2004, 1589-1594 : la maîtrise de l’opinion à Lyon pendant la Ligue, ou le secret nécessaire, Rives méditerranéennes, Pratiques du secret XVe-XVIIe siècles, n°17
- voir dossier les
Protestants à Lyon
- voir les notices sur François
de TOURNON, Barthélemy
ANEAU, sac du
Baron des Adrets, les
Vêpres lyonnaises,
g.decourt