Edouard
Aynard
1837-1913
Edouard
AYNARD naît à Lyon en 1837.
Il
étudie au collège Saint-Thomas-d’Aquin d’Oullins, fondé par des prêtres
diocésains dans la mouvance du catholicisme libéral, puis il poursuit sa
formation en Angleterre et aux Etats-Unis avant de prendre la direction de
l’entreprise familiale de textile puis de banque.
Il n’est pas indifférent pour l’historien, quand il
rencontre au cours de ses recherches tel ou tel notable lyonnais, de savoir
qu’il passa par Saint-Thomas-d’Aquin.
(HOURS, Les
débuts…)
En 1864 il participe à la création du
Musée des Arts et de l’Industrie de Lyon.
En 1866 il est directeur de la Caisse
d’Epargne du Rhône. En
1867, il devient administrateur de la Banque de France à Lyon dont il sera
régent.
En
1868, il devient administrateur de la Société des
Amis et des Arts.
En 1871, il devient conseiller municipal
de Lyon jusqu’en 1881.
En
1871 il fonde le Journal de Lyon qui
disparaît en 1874.
En
1871 il devient administrateur des Hospices Civils de Lyon.
En 1872 il devient administrateur de la Société
d’Enseignement Professionnel du Rhône.
En 1873 il participe à la fondation
de la Société de géographie de Lyon spécialisée
dans l’Asie et l’Afrique.
En 1876 il entre à la Société
d’Economie politique ; durant sa présidence de 1886 à 1889 il fait
ajouter « et d’Economie Sociale » ; il aura pour
successeur Auguste Isaac.
En
1878 il devient président des Musées du Palais Saint-Pierre (Musée des
Beaux-Arts actuel) auquel il fera don de sa collection d’œuvres d’« art
islamique ».
De 1881 à 1887 il préside la Société lyonnaise de dépôts.
En
1882 il devient administrateur de la Chambre de Commerce de Lyon dont il sera
président de 1890 à 1898. Il transformera alors le Musée des Arts et de l’Industrie en Musée historique
de tissus, chargé de l’enseignement artistique.
Dès 1886 avec Félix Mangini et Joseph
Gillet, il fonde la Société anonyme des
logements économiques qui achète des logements qu’elle réhabilite. En 1902
on compte 1500 logements pour environ 8000 personnes largement endettées.
En 1889 il est élu député du Rhône jusqu’à
sa mort, comme « républicain progressiste ».
Vers
1903 il préside le Comité lyonnais de la liberté de l’enseignement.
En 1905 il cherche à amender le projet de loi de séparation de l’Eglise et
de l’Etat, puis vote contre, mais n’accepte ni l’intransigeance de Pie X et des
cléricaux ni celle des anticléricaux de la Gauche socialiste.
De 1905 à 1907, avec L.Gillet et
A.Isaac, il finance la revue Demain,
revue de débat démocratique prônant l’ouverture de l’Eglise à la
modernité ; il écrit plusieurs articles ; dans l’un d’eux il propose
Camille RAMBAUD comme figure du prêtre à venir.
En
1906 il rachète l’abbaye de Fontenay, qui abrite une papèterie depuis la
Révolution, devenue propriété de la famille de son épouse, Rose De Montgolfier
en 1820, classée Monument historique en 1852 ; il la restaure en faisant
démolir les constructions industrielles. Il en fait sa résidence où décède son
épouse en 1910.
Il
décède subitement au Palais-Bourbon en 1913.
______________________
Homme de modernité, il veut concilier la
religion avec les autres libertés. Le rapport à la religion reflète le souci de
modération propre aux catholiques libéraux. Le libéralisme religieux s'associe
bien avec le libéralisme politique, économique et intellectuel.
(FOURNIER)
Nous entendons que ceux
qui ont des croyances, sans distinction de culte, soient aussi libres que ceux
qui les combattent ; libres de propager leur Foi ou leur opinion par la parole,
par l'écrit, par l'enseignement et par les œuvres. [...] La liberté du travail
est-elle respectée d'avantage ? elle tend de plus en plus à devenir
unilatérale. L'émancipation ouvrière a été assurée, et on a bien fait, par les
lois sur les coalitions et sur les Syndicats professionnels ; mais l'ouvrier
est encore loin de comprendre qu'il existe d'autres droits que les siens, que
le contrat de travail est un contrat comme un autre, et que la liberté
d'association professionnelle qui lui a été accordée par privilège, (car
beaucoup d'autres catégories de citoyens l'attendent encore), n'est pas un
droit d'association politique, socialiste ou révolutionnaire.
(Lettre d'Edouard
Aynard adressée au rédacteur en chef de La
République Nouvelle, citée par FOURNIER)
Ce républicain du Centre revendique
dans l’héritage de la Révolution, celui des Droits de l’homme. Son modérantisme
n’est pas de la mollesse, puisque « la modération est un état violent de
l’esprit ».
(BENOIT,
Millénaire)
L'affirmation de
l'identité politique lyonnaise s'exprime d'abord par son modérantisme. En tout
premier lieu, le modérantisme lyonnais signifie un refus des extrêmes en
politique, extrêmes rendus responsables de tous les malheurs de Lyon depuis
1793 et porteurs de représentations socio-politiques calamiteuses. Ensuite, le
modérantisme lyonnais proclame son centrisme, regroupement aux contours souples
et aux nuances nombreuses qui peut, de la sorte, englober plusieurs familles
politiques distantes les unes des autres sur le terrain religieux ou
socio-économique, mais se reconnaissant parfaitement dans le Centre,
c'est-à-dire ni la Droite réactionnaire ou putschiste, ni la Gauche
révolutionnaire. Enfin, ce modèle politique modéré est à la recherche d'un
consensus capable de rassembler les Lyonnais.
(BENOIT, 1999, p.153)
Edouard Aynard n’était pas ce
qu’on appelle un homme d’œuvres. La philosophie le portait plutôt vers les
œuvres ou les institutions laïques telles que les Sociétés de Secours Mutuels. (…) Il n’aurait pas apprécié les
Semaines Sociales qui aboutissent à charger l’Etat d’un ou de plusieurs rôles
qu’il ne peut assumer sans danger, tels que la fixation des salaires, le
partage de l’autorité avec les syndicats, etc. Il se méfiait beaucoup des
théories d’Albert de Mun qu’il accusait volontiers de parler de choses qu’il ne
s’était pas donné la peine d’étudier avec impartialité, et de s’être épris de
certaines institutions uniquement parce qu’elles avaient un côté
religieux ; c’est par exemple le cas des corporations qu’on veut remettre
à la mode, et qui n’ont dû une part de leur force que parce qu’elles étaient
doublées de confréries.
(ISAAC, Journal, 6 mai 1934, cité par LADOUS)
Edouard Aynard est un exemple original de bourgeois
lyonnais de la seconde moitié du XIXème siècle. Ses convictions républicaines
modérées le distinguent des hommes politiques locaux, dans une ville ou les
extrêmes se côtoient. Elles lui permettent ainsi de devenir député du Rhône, et
de le rester pendant vingt-quatre ans. A l'Assemblée et à la Chambre de
commerce de Lyon, ouvert sur d'autres mondes et d'autres cultures, il défend le
libre-échange alors que le protectionnisme progresse, même dans son parti.
Banquier, régent de la Banque de France, il aime les affaires mais il a aussi
d'autres passions. C'est un amateur d'arts qui aide les artistes lyonnais,
organise le Musée des tissus, et rassemble une des plus importantes collections
privées de son époque. Mais surtout, conscient du rôle de la bourgeoisie dans
une société fragile, ce catholique libéral s'engage dans de nombreuses œuvres
caritatives, et constitue un réseau d'amis fidèles, de confessions et
d'horizons divers, qui l'accompagneront toute sa vie dans ses multiples
activités. Cette « figure vivante du capitalisme » est ainsi un homme
complet, incontournable à son époque : il s'est impliqué dans la vie publique
pour faire progresser et parfois triompher ses idéaux de justice, de tolérance
et de plus grande rigueur morale. Bien qu'oublié maintenant, il illustre de
manière significative le courant modéré encore bien présent à Lyon...
(GENESTE)
DOCUMENTS
-
Bibliothèque numérique de Lyon, 1871, Le Journal de Lyon
-
BERNARD Matthias, 1998, La
Dérive des Modérés : La Fédération républicaine du Rhône sous la Troisième
République
- GENESTE
Sylvie, 1998, Edouard
Aynard, banquier, député, mécène et homme d’œuvres (1837-1913), thèse de
doctorat d’histoire, Université Lyon III
-
BENOIT
Bruno, 1999, L'identité
politique de Lyon : entre violences collectives et mémoire des élites
(1786-1905)
-
FOURNIER
Alexandre, 2000, Les
réseaux conservateurs à Lyon, à la fin du XIXe siècle (1880-1900), Institut d’Etudes
Politiques de Lyon
-
LADOUS
Régis, 1992, Auguste Isaac et le catholicisme français, in DURAND J.D., COMTE B., et alii (dir.), Cent ans de catholicisme social à Lyon et en
Rhône-Alpes
-
BENOIT Bruno, Edouard
AYNARD (1837-1913). Le grand
bourgeois libéral, Millénaire3, Centre Ressources Prospectives du
Grand Lyon
-
Musée
des Beaux-Arts de Lyon, Lyon
et les arts de l’Islam
voir
notices sur Les
débuts du collège Saint Thomas d’Aquin (H.HOURS), la revue Demain, Auguste
ISAAC, Camille
RAMBAUD
g.decourt