Auguste
Isaac
1849-1937
Auguste
ISAAC naît en 1849 à Roubaix.
Il
fait ses études au Lycée Impérial (Ampère) de Lyon puis en Angleterre et
parcourt les Etats-Unis pour visiter les manufactures.
Il
dirige les entreprises familiales. Il est administrateur de nombreuses
sociétés.
Par
Edouard AYNARD il entre à la Société d’économie politique et d’économie sociale
dont il est président à sa suite, à la Chambre de Commerce dont il est
président à sa suite jusqu’en 1910, à la Société lyonnaise de dépôts…, à
l’Académie de Lyon, à la Société d’Enseignement professionnel du Rhône…
Conservateur,
il se rallie à la République. Il est député (Entente républicaine démocratique) de
1919 à 1924 ; il est ministre en 1920 et affronte la C.G.T. qui conduit
des grèves dans les transports.
Il
décède à Lyon en 1937.
« Catholique libéral ».
Il
se définit comme un « catholique libéral ». Pour lui la religion est
d’ordre privé, faite de convictions personnelles. « L’œuvre du christianisme est surtout d’ordre intime et personnel »
(Journal, 29/09/1907). Le christianisme n’est pas une organisation sociale
régie par une doctrine catholique avec ses prêtres. Il abhorre tout
cléricalisme, qu’il soit monarchiste ou socialiste.
En
1880 il est membre du Comité de l’évêché qui veille sur les intérêts
catholiques.
Il
se tient à distance d’Albert de Mun et des propagateurs de Rerum Novarum. Pour lui les « catholiques sociaux », des
Semaines sociales par exemple, « rêvent
d’un Etat basé sur les encycliques pontificales. On aboutit ainsi à une sorte
de théocratie, régime dont les hommes libres ne peuvent pas se contenter »
(Journal, 17/9/1925). A ses yeux démocratie chrétienne et catholicisme social
ne font qu’un.
On a parlé de démocratie chrétienne, c’est-à-dire d’un
gouvernement égalitaire, basé sur la pratique des vertus chrétiennes (…) Une démocratie chrétienne risquerait de
devenir un gouvernement théocratique où l’influence des prêtres serait
dominante, ce qui ne vaudrait pas grand-chose pour eux et présenterait pas mal
de risques pour ceux qui subiraient leur influence sans aucun contrepoids.
(Journal,
18/2/1917)
C’est
surtout au nom du libéralisme économique qu’il rejette aussi bien les
« catholiques intransigeants », nostalgiques de l’Ancien Régime, que
les « catholiques sociaux », qui veulent mettre l’Etat dans
l’économie. Il estime que le catholicisme social n’a aucun avenir dans aucun
pays.
En
1905, avec E.AYMARD et L.Gillet, il soutient la revue Demain qui regroupe des républicains favorables à la séparation de
l’Eglise et de l’Etat, au débat démocratique plutôt qu’aux pensées imposées,
mais il n’apprécie pas le caractère polémique des écrits de son rédacteur en
chef, Pierre JAY, ni d’ailleurs le manque de largeur de vues de ceux qui
veulent le contraindre à se taire (Journal, 18/01/1907).
En
1906 il voit dans le refus par Pie X des associations cultuelles la volonté
d’écarter les laïques de la gestion des biens d’Eglise. Pour lui les prêtres
doivent se consacrer à l’instruction religieuse plutôt qu’à l’enseignement des
matières profanes dans les écoles libres, aider les pauvres plutôt que faire de
la politique dans leurs sermons ou gérer des biens temporels, car ils n’en ont
pas la compétence. En cela l’abbé Camille RAMBAUD est pour lui la figure du
prêtre, lui qui fut « mon confident,
mon ami, mon confesseur » (Journal, 21/07/1907).
J’étais partisan des associations cultuelles et suis
encore partisan de l’administration par des comités laïques du produit de la
générosité des fidèles.
Avec les garanties qu’il peut prendre
dans la composition de ces comités, le clergé aurait tout intérêt à se décharger
sur eux de toutes les préoccupations matérielles qui l’empêchent de se livrer
complètement au soin des âmes qui lui sont confiées.
(Journal,
1/11/1907)
En
1906 il préside le Comité lyonnais pour la liberté de l’enseignement (23 rue
Neuve à Lyon) et à ce titre participe au Congrès diocésain de 1908.
En
1907 il approuve la condamnation par Rome des thèses modernistes.
A la
faveur de l’Union sacrée à partir de 1914, des catholiques veulent rétablir les
droits de l’Eglise. Il estime que cette attitude reflète une mauvaise
appréciation de la situation du pays et une mauvaise conception du
christianisme.
On nous parle beaucoup des droits de l’Eglise. Je veux
bien que celle-ci ait droit à des égards, sinon à des privilèges, mais elle ne
doit pas oublier que son fondateur n’a conquis le monde qu’en se faisant
crucifié.
(…)
C’est en vain qu’on prétend que les catholiques sont la
majorité en France. Les baptisés sont encore la majorité, mais les indifférents
les étouffent. Il faut donc avoir une attitude plus prudente et reprendre
l’esprit évangélique qui commence par l’humilité. Notre Seigneur est né dans
une étable et mort sur une croix.
(Journal,
24/08/1925)
En
1926 il souhaite la condamnation de l’Action Française : « je ne puis prendre au sérieux ces velléités
de retour à la monarchie et la prétention de l’Action Française à être la seule capable de défendre la
religion m’a toujours été odieuse. Pour défendre la religion, il faut d’abord
la pratiquer. J’espère bien que Rome ne fléchira pas et condamnera carrément
tous ceux qui s’obstinent à lire cette feuille pourrie d’orgueil »
(Journal, 25-12/1926).
Il
se réjouit des Accords du Latran de 1929 mettant fin au pouvoir temporel des
papes : « nous n’entendrons
plus parler du pape-roi et ne verrons plus les exaltés mettre à l’index les
catholiques qui n’étaient pas partisans du pouvoir temporel des papes
« (Journal, 15/2/1929) ; il vise entre autres Joseph RAMBAUD,
fondateur du Nouvelliste qui s’était
engagé parmi les zouaves pontificaux en 1870.
Militant de la
famille
En
1886 avec E.AYNARD et L.Gillet il fonde la Société
civile des logements économiques qui finance 1500
logements pour 8000 personnes. En 1894 cette société fusionne avec la Société d’Alimentation, fondée en 1891,
sous le nom de Société démocratique des
habitations hygiéniques à bon marché (dite H.B.M.).
En
1913 il fonde La Grande Famille de Lyon
pour donner des logements aux familles de cinq enfants ou plus.
En 1916 il participe à la fondation de l’association La plus grande famille, dont il devient
président, qui cherche à promouvoir la natalité et à soutenir les familles
nombreuses.
En 1920
il favorise l’instauration d’un Conseil
supérieur de la natalité sur le modèle du Conseil supérieur du Travail créé
en 1891 où il siégea ; il se heurte alors aux évêques qui estiment que toute
politique familiale relève de la doctrine sociale catholique et non de l’Etat.
En 1921 est fondée la Fédération
Nationale des Familles Nombreuses dont il devient président.
En
1926 il soutient une loi pour le vote des femmes qui est refusée au Sénat, puis
une autre pour le vote familial (les parents votant aussi pour leurs enfants)
mais sans succès non plus.
En
1927 il organise le Comité international pour
la vie et la famille afin de combattre les idées eugénistes.
DOCUMENTS
- LADOUS Régis, 1992,
Auguste Isaac et le catholicisme français, in DURAND J.D., COMTE B., et alii (dir.), Cent ans de
catholicisme social à Lyon et en Rhône-Alpes
-
FOURNIER
Alexandre, 2000, Les
réseaux conservateurs à Lyon, à la fin du XIXe siècle (1880-1900), Institut d’Etudes
Politiques de Lyon
- JOLY Hervé (dir.), 2002, Auguste Isaac Journal d'un notable lyonnais, 1906-1933
- JOLY Hervé, 2004, Auguste Isaac,
administrateur de sociétés, Patronat, bourgeoisie, catholicisme et libéralisme.
Autour du Journal d'Auguste Isaac, Cahiers Pierre Léon, n°5, pp.134-151
-
DURIEZ Bruno, 2005, Les
catholiques dans la République 1905-2005
-
ANGLERAUD
Bernadette, 2011, Lyon et ses pauvres. Des œuvres de charité aux assurances sociales
1800-1939
-
voir
notices sur Edouard
AYNARD, la revue Demain, Camille
RAMBAUD, les Congrès
diocésains…
g.decourt